Avez-vous oublié Mgr Romero ?

24 MARS 1980 : John Negroponte fait abattre un Archevêque. Obsédé par la perspective d’un « troisième Cuba » à ses portes et craignant une « contagion nicaraguayenne » au Salvador, l’administration

Reagan finance la junte militaire qui gouverne le pays. Celle-ci traque le « subversif » à l’aide d’escadrons de la mort, supervisés, équipés et entraînés par la CIA et l’ambassadeur US au Honduras, John Negroponte.

Révolté par les atteintes aux droits de l’homme et crimes commis par la junte, l’archevêque de San Salvador, Oscar Romero, prend la tête de la contestation réclamant la fin de l’aide militaire US. Soutenue par l’église catholique aux États-Unis, la voix du « curé rouge » prend du poids et dérange. Le 24 mars, en pleine messe, un commando militaire fait irruption dans l’église et abat Romero. Les assassins ne se cachent même pas ; l’un deux est diplômé de l’École des Amériques en Floride, centre d’entraînement des tortionnaires sud-américains. Deux autres appartiennent au Bataillon 3-16, une unité paramilitaire volante centraméricaine sous les ordres de Negroponte et agissant depuis la base militaire US de El Aguacate, où l’on retrouvera plus tard des charniers contenant plus de 150 corps suppliciés.

17 FÉVRIER 2005 : Le président George W. Bush a achevé la composition de sa nouvelle administration en nommant John Negroponte au poste de Directeur central du renseignement. Cette nouvelle fonction, créée sur recommandation de la commission d’enquête parlementaire sur les échecs des services secrets le 11 septembre 2001, consiste à superviser l’ensemble des agences de renseignement, à les coordonner et à organiser le partage des informations sans remettre en cause le cloisonnement des structures. Le Directeur central disposera donc de pouvoirs d’exception et exceptionnellement étendus, sans équivalent dans l’Histoire des États-Unis. Homme de confiance de Donald Rumsfeld, il permettra à celui-ci d’étendre son autorité sur les services civils.

Coupable des pires exactions en Amérique latine, puis en Irak, John Negroponte aura pour mission de recourir à l’action secrète pour « étendre la liberté ».