Les agriculteurs aimeraient tirer la même charrue

De la terre à l’assiette en passant par la pollution

Après que furent passées au peigne fin les pratiques forestières et qu’on ait dressé un bilan de l’état des forêts publiques québécoises, c’est maintenant au tour de l’agriculture de faire l’objet d’une telle démarche l’automne prochain.

Une dizaine d’organismes issus du monde municipal, agricole, environnemental, rural et des associations de consommateurs ont officiellement lancé, en mai dernier, le projet en inaugurant le Collectif des États généraux sur l’agriculture.

L’objectif du groupe : l’organisation d’un large débat sur l’agriculture, l’alimentation et le territoire, débat que l’Union paysanne réclame en vain auprès du gouvernement depuis plus d’un an et demi. Pour le moment, le collectif réunit l’Union paysanne, l’Union des consommateurs, Équiterre, Solidarité rurale du Québec, la Fédération québécoise des municipalités, Option Consommateurs et l’Union québécoise pour la conservation de la nature.

Ces organismes en appellent donc à vaste consultation et à une réflexion transparente sur les enjeux qui touchent de près ou de loin l’agriculture. De la terre à l’assiette en passant par la pérennité du territoire et le rôle social de l’agriculteur, tous les sujets feront l’objet d’une vaste analyse à laquelle sont conviés les intervenants du milieu agricole et de tous les secteurs de la société civile.

L’un des premiers instigateurs du projet, le secrétaire général de l’Union paysanne, Benoit Girouard estime qu’un tel exercice s’impose et qu’il est plus que temps de remettre en question nos pratiques agricoles. « On doit permettre aux organisations agricoles et citoyennes de dégager une vision commune de l’agriculture pour en arriver à une véritable politique agricole et ainsi mettre fin à la gestion à la pièce ».

Bien que son but soit l’adoption d’une politique nationale sur l’agriculture, le Collectif mise d’abord sur tout le travail de sensibilisation, de réflexion et de débat au quotidien. « Si les gens discutent et débattent pendant deux ans des enjeux agricoles, on aura fait un bon bout de chemin, on aura fait évoluer le Québec ! », souhaite Girouard.

Deux acteurs notables du monde agricole manquent toutefois à l’appel. L’Union des producteurs agricoles (UPA) et le ministère de l’Agriculture, des Pêches et de l’Alimentation (MAPAQ) semblent réticents à prendre part à l’exercice.

Si l’on se fie au Ministère, il n’y pas lieu de se poser de questions puisque tout semble aller pour le mieux dans nos vertes campagnes ! Du côté de l’UPA, une porte-parole se limite à commenter très brièvement qu’il n’est pas question de participer à un processus de réflexion sur l’agriculture sans que soient bien définis les limites et les cadres du gouvernement.

Le président de l’unique syndicat agricole, Laurent Pellerin, avait été plus loquace au micro de la radio d’État en arguant que « des gens non-agriculteurs prônent la nécessité d’un débat sur l’agriculture avant même d’avoir approché les agriculteurs pour connaître leur point de vue ».

L’UPA n’a pas donné suite aux invitations du Collectif et son absence des États généraux sur l’agriculture signifierait que la presque totalité de 44 000 producteurs agricoles qu’elle représente n’auraient pas voix au chapitre. Insensé !

Pour Girouard, producteur de lapin à Mirabel, il ne fait aucun doute que la population a son mot à dire, « l’agriculture n’est pas uniquement synonyme de production, il s’agit d’entretenir le pays, d’occuper les régions, de s’occuper de la terre dans son sens le plus large et de décloisonner la gestion de l’agriculture en faisant des liens avec la population. Aujourd’hui, on ne peut plus faire d’agriculture sans les citoyens ». La résistance de l’UPA s’explique selon lui, par la crainte d’avoir à faire un examen de conscience et une difficile remise en question.

D’ici l’automne, date prévue de la tenue des États généraux, le Collectif défrichera le terrain pour rallier de nouveaux intervenants et tenter de tisser des liens, même avec les plus réticents !

À suivre.