La filière éolienne ne laissera que des miettes en région

Au début des années 2000, beaucoup, particulièrement dans l’Est du Québec, voyaient dans l’éolien une planche de salut pour les régions périphériques qui subissent à répétition les effets du pillage des ressources qui étaient leur gagne-pain et leur raison d’être : la pêche, la forêt, l’agriculture, les mines, l’énergie.

Suite au colloque de Rimouski, qui réunissait les promoteurs privés, les ministères des ressources et des régions, les municipalités et les groupes de citoyens confrontés sans préparation et sans préavis aux appels d’offres d’Hydro-Québec, aux projets de promoteurs et aux tractations privées des prospecteurs de vent, il devient évident que la filière choisie par le Gouvernement ne laissera en région que des miettes sinon des dégâts: quelques emplois manufacturiers, quelques emplois de maintenance, des « compensations volontaires » équivalentes à 2 % des revenus anticipés des promoteurs, des servitudes et obligations coûteuses à long terme pour les municipalités et les agriculteurs, une dégradation des paysages et de la qualité de vie qui hypothéqueront l’avenir des régions-hôtes. Les seuls qui vont profiter de ce nouvel Eldorado, ce sont les grandes compagnies privées comme Inmergex, Sky Power, Boralex, Northland Power, Trans-Canada, etc.

Tout cela parce que, en dépit de l’acquis de la nationalisation de l’électricité, le gouvernement actuel a décidé de revenir, pour l’éolien, au même modèle qui a fait la ruine des régions dans la gestion de la forêt, des pêches, de l’agriculture et des mines, c’est-à-dire concéder la ressource à des compagnies privées qui en tirent le meilleur sans se soucier d’assurer leur pérennité et leur prolongement dans l’économie locale.

Des projets communautaires, comme ceux qui sont en formation à Amqui, à Saint-Noël, au Témiscouata ou au Lac-Saint-Jean témoignent d’une résistance admirable des populations qui se voient dépouiller d’une des dernières ressources qui leur reste : le vent !

Mais leurs chances de gagner la course demeurent minces et limitées. Les ministères concernés acceptent à reculons de leur aménager un semblant de créneau dans la filière (250 MW), mais toutes les règles du jeu ont été pipées en faveur des promoteurs privés. En plus d’avoir préféré le privé à Hydro-Québec, les ministères concernés, comme dans le cas de l’industrie porcine, ont laissé aux municipalités et MRC la responsabilité odieuse d’improviser en toute hâte, sans outils et sans moyens, l’encadrement indispensable des projets pour éviter des dommages irréparables dans le milieu.

Le ministre Corbeil refuse qu’on qualifie le développement éolien d’anarchique, mais les orientations fonctionnelles et les outils d’encadrement pour les municipalités et les citoyens ne sont pas encore disponibles et ne le seront que quelques semaines avant la fin des appels d’offres pour 2000 MW. On a tout fait pour que les promoteurs privés aient le champ libre le plus possible.

Une seule conclusion s’impose : il faut reprendre la contrôle de l’opération, la confier à Hydro-Québec avec le mandat d’en faire un levier économique pour les régions périphériques en difficulté, en partenariat avec les communautés régionales concernées.t