Gabrielle, de Louise Archambault &#58 Une histoire vraie qui force l’émerveillement

Deuxième long métrage de fiction après « Familia », qui a remporté plusieurs prix dont le prix Claude-Jutra du meilleur premier long métrage au Gala des Génies en 2005, Louise Archambault présente « Gabrielle », tout aussi récompensé aux festivals de Locarno et d’Angoulême, et récemment honoré au Festival international du film de Toronto.

À quoi cette faveur et cette ferveur tiennent-elles ? La réponse vient tout naturellement. À la vérité et à l’authenticité du film. « C’est de l’avoir fait avec eux et non sur eux », rappelle la réalisatrice. Ici, pas de mélo ni de pathos, mais une histoire vraie qui force l’émerveillement.

Il y a dans le film, des scènes où la réalité se mêle à la fiction. Par exemple, la rencontre de Robert Charlebois et des choristes a été filmée en direct, laissant la place à la spontanéité du moment. Il faut voir le regard ébahi et reconnaissant chez certains, et poindre la gêne qui se lit sur le visage d’autres membres de la chorale. Au final, le bonheur éclate de partout lorsque le chanteur vénéré, aussi intimidé qu’eux, reprend la balle au bond et détend l’atmosphère.

D’autres scènes ajoutent également cette pointe de concret à l’histoire. Sébastien Ricard, qui joue le rôle de Raphaël, le « chum » de Sophie, évolue également dans un milieu naturel. Filmé dans le décor authentique d’une école dirigée par l’organisme Jeunes Musiciens du monde, située dans le Karnataka, en Inde, Raphaël, professeur de musique qualifié, dispense des cours de musique traditionnelle aux enfants de cette région agricole pauvre.

La relation de Raphaël et Sophie se poursuit sur Skype. Les images permettent aux amoureux d’entrer dans l’intimité de l’autre. Pour le spectateur, la magie opère de la même façon. Il observe, en direct, la vie de Raphaël. Il découvre, non seulement son lieu de travail, mais aussi les liens qui unissent le professeur et ses petits élèves. Ce procédé confère aux scènes une valeur émotive beaucoup plus grande que si elles avaient été reconstituées en studio à Montréal.

Un autre aspect important de ce film concerne le choix des acteurs non professionnels. La cinéaste a fait appel à la chorale « Les Muses », un organisme voué à l’éducation artistique des personnes handicapées. L’actrice principale, Gabrielle Marion-Rivard, y a reçu sa formation artistique. Gabrielle a grandi dans une famille de musiciens. Par un apprentissage musical précoce et prolongé, elle a développé une capacité de discrimination extrêmement fine des fréquences (l’oreille absolue) et un talent musical, deux caractéristiques reliées au syndrome de Williams dont elle souffre.

Les autres membres de la chorale sont également issus de l’organisme, logé sous le toit du Centre Champagnat de la Commission scolaire de Montréal, qui accueille un grand nombre d’adultes handicapés.

« Lorsque j’ai entendu Anthony Dolbec, un des élèves de l’école des Muses chanter Ordinaire, j’ai tout de suite su que cette pièce devait faire partie du film, surtout pour le personnage de Martin qui souhaite se réaliser comme les gens normaux », observe Louise Archambault. Le film se termine sur la chanson « Lindberg ». Ainsi s’envole le film. Au-delà des différences, le bonheur éclate comme autant de feux d’artifice dans le ciel.

Vous serez scotchés à l’écran, je vous le promets. Du coup, je vous mets au défi de ne pas sortir vos mouchoirs.

Au moment d’aller sous presse, nous apprenons la sélection de Gabrielle comme représentant du Canada dans la course pour l’Oscar du meilleur film en langue étrangère.

Bonne chance Louise Archam­bault !