Pour un référendum municipal consultatif

L’acceptabilité sociale de l’oléoduc Énergie Est en question

Même si les municipalités concernées (et le gouvernement québécois lui-même) n’ont pas le pouvoir d’accorder ou de refuser les autorisations requises pour la construction et le passage d’un oléoduc interprovincial, cette juridiction étant réservée à l’Office national de l’Énergie du Canada (ONE), il demeure qu’une position claire de leur part peut contribuer puissamment à construire un rapport de force et constituer un indicateur solide du degré d’acceptabilité sociale, économique, écologique et politique d’un tel projet.

L’impact de la position exprimée par les municipalités situées sur le tracé de l’oléoduc Énergie Est est particulièrement important, compte tenu des implications à long terme d’une telle installation sur l’intégrité du territoire municipal, sur la qualité de vie de citoyens, sur l’aménagement du territoire et sur les coûts reliés aux services de sécurité spéciaux exigés.

Les municipalités locales et régionales ont en effet le mandat spécifique d’assurer la sécurité civile et  l’aménagement du territoire ainsi que les services de proximité et les services communautaires pour les citoyens qui les habitent.

Dans quelques municipalités concernées, les citoyens ont obtenu une prise de position claire de leurs élus contre le projet. Mais il est évident qu’une résolution municipale dans un grand nombre d’entre elles aura plus de poids si elle s’appuie sur le résultat d’une consultation rigoureuse de leurs citoyens.

En effet, dans l’état actuel des institutions politiques locales, souvent réduites à une sorte de tutelle des autorités gouvernementales, la légitimité démocratique des conseils municipaux et des conseils des maires de MRC est assez faible.

Dans un cas comme celui de l’oléoduc Énergie Est, qui met en cause des dizaines de municipalités du Québec et dont les conséquences sont considérables, les élus municipaux devraient avoir à cœur de légitimer leur position par une consultation formelle de leurs citoyens.

Et cette consultation, pour atteindre sa pleine légitimité, pourrait et devrait prendre la forme d’un référendum municipal, précédé d’une période d’information et de délibération permettant à tous d’évaluer le POUR et le CONTRE d’un tel projet, tant au point de vue social et économique qu’environnemental.

Trois lois encadrent les pouvoirs municipaux locaux et régionaux : le Code municipal du Québec, la Loi des Cités et Villes et la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités. Les dispositions qui concernent la tenue de référendums municipaux sont inscrites au titre II, articles 514 à 579, de la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités. Il existe deux types de référendums : Le référendum obligatoire et le référendum consultatif.

On pourrait tenter d’exiger un référendum obligatoire en assimilant la décision sur le passage de l’oléoduc à celle d’un emprunt municipal, compte tenu des dépenses et des risques à court et à long terme que peut constituer un tel projet pour la municipalité. Le débat mérite sans doute d’être entrepris, mais il risque d’impliquer une longue saga juridique.

À court terme, et pour les besoins de la cause pendante de l’oléoduc, il m’apparaît plus sage de conseiller aux citoyens de chaque municipalité située sur le tracé de l’oléoduc Énergie Est de demander à leur conseil municipal la tenue d’un référendum consultatif, en collaboration avec le Mouvement Coule pas chez nous et d’autres partenaires éventuels disposés à partager avec le conseil municipal le travail d’information et de financement de l’exercice.

De toute façon, la position de la municipalité n’a elle-même qu’une valeur consultative au niveau de l’ONE qui accorde les autorisations : elle ne serait donc pas davantage contraignante si elle faisait l’objet d’un référendum obligatoire.

Un référendum consultatif, cependant, pour qu’il ait toute sa force démocratique, doit être accompagné d’une période d’information et de délibération qui permette à tous d’exposer et d’évaluer les effets sociaux, économiques et environnementaux du projet.

Il doit également respecter le cadre défini dans la Loi sur les élections et les référendums municipaux, donc, se dérouler sous l’égide du conseil municipal, ce qui lui confère une légitimité plus grande que s’il était organisé uniquement par les citoyens, en marge du conseil municipal.

Tout en fournissant des outils et des suggestions, les promoteurs de l’opération « référendums municipaux » doivent, selon moi, laisser une large marge de manœuvre et d’initiative aux citoyens locaux qui connaissent leur milieu et les personnes engagées. Chaque communauté devrait prendre l’opération en charge : c’est aussi une façon pour elle de se responsabiliser.