L’idéologie a pris le pas sur les vraies affaires

Les travailleurs feront les frais d’une compression de 300 millions $

La semaine dernière, le ministre des Affaires municipales Pierre Moreau annonçait, en grande pompe, un nouveau pacte fiscal avec les municipalités du Québec. D’un côté, le gouvernement Couillard, avec son sacro-saint objectif d’atteinte du déficit zéro, refile aux municipalités des compressions de 300 millions $.

De leur côté, les municipalités, avec les maires Labeaume et Coderre en tête, demandaient d’être reconnues comme gouvernement de proximité et réclamaient certains pouvoirs, dont celui de lock-out.

À la surprise générale, nous avons appris que le ministre Moreau a offert sur un plateau d’argent aux maires la possibilité d’imposer les conditions de travail à leurs salariés. Les maires demandaient le droit de lock-out, le ministre Moreau leur donne le droit de décréter les conditions de travail.

C’est comme si le ministre du Travail modifiait le Code du travail de façon à donner aux syndicats le pouvoir de décider des conditions de travail de leurs membres et que les employeurs n’auraient d’autres choix que de s’y conformer !

Vous allez me dire que ce serait absolument indécent et contre toutes les règles de négociations de bonne foi. C’est pourtant ce que le gouvernement Couillard s’apprête à servir aux travailleurs et travailleuses des municipalités du Québec.  Au final, ils feront les frais des compressions de 300 millions $ exigées par le gouvernement Couillard.

Nous constatons la même façon de procéder avec les travailleurs et travailleuses de l’État québécois.  Mme Régine Laurent, la présidente de la FIQ, a quitté la table de négociation parce que le gouvernement refuse de discuter de l’organisation du travail des infirmiers et infirmières et se borne à demander des coupures dans leurs conditions de travail.

Selon Mme Laurent, le gouvernement veut, entre autres, couper les primes.  Autrement dit, supprimer les primes de quart pour ceux et celles qui travaillent de soir ou de nuit.  Supprimer la prime dont bénéficient les infirmiers et les infirmières qui travaillent à l’urgence. Une prime reliée au fait qu’ils sont en première ligne et ne savent jamais à quel danger ils sont exposés lorsqu’une personne se présente à l’urgence.  Nous n’avons qu’à penser au risque de contamination auquel ils sont constamment confrontés, tant que le premier diagnostic n’est pas posé.

La Protectrice du citoyen nous a annoncé ce que tout le monde savait, même si les ministres libéraux tentent de nous faire croire le contraire : les coupures tous azimuts  du gouvernement Couillard affectent les services aux citoyens.

Autre exemple de l’intérêt que porte le gouvernement Couillard aux employés de l’État et aux citoyens, il tient une consultation sur l’éducation, mais sans y inviter les enseignants et les parents !

Donner le pouvoir aux municipalités de décréter les conditions de travail de leurs salariés, vouloir imposer aux infirmiers et infirmières des coupures au lieu de discuter avec eux de l’organisation du travail,  tenter de nous faire croire que l’obsession du déficit zéro n’affecte en rien la qualité des services aux citoyens, et tenir des consultations bidons sur l’éducation sans la présence des parents et des enseignants, démontrent tout le mépris de ce gouvernement envers les services publics et les citoyens et citoyennes.

Nous avons là l’exemple parfait d’un gouvernement au service d’une idéologie plutôt qu’au service des citoyens et des citoyennes, qu’il est censé représenter.

Actuellement, les différents syndicats du secteur public sonnent l’alarme ! Les services publics sont en péril, il y a une limite à ce qu’ils peuvent faire seuls pour les maintenir.

De son côté, le gouvernement tente de nous réduire au rang de simples contribuables.  Oui, nous sommes des payeurs de taxes, mais nous sommes surtout les bénéficiaires de ces services.

Nous avons collectivement fait le choix de nous donner des services que nous voulons de bonne qualité, accessibles et gratuits à l’utilisation.  Les personnes qui nous les dispensent méritent des conditions de travail respectables qu’elles peuvent négocier de bonne foi.

À voir le déroulement actuel des négociations du secteur public et le mépris affiché par le gouvernement envers ses salariés et nos services publics me rappelle une blague de ma conjointe infirmière au sujet des médecins spécialistes : « Savez-vous la différence entre un médecin spécialiste et Dieu ? Dieu ne se prend pas pour un médecin ! »

Malheureusement, il semble que le Premier ministre Couillard, qui est médecin spécialiste, se croit tout puissant et au fait de tout ce qui est bon pour nous.

Monsieur Couillard, ce que nous voulons, ce sont des services publics de bonne qualité, accessibles et gratuits à l’utilisation. Les travailleurs et les travailleuses qui nous les procurent ont droit à des conditions de travail respectables et négociées de bonne foi.

Certes, les finances publiques doivent être gérées de façon responsable. Il faut éviter les gaspillages. Mais il faut également s’assurer que tous paient leur juste part d’impôts, y compris les entreprises.

* L’auteur est directeur adjoint d’Unifor