La destruction tranquille et systématique des CPE

Le PLQ s’attaque au cœur du modèle québécois

2016/04/06

Le Grand Livre de l’Histoire du Québec retiendra de l’année 1997 la création des Centres de la petite enfance (CPE). Les CPE ont créé une véritable révolution en démocratisant l’accès aux services de garde et en augmentant la qualité du développement des jeunes enfants.

En plus, le réseau a été payant pour l’État québécois. En 2008, chaque tranche de subvention de 100 $ de Québec lui a procuré un retour fiscal de 104 $, selon l’étude de Fortin–Godbout–St-Cerny.

Vous en connaissez beaucoup d’entreprises au Québec, qui ont incité près de 70 000 femmes à occuper un emploi, qui ont fait augmenter le PIB de 5 milliards $ et le taux d’emploi de 1,7 % ? C’est pourtant ce que le programme des CPE a réalisé.

Malgré ses succès incontestables, le PLQ s’entête à détruire, année après année, le dernier né du modèle québécois.  

Attaques du PLQ au cœur du modèle québécois

2003. Retour du PLQ au gouvernement avec la promesse de Jean Charest de ne pas hausser les tarifs des CPE. Quelques mois plus tard, promesse brisée, le tarif de 5 $ par jour augmente de 40 %.

2006 à 2014 : Coupes de 261 millions $ dans le budget des CPE, selon les calculs de l’Association québécoise des CPE (AQCPE).

2008 : Attribution de 18 000 nouvelles places en CPE par la ministre Michelle Courchesne.

2011 :  Le Vérificateur général du Québec de l’époque, Renaud Lachance, blâme sévèrement la ministre Courchesne pour les places attribuées en 2008 : 21 % des projets qu’elle a retenus vont à l’encontre des recommandations des fonctionnaires. Plusieurs étaient associés à des donateurs libéraux.

Au lieu d’octroyer des places en CPE à des spécialistes de la petite enfance, la ministre en donne aux propriétaires d’un abattoir. Il ­
s’agit de donateurs libéraux. Coïncidence ?

À l’époque, le Parti Québécois calcule que 42 donateurs du PLQ seraient liés à 25 projets de CPE : Ils auraient versé 292 480 $ à la caisse du PLQ entre 2003 et 2008.

L’ex-député Tony Tomassi est également associé au scandale des CPE, lui qui était le seul député à avoir six propriétaires de garderies privées sur son exécutif de comté. Coïncidence !

2012 : Démission de Tony Tomassi pour avoir utilisé illégalement une carte de crédit d’une entreprise privée dans un autre dossier, celui de « l’affaire BCIA ». Michelle Courchesne ne se représente pas aux élections générales.

2014 : Retour du PLQ au gouvernement avec la promesse de Philippe Couillard de ne pas augmenter les tarifs en CPE d’un pourcentage supérieur à celui de l’inflation. L’histoire se répète, le gouvernement de Pinocchio Couilllard rompt sa promesse et il fait augmenter les tarifs de façon draconienne... allant jusqu’à 20 $ pour certains parents !

2015 : Coupes de 3 % du budget des CPE, selon Louis Sénécal, p.d.g. de l’AQCPE. Cette coupe n’a jamais été annoncée, lors de la campagne électorale de 2014.

2016. Le nouveau ministre de la Famille, Sébastien Proulx, confirme son intention de couper 120 millions $ supplémentaires dans les CPE. Louis Sénécal estime que cela représente 12 % du budget annuel d’un CPE, soit : l’équivalent de 2 ou 3 postes d’éducatrices, des heures à la cuisine et 20 % des dépenses d’entretien ménager.

Février 2016. Plusieurs parents réalisent que la nouvelle taxe-famille libérale va leur coûter cher. La ligne 434 est ajoutée à la déclaration d’impôt : « Contribution additionnelle pour service de garde éducatif à l’enfance subventionné ». De nombreux parents devront payer des centaines, et même des milliers de dollars en plus, voire plusieurs milliers selon mon collègue Nicolas Marceau.

La montée du privé

En plus d’attaquer directement le pilier de la petite enfance du modèle québécois, le gouvernement du PLQ travaille activement afin d’augmenter la part du privé. Avec la nouvelle tarification globale des services de garde au Québec, un nombre de plus en plus élevé de parents trouvent plus avantageux financièrement d’envoyer leurs enfants dans une garderie privée. Ils bénéficient des versements anticipés du crédit d’impôt pour frais de garde d’enfants.

Les CPE, comme les garderies en milieu familial, subissent ainsi une autre baisse de revenu avec le départ d’enfants vers le privé. Le gouvernement Couillard ne semble pas y voir de problème, l’ancienne ministre de la Famille, Francine Charbonneau, allant même jusqu’à affirmer qu’il n’y a pas de différence de qualité entre un CPE et une garderie commerciale.

Le plan du PLQ est clair : affaiblir l’État québécois afin qu’il en vienne à reléguer le Québec au rang d’une province canadienne comme les autres. La CAQ joue malheureusement dans le même film avec son dénigrement systématique de l’État québécois.  

L’État québécois, c’est notre force, c’est ce qui fait notre différence en Amérique, avec notre langue. L’affaiblir, c’est couper les jambes du seul État francophone en Amérique du Nord.

C’est détruire le principal outil que nous allons utiliser pour faire du Québec un pays indépendant.

* L’auteure est députée du Parti Québécois.