Il faut rompre avec le corporatisme syndical

2007/06/12 | Par L’aut’journal 

« Le temps est venu de repenser notre action syndicale pour contrer le néolibéralisme ! » C’est par ces mots que le président Mario Beauchemin a inauguré le 18e congrès de la Fédération des enseignantes et des enseignants de Cégeps, affiliée à la CSQ.

« Dans le contexte actuel de néolibéralisme et de remise en question du rôle de l'État dans la société québécoise, le moment est venu pour le mouvement syndical de repenser ses stratégies et de redéfinir ses actions afin de se doter d'un projet audacieux et mobilisateur pour les prochaines années », a poursuivi le président de la Fédération qui regroupe quelques 1 500 enseignantes et enseignants.


Cette réflexion qui est devenue essentielle dans le contexte où les deux tiers des sièges à l'Assemblée nationale sont occupés par des députés libéraux et adéquistes favorables à une réduction de l'appareil de l'État et à une certaine forme de privatisation des services publics.

Un vent inquiétant qui souffle sur le Québec

 Le président de la FEC soutient qu'un vent inquiétant souffle sur le Québec qui doit interpeller les organisations syndicales.

« En même temps que certains apôtres de la restructuration de l'État-providence tentent de nous convaincre de la nécessité de revoir le modèle québécois, on voit se multiplier les emplois précaires et atypiques obligeant de plus en plus de gens à vivre dans l'insécurité et dans des conditions frisant le seuil de pauvreté. Est-ce vraiment par cette forme de société que nous voulons remplacer le modèle de l'État-providence ? », demande M. Mario Beauchemin.

L'intention réelle derrière les attaques contre le mouvement syndical

D'autre part, le président de la FEC se dit convaincu que le mouvement syndical doit se préparer à être le sujet d'attaques de plus en plus nombreuses.

« Longtemps perçue comme un acteur social qui contribuait à faire progresser notre société, l'image du mouvement syndical a pâli au cours des dernières années. Les syndicats ont souffert des préjugés entretenus à leur endroit par certains groupes de pression de droite qui les accusent d'empêcher le Québec d'avancer. Ces gens savent très bien que s'ils veulent mettre la main sur des pans importants des services publics au Québec, pour pouvoir brasser des affaires et non pas servir les citoyens, ils doivent discréditer les syndicats qui constituent le dernier rempart pour protéger la justice sociale », affirme M. Beauchemin.

Avoir l'audace d'élargir le discours syndical

Dans ce contexte, le président de la FEC croit que les organisations syndicales doivent avoir le courage et l'audace de repenser leur action pour reprendre contact avec les individus et les groupes qui ne se reconnaissent plus dans l'approche traditionnelle de revendications.

« Je pense que nous devons passer du syndicalisme d'opposition au syndicalisme de proposition. Si nous voulons briser l'image des syndicats qui bloquent tout, nous devons mettre de l'avant notre vision de ce que devrait être la société et nous battre pour améliorer les conditions de vie de nos membres, mais également de l'ensemble de nos concitoyennes et de nos concitoyens. Nous devons également dépasser la sphère habituelle des revendications économiques pour aborder des enjeux plus globaux tels que le racisme, la protection de l'environnement, le développement communautaire, la conciliation famille-travail, la lutte à la pauvreté et la réduction du temps de travail », soutient M. Beauchemin.

Forcer le gouvernement à augmenter le salaire minimum

 Le président de la FEC va jusqu'à proposer de remettre en question les demandes traditionnelles en termes d'augmentations salariales lors de la prochaine négociation touchant les enseignantes et les enseignants de cégeps.

« En agissant ainsi, nous serions beaucoup plus crédibles et légitimes pour nous battre afin d'améliorer les conditions de travail des enseignantes et des enseignants à statut précaire, pour réclamer la mise en place d'une véritable politique de conciliation famille-travail, pour exiger une réduction du nombre d'élèves par classe, pour demander un financement adéquat pour aider les collèges et les programmes en difficulté et, pourquoi pas, pour forcer le gouvernement à augmenter le salaire minimum », exprime le dirigeant syndical.

Rompre avec le corporatisme syndical

Le président de la FEC est d'avis qu'aussi audacieuse que puisse être une telle proposition, elle serait certainement un premier pas concret pour permettre aux organisations syndicales de regagner une plus grande sympathie au sein de la population et imposer à nouveau leur agenda au gouvernement qui serait forcé, par le fait même, de négocier sur le terrain de la justice sociale plutôt que celui du corporatisme syndical.