Cette fois, c’est le Bloc !

2008/09/23 | Par François Cyr

La candidate conservatrice dans ma circonscription électorale est membre de l’Opus Dei. Intégriste parmi les intégristes, ce courant d’extrême-droite au sein de l’Église a connu son âge d’or sous le franquisme en Espagne pour essaimer discrètement partout dans le monde où le désarroi Photoet le recul des forces progressistes leur permettent de prendre pied.

Leurs valeurs se situent à l’opposé des nôtres. Ils s’intéressent au salut des âmes des élites, leur base sociale de prédilection. Nous prenons fait et cause pour la multitude.

Nous parlons d’égalité et de justice. Leur œuvre divine sanctifie l’exploitation, la haine des autres et l’oppression. Haine des droits des femmes surtout : principe fondateur de tous les intégrismes. Dans la foulée d’une percée adéquiste lors des dernières élections provinciales au Québec, les conservateurs espèrent quelques victoires dans notre région, la Montérégie, et ce, aux détriments des élus-es du Bloc.

Elle s’affiche, nous expliquant que sous la gouverne de son parti, le Québec reprenait des forces. Comme un convalescent qui récupère. On est tenté de travestir un brin le message : malade des conservateurs, le Québec, pétant de santé, s’apprête à faire œuvre de salubrité public en se débarrassant de Harper. Malheureusement, ce n’est pas tout à fait ce qui s’annonce... Les intentions de votes pour le Bloc piétinent et pourtant c’est le parti qui est le mieux placé, dans la plupart des 75 circonscriptions, pour faire œuvre utile.

Cette fois, je ne peux voter pour le NPD même si la justesse de sa position sur le retrait des militaires canadiens en Afghanistan tranche courageusement avec les atermoiements du Bloc sur la question.

Pendant que s’étiolent ses racines syndicales et qu’il campe au centre de la gauche, le NPD apparaît comme le plus nationaliste des partis canadiens, comme en témoigne d’ailleurs le fait que son chef n’a pu contrer, malgré ses promesses, l’appui de son aile parlementaire à la loi sur la Clarté.

Par ailleurs, le porte-parole québécois de ce parti siégeait il y a peu dans le gouvernement Charest, après une carrière d’avocat où il s’est notamment illustré par sa contribution à la lutte contre la loi 101 au service d’Alliance Québec. Certains de nos amis politiques, par ailleurs indépendantistes, voteront NPD en oubliant que par essence le nationalisme canadien, son principal substrat idéologique, s’est en partie forgé contre les revendications historiques du Québec.

Ce substrat idéologique (chartisme et multicuturalisme) qu’il emprunte largement au PLC, son projet politique centralisateur, sa pratique politique plus près du centre que de la gauche dans les quatre provinces où il a assumé les responsabilités du pouvoir, nous invite à tourner le dos à ce parti même si ce vote est légitime, bien que tactiquement fort discutable dans la plupart des cas. Sans parler que certaines candidatures sont plus que problématiques.

Je préfère mille fois des candidats issus du mouvement social, tels Luc Desnoyers des T.C.A. ou Vivian Barbot de la FFQ, que des libéraux de fraîche date tels M. Mulcair ou Mme Boivin, la nouvelle étoile montante du NPD, récemment convertis au social-libéralisme canadien.

Bien sûr, il y a quelques candidats NPD exceptionnels, que nous pourrions appuyer dans les forteresses libérales, là ou le Bloc n’a aucune chance, par exemple.

Cependant, dans la vraie vie, il est clair que c’est l’équipe de M. Mulcair qui contrôle cette campagne et plusieurs de nos amis qui travaillent fort pour le NPD regretteront sous peu que M. Mulclair soit rapidement devenu la principale figure de ce parti au Québec.

De son côté, le Bloc, au fil des ans, s’est éloigné de ses racines partiellement conservatrices, celles de Lucien Bouchard, pour prendre des positions assez progressistes sauf sur l’intervention en Afghanistan.

Dans les dossiers de l’assurance-emploi, celui de la lutte à la corruption commanditée, sans oublier les dispositifs antiscabs et le respect du français pour les salariés sous juridiction fédérale, leurs positions rejoignent notamment celles des syndicats québécois qui l’appuient souvent de façon ouverte.

Au grand dam de ses anciens députés de droite qui l’attaquent avec une rare virulence (et une grande complaisance des médias) nul ne peut contester que le Bloc, parti de coalition, est maintenant fortement influencé par son aile progressiste.

Il ne faut pas se tromper au Québec. Tant du côté des médias contrôlés par Gesca que des forces sociales les plus conservatrices, le Bloc Québécois est devenu le parti à abattre puisqu’il apparaît dans l’actuelle conjoncture comme étant la seule force capable de freiner cette montée de la droite, tant néolibérale que néoconservatrice.

Le parti conservateur mène une campagne agressive questionnant la légitimité même du Bloc. L’enjeu est de taille : il leur faut réduire la seule force, dans la plupart des circonscriptions, à même de repousser l’hypothèse, très réelle, d’un gouvernement conservateur majoritaire.

Je vais donc voter en faveur de la candidate du Bloc Québécois dans ma circonscription, Mme Carolle Lavallé. Elle a été notamment l’instigatrice d’un projet de loi privé à la Chambre des communes visant à interdire les briseurs de grève pendant un conflit de travail. Les choses étant ce qu’elles sont, ça me suffit...