Aleris, une corporation voyou

2008/09/25 | Par Marc Laviolette

Les 350 travailleurs et travailleuses du laminoir d’aluminium d’Aleris au Cap-de-la-Madeleine mènent un combat exemplaire contre la stratégie « choc » de leur employeur américain.

Aleris, une compagnie américaine formée en 2004 et dont le siège social est à Beachwood en Ohio mène une opération de rationalisation et de restructuration de ses 40 installations à travers le monde (elle emploie 8 800 personnes). Depuis le début de l’année, elle a fermée quatre usines en Amérique du Nord dont une à Toronto.

Refus de concessions de 5,2 millions

Le 12 juillet, les travailleurs et travailleuses du laminoir du Cap-de-la-Madeleine, en lock-out depuis le 2 juillet pour avoir refusé la demande de concession de l’ordre de 5,2 millions de leur employeur, passaient eux aussi à la trappe de cet employeur sans scrupule.

En novembre 2007, après avoir refusé de prolonger leur convention collective d’un an pour « aider » leur employeur à transférer une partie importante de la production, le syndicat entamait les négociations pour le renouvellement de leur convention collective qui se terminait le 1er février 2008.

L’enjeu pour le syndicat était d’obtenir des garanties pour l’avenir de l’usine. Le syndicat proposait une récupération de 2,3 millions à l’employeur. Le 2 juillet, Aleris mettait ses salariés en lock-out et exigeait toujours 5,2 millions de concessions, sinon, c’était la fermeture. Le 9 juillet, l’assemblée générale refusait et, le 12 juillet, Aleris annonçait la fermeture définitive de l’usine.

Depuis cette annonce, Aleris refuse de se conformer à la Loi des normes du travail sur les préavis de licenciement collectif et refuse d’émettre à l’assurance-emploi les certificats de cessation d’emploi pour que les travailleurs et travailleuses aient accès à leurs prestations.

Dans le « flou »

Cette stratégie « choc » d’Aleris a pour but de placer les travailleurs et travailleuses dans le flou. Sommes-nous en conflit de travail ? Sommes-nous en chômage ? Sommes-nous en mise à pied collective ? Pouvons-nous relancer l’usine ?

« Des compagnies comme ça on en veut pas. Ils devraient être sur une liste noire. Ils ne respectent pas les lois, les travailleurs et leurs famille », confiait Daniel Goyette, président du syndicat Métallurgie – CSN.

« Le gouvernement du Québec, explique-t-il, détenait par le biais de la SGF, 40 % de la société en commandite qui était propriétaire de l’usine avec Corus (l’ancien propriétaire). Sous Aleris, la SGF est encore inscrite dans la structure juridique de l’entreprise. La SGF a perdu 31,7 millions dans cette affaire ».

Dans le fond, c’est le modèle québécois des relations de travail et les outils économiques du Québec qui sont bafoués par Aleris.

« Aleris n’a aucun reconnaissance des contributions syndicales à la productivité de cette usine. Ça fait trois propriétaires que les salariés connaissent : Reynold’s, Corus et Aleris et les objectifs de production ont été souvent dépassés grâce aux travailleurs.

« Aleris ferme en sauvage et devra nous indiquer s’ils veulent vendre l’entreprise. Nous pensons qu’il y a une relance possible et nous avons rencontré la ministre Boulet du gouvernement du Québec », confiait le président de la fédération de la Métallurgie, Alain Lampron.

Depuis l’annonce de fermeture, le syndicat ne s’est pas laissé déstabiliser et a organisé différentes manifestations pour revendiquer avec succès le respect des droits et des lois québécoises et canadiennes. La Commission des normes du travail a conclu qu’il s’agissait d’un cas de licenciement collectif et que l’employeur devait verser aux salariés 5,6 millions de dollars. La commission de l’assurance-emploi en est arrivée à la même conclusion et a fait droit aux demandes de prestation des travailleurs et travailleuses.

« Nous transformons l’aluminium dans une usine de haut niveau, en grande partie rénovée au cours des années 1995 à 2003. Nous occupions 55 % du marché dans notre créneau d’échangeurs de chaleur du marché nord-américain de l’automobile. Nous pensons qu’il y a toujours de la place pour un produit à forte valeur ajoutée dans un marché, malgré tout, en développement. Nous sommes prêts à reprendre la négociation de nos conditions de travail, et ce, dès qu’un éventuel acheteur se montrera intéressé. Nous sommes également disposés à une participation financière pour une relance. », confiait le président du syndicat Daniel Goyette à l’aut’journal.

« Pour les travailleurs et travailleuses de l’usine du Cap-de-la-Madeleine, le combat se poursuit car la transformation secondaire de l’aluminium. C’est stratégique pour le Québec », concluait Alain Lampron, président de la fédération de la Métallurgie – CSN.