Des terroristes au Congrès US

2009/06/05 | Par Jean-Guy Allard

L’auteur est journaliste à l’agence de presse Granma

Au moins une douzaine des pourvoyeurs de fonds du lobby le plus actif de Washington en ce qui a trait à l’opposition à une normalisation  des relations avec Cuba ont participé ou ont été liés à des activités terroristes et paramilitaires de  la mafia cubano-américaine de Miami.

Une analyse des listes de donateurs du Comité d’action Politique (PAC)  « Démocratie USA-Cuba », connu à Washington pour son activité de lobbying et grand bailleur de fonds aux campagnes des congressistes des deux partis, révèle que plusieurs d’entre eux ont collaboré à des activités qui, dans tout autre pays du monde, seraient qualifiées de terroristes et réprimées par les tribunaux.

Feliciano Foyo, Horacio García et Alberto Hernández, trois ex directeurs de la Fondation nationale cubano-américaine (FNCA) que le terroriste notoire d’origine cubaine Luis Posada Carriles a désigné publiquement  comme étant les principaux « financiers » de ses activités criminelles, apparaissent dans  la liste de donateurs du PAC anti-cubain, publié par la Commission Fédérale des Électeurs (FEC) sur son site web.

La FEC est une entité fédérale chargée d’administrer et appliquer la loi sur le financement de campagnes et sur la cueillette de fonds réalisée par les candidats à la Chambre des représentants, le Sénat, la présidence et la vice-présidence des États-Unis.

 

LE « DOCTEUR » HERNANDEZ,  MÉDECIN ET PROMOTEUR DE LA TERREUR

La seule trajectoire terroriste du médecin Alberto Hernández Sarduy pourrait couvrir plusieurs pages. Collaborateur assidu de la CIA, Hernández a réuni, en compagnie du fondateur de la FNCA, Jorge Más Canosa, et d’autres têtes dirigeantes de la mafia terroriste de Miami, les 200.000 dollars pour soudoyer les trois juges vénézuéliens qui ont « révisé » le dossier de Orlando Bosch, malgré l’étendue de ses crimes sur le territoire même des États-Unis.

 Il a aussi participé activement à l’évasion de Posada Carriles.de sa prison du Venezuela pour sa réintégration à des opérations de la CIA.

Comme vice-président de la FNCA, Hernández a été le premier responsable de l’organisation en Amérique centrale d’une infrastructure terroriste gérée par Posada, qui souligne ses « mérites » dans son livre Los caminos del guerrero.

En mai 2007, José Antonio Llama, alias « Toñín », ex directeur de la FNCA, a révélé comment, avec les autres membres de la hiérarchie de cette organisation, il a créé un groupe paramilitaire pour mener des actions de déstabilisation à Cuba et éliminer le président Fidel Castro.

Parmi les nombreux membres du groupe, Llama a identifié Foyo et García, ainsi que Elpidio Núñez Ojeda. D’autres sources ont désigné Diego R. Suárez, qui, tout comme les individus déjà cités, a quitté la Fondation en 2001 pour fonder le soi-disant Conseil pour la liberté de Cuba (CLC), où il occupe un poste de direction.

Núñez est propriétaire de Northwestern Meat, qui fait le commerce de la viande à Miami, qu’il a fondé dans les années 60 grâce à des apports de la CIA.

Le comité paramilitaire de la FNCA s’est chargé en 1997 d’ordonner, financer et orienter la campagne terroriste qu’a alors menée Posada Carriles à Cuba, avec des mercenaires d’Amérique centrale, qui a causé la mort du jeune touriste italo-canadien Fabio Di Celmo.

Le 11 août 1997, Núñez, Suárez, García, Foyo et Hernández ont souscrit avec leurs complices à la Déclaration de la Fondation en appui à cette série d’attentats.

Ils y affirmaient froidement que touts les moyens, aussi violents qu’ils soient, sont admissibles pour un changement de gouvernement à Cuba. Le document était aussi signé par Orlando Bosch, le capo terroriste de Miami.

Núñez et Suárez sont aujourd’hui deux des principaux chefs du CLC. Ils ont contribué tous deux plusieurs fois au PAC anti-cubain qui mène au Congrès de violentes campagnes d’attaques contre l’Île.

Felipe Valls, connu dans les années 70 pour ses activités de narco, a aussi participé au Comité paramilitaire de la FNCA. Valls se trouve aujourd’hui sur cette liste de donateurs de PAC mal nommé.

 

TOUS PARTISANS AVOUÉS DE L’USAGE DE LA TERREUR

Parmi les membres les plus influents du Conseil des directeurs de ce lobby se trouvent les entrepreneurs Remedios « Reme » Díaz-Oliver et Ricardo Mayo Álvarez, deux autres directeurs du CLC.

Díaz-Oliver est célèbre pour avoir extorqué le fisc fédéral de plusieurs millions. Ses contacts politiques au plus haut niveau l’ont sauvée à la dernière minute d’un long séjour en prison.

Quant à Mayo, il est président de Doral Pharmamedics, fermement connectée aux largesses de Medicaid.

Les deux sont des partisans avoués de l’usage de la terreur contre Cuba.

Le Comité d’action politique  Démocratie USA-Cuba est né officiellement le 22 décembre 2003, au cours d’un banquet  à l’hôtel Biltmore de Miami, avec la participation de Mel Martínez, du frérot Jeb Bush, alors gouverneur de la Floride, d’Adolfo Franco, vice-administrateur pour l’Amérique Latine et les Caraïbes de l’Agence pour le développement international des USA (USAID); et  les congressistes républicains d’ascendance batistienne  Ileana Ros-Lehtinen, Lincoln Díaz-Balart et Mario Díaz-Balart.

Le porte-parole et principal lobbyiste du PAC à Washington est l’ex-avocat du Département du trésor Mauricio Claver-Carone. Cet étasunien d’origine cubaine  dirige simultanément  l’organisation Défenseurs de la Démocratie à Cuba  (Cuba Democracy Advocates Inc.), créé en 2004 par le concessionnaire Ford de Hialeah Gus Machado et l’ex Roi de la Pizza de Madrid Leopoldo Fernández Pujals  Machado est le trésorier inscrit du PAC depuis sa création.

 

MADAME SIXTO A CONTRIBUÉ JUSTE À TEMPS

Bien que  fortement lié au CLC, le PAC accueille d’autres éléments de la faune mafieuse de Miami, entre autres des directeurs d’organisations de façade de la CIA liés à la USAID.

Tel est le cas de Sylvia Iriondo, de M.A.R. por Cuba, et Frank Calzón, du Center for a Free Cuba (CFC)

La Iriondo, qui perçoit depuis des années des subventions du Département d’État  par le biais de la USAID, collabore régulièrement, aux côtés du « Chino » Aquit, terroriste fiché, avec les renseignements nord-américains dans des opérations de propagande  qui le mènent en Europe  et garantissent sa prospérité.

Pour sa part, Calzón, un ex terroriste du groupe Abdala, a été impliqué dans un scandale de détournement de fonds en 2007, quand un audit a révélé que son bras droit, Felipe Sixto, avait empoché un demi-million de dollars payés au CFC par la USAID.

Incroyable mais vrai: les informations publiées par la FEC révèlent que l’épouse de Sixto, Laura, identifiée comme « maîtresse de maison » résidant au 9624 Brigadoon Place, Urbana, Maryland, a  contribué au PAC… juste une semaine avant que son mari, qui avait soudainement démissionné du CFC, soit nommé rien de moins que conseiller spécial de George W. Bush.

Sixto a été  condamné depuis à 30 mois de prison, 10.000 dollars d’amende et trois ans de liberté conditionnelle.

 

D’AUTRES ÉMINENTS DONNATEURS

Autre surprise que réservent la liste du FEC: madame  Jaime Suchlicki, vivant à Coconut Grove, épouse de Jaime Suchlicki, respectable directeur de l’Institut des études cubaines et cubano-américaines, a aussi contribué au fonds qui se consacre à financer l’hostilité contre Cuba.

Ex-analyste de la CIA, en 2002, Suchlicki s’est empoché un chèque de 1.045.000 dollars, premier versement d’une subvention de la USAID, remise par Adolfo Franco sous prétexte d’une étude sur la soi-disant transition à Cuba.

Le magnat cubano-américain du sucre Alfonso Fanjul, propriétaire de la Florida Crystals, de West Palm Beach, a aussi manifesté sa générosité envers le PAC. Les Fanjul appartiennent à une famille d’origine espagnole dont les intérêts ont été nationalisés à Cuba par la Révolution. Ils ont été dénoncés pour les méthodes esclavagistes de travail qu’ils appliquent aujourd’hui en exploitant des enfants haïtiens.

Sergio Pino, patron de Century Homebuilders de Miami, d’origine  cubaine, impliqué dans un scandale et une enquête fédérale pour corruption, a aussi donné des chèques à Gus Machado.

Parmi les donateurs du PAC, apparaissent aussi d’ex-membres de l’Administration fédérale et d’ex-fonctionnaires de haut rang du gouvernement des USA, tels que Roger Noriega, ex-sous-secrétaire d’État, du cabinet d’avocat Tew Cardenas, Otto Reich, également ex- sous-secrétaire d’État aux Affaires hémisphériques ainsi que Ana Carbonell, nostalgique du groupe terroriste La Rosa Blanca et bras droit du congressiste Lincoln Diaz-Balart.

Tous ont parrainé d’une façon ou d’une autre des actions violentes contre Cuba. Notamment Reich, qui a été ambassadeur à Caracas a appuyé la libération de Orlando Bosch et son éventuelle réintégration aux États-Unis comme il a aidé à l’obtention de la grâce de Luis Posada Carriles, à Panamá, en 2004.

Au début de l’année, des éléments terroristes de Miami, parmi lesquels Posada, ont tenu dans cette ville une assemblée qui a réuni des partisans de la terreur contre Cuba. L’évènement a été convoqué par Angel De Fana Serrano, qui a participé en 1997, dans l’île vénézuélienne de Margarita, à un complot  inspiré par Posada pour assassiner le président cubain Fidel Castro durant le Sommet ibéro-américain.

Angel De Fana est un autre nom que l’on trouve sur la liste de la FEC.

Depuis sa création, le PAC a encaissé plus d’un million de dollars qui ont été destinés à des contributions politiques à des centaines de candidats au Congrès.

Véritable bande de délinquants portés sur la terreur, le comité anti-cubain a contribué à former la politique nord-américain envers Cuba par des manœuvres de coulisses au Capitole, destinées à contrecarrer toute initiative vers une  normalisation des relations avec l’île, au mépris de la volonté exprimée par une vaste majorité de citoyens de ce pays et de la totalité des nations d’Amérique latine.•