Festival des films du monde

2009/08/30 | Par Ginette Leroux

Un jeune homme solitaire


Les premières images de Distanz, en français Distance, montre un jeune homme qui travaille comme jardinier au jardin botanique de Berlin. Dans sa vie privée, Daniel Bauer mène une vie de solitaire, réglée au quart de tour.

Peu enclin à socialiser, il se laisse toutefois séduire par Jana, une collègue qui occupe un poste dans les bureaux. Comme elle est aussi de nature solitaire, elle est attirée par la timidité du jeune homme. Son côté farouche l’intrigue.

Débute alors une relation amoureuse qui changera leur vie. Pourtant, lorsque Jana comprendra le besoin irrépressible de Daniel pour les actes de violence gratuits, il sera trop tard… pour les deux. L’issue de cette histoire est troublante.

Distanz est le premier long métrage de fiction de Thomas Sieben, né à Cologne en 1976. Après des études de cinéma et de photographie aux États-Unis, il revient en Allemagne où il travaille comme producteur, monteur et journaliste pigiste.

Le traitement quasi-documentaire du film de Sieben rend avec acuité la psychologie détraquée de Daniel Bauer (brillamment interprété par Ken Duken) tout focalisant l’action sur les deux personnages principaux.

Le contraste entre le jeune homme froid, dépourvu d’émotions, et la chaleur que lui apporte l’amour de Jana (excellente Franziska Weisz) fait espérer, tout au long du film, que cette relation lui redonnera un peu d’humanité et, de ce fait, renversera la situation. Ce qui laisse le spectateur pantois devant l’issue de l’histoire.



Bullying ou l'intimidation à l'école

Selon le site Wikepedia, le bullying est un terme qui, désigne « une violence à long terme, physique ou psychologique, perpétrée par un ou plusieurs agresseurs (bully) à l'encontre d'une victime (bullied) dans une relation de domination ». Ce terme, caractérisé par l'usage répété, non seulement de la violence physique, mais également des moqueries et autres humiliations, est avant tout utilisé pour décrire des comportements de harcèlement en milieu scolaire.

Le film Bullying de Josecho San Mateo raconte l’histoire de Jordi (rôle bien défendu par Albert Carbo), un adolescent de 15 ans, qui vit à Barcelone avec sa mère depuis la mort de son père. La mère endeuillée, grandement déprimée, survit à l’aide d’anti-dépresseurs et de rencontres suivies avec son psychologue. Inscrit à son nouveau lycée, le fils, d’un naturel doux et sans défense, voit sa vie entière tourner au cauchemar lorsqu’il est pris à partie par Nacho (magnifiquement joué par Joan Carles Suau), un camarade de classe de deux ans son aîné. Le harcèlement s’intensifie au fil des jours au point de devenir un enfer.

L’espoir surgit lorsque Jordi fait la connaissance d’Ania, une adolescente qui est victime, comme lui, d’intimidation dans son milieu scolaire. S’ensuit une relation amoureuse qui passera au drame lorsque la jeune fille sera sauvagement agressée par des élèves de son école. L’imprévisible réaction de Jordi en dira long sur ce problème social ignoré sinon encore mal géré par le système scolaire.

Tourné en langue catalane – dont le vocabulaire et la prononciation, s’apparente au français –, le film vaut la peine qu’on y prête l’oreille. Par exemple, vous serez surpris d’entendre le mot « d’accord », prononcé comme en français. Normal puisqu’on dit que le catalan et l’occitan, langue du sud de la France, sont des langues sœurs. Le choix du cinéaste catalan de livrer son film dans sa langue maternelle n’est pas étranger à un nouveau projet de loi voté en mars dernier à Barcelone qui veut que tous les films présentés en Catalogne à partir de 2011 devront être doublés en catalan.

Le film du cinéaste catalan se veut le miroir d’un problème aigu présent dans les pays de l’Union européenne où l’on compte plus de 39% d’élèves qui souffrent de harcèlement à l’école. Sans compter qu’en Espagne un élève sur 4 subit le même sort. Effarant. 

À voir.  

Bullying, Josecho San Mateo; Espagne; 97 mn; présenté les 3, 4, 5 septembre.



Jermal en Indonésie

Présenté en première nord-américaine dans la section Regard sur les cinémas du monde, Jermal, des cinéastes Ravi Bharwani et Rayya Makarim, raconte l’histoire de Jaya, orphelin de mère, qui vient rejoindre son père Johar, le responsable d’un jermal, une plate-forme de pêche construite sur pilotis située à environ 15km des côtes indonésiennes. Il est vite déçu. Le père rejette ce fils qu’il ne connaît pas puisqu’il s’est enfui au moment de la naissance de Jaya, refoulant dans sa mémoire son existence malgré les lettres nombreuses envoyées par la mère du petit.

Les premières images du film montre l’enfant assoupi dans une barque qui l’amène vers sa nouvelle vie, ayant pour seuls biens ses livres rangés dans son sac à dos et une boîte de carton contenant quelques vêtements. Arrivé à bord, Jaya doit faire sa place parmi les autres enfants, rudes et illettrés, qui se moquent de lui et de ses livres. Mais il apprendra vite. Son courage, sa détermination doublés d’une intelligence vive auront raison des mauvais traitements infligés par ses compagnons d’infortune, rendus cruels par l’éprouvante et l’insoutenable vie à bord. Sans compter que sa ténacité aura raison de la réticence de son père, un homme grossier, introverti aux accès de violence incontrôlable, à reconnaître sa paternité.

Sous les apparences d’une fable à la fin heureuse, le film de Ravi Bharwani et de Rayya Makarim dénonce, en filigrane, la situation des enfants esclaves, la plupart des orphelins qui n’ont plus personne pour s’inquiéter de leur sort, employés comme main d’œuvre bon marché à des tâches d’adultes bien au delà de leurs forces. Il faut saluer le jeu excellent et crédible des acteurs, jeunes comme adultes, réunis dans ce huis clos que constitue l’étroite plate-forme sur laquelle ils évoluent.

À voir.

Jermal, Ravi Bharwani et Rayya Makarim, co-production Indonésie, Pays-Bas, Allemagne, Suisse; 90 mn; présenté les 2, 3, 5 et 6 septembre.