Dérive « lucidoïde »

2009/12/19 | Par Pierre Beaulne

L’auteur est économiste à la CSQ. Il réagit à la publication du Fascicule 1 : Le Québec face à ses défis, élaboré par le Comité consultatif sur l'économie et les finances publiques.

Décevant. Dans son premier fascicule, le « comité indépendant d’économistes-conseils coprésidé par le ministre des Finances » s’est borné à ressasser les poncifs éculés propagés par le courant des lucides : les dépenses publiques du Québec sont nettement plus élevées qu’ailleurs, alors que la province est moins riche et plus endettée. Diagnostic sommaire sur le thème « vivre au-dessus de ses moyens ».

La suite ne risque guère de réserver des surprises, sinon dans le choix des expiations à infliger et la manière de ramener les brebis égarées dans le droit chemin de la frugalité budgétaire. En somme, une brique de plus dans l’édifice propagandiste d’un gouvernement qui clamait encore, à la veille des élections datant d’à peine un an, qu’il n’existait pas de problème de déficit budgétaire au Québec.

Dommage. Le comité aurait pu fournir un éclairage plus utile pour un débat public en tentant de démêler les différences des structures institutionnelles dans la production de biens et services, un peu comme cela se fait dans les études sur les parités de pouvoir d’achat.

Il y a une partie importante des dépenses publiques au Québec qui, ailleurs, sont assumées financièrement par les ménages. Les études de Statistique Canada sur les comparaisons Canada-États-Unis montrent que les biens et services, dont une fraction importante du financement est prise en charge collectivement, coûtent beaucoup moins cher au Canada : santé : -62 %; enseignement : -39 %; logement : -15,4 %. Qu’en est-il du Québec, où le financement collectif est plus étendu qu’ailleurs ? [1]

Regrettable. Par ailleurs, l’étude indique que les principaux écarts Québec-Ontario au chapitre des dépenses publiques se retrouvent dans les domaines du soutien de la famille et le secteur des transports et non dans les services de santé et d’éducation. De telles observations auraient pu soutenir une réflexion sur la fonction redistributive de l’État, qui est malheureusement complètement évacuée.