Le « marché » des télécommunications

2010/01/21 | Par Léo-Paul Lauzon

Commençons par une drôle : «Les entreprises de télécommunications se dotent d’un bureau des plaintes» autorégulé s’il vous plaît que signalait Le Devoir du 24 juillet 2007. De la frime puisqu’en 2009 on a appris par les journaux : «Bell condamnée pour harcèlement téléphonique» et «Garantie prolongée : Options consommateurs dénoncent la manière forte qu’emploie Bell lors de la vente d’un cellulaire».

Rions encore de cette nouvelle parue dans La Presse du 2 septembre 2009 : «Nouveau code de conduite dans l’industrie du sans-fil». Nouveau code de conduite maison, s’entend! Viendra bien un jour une charte de responsabilité sociale et le financement par ces compagnies d’une Chaire universitaire dirigée par des professeurs «agrégés» et «émérites». Là les choses vont changer. Peut-être que oui, peut-être que non!

Alors que Bell et Telus détenaient déjà plus de 90% du marché de la téléphonie locale, le gouvernement conservateur en a rajouté et, s’en remettant à la religion des «forces vives» du marché, il a déréglementé la téléphonie locale : «Carte Blanche aux anciens monopoles. Bell et Telus pourraient modifier les tarifs de téléphonie locale à leur guise» dans Le Devoir du 4 août 2007.

Puis, Le Journal de Montréal du 22 août 2008 annonce que les compagnies traditionnelles pourront désormais augmenter leurs tarifs selon leur vouloir dans les zones rurales et éloignées sans l’accord du CRTC. On dit bien «augmenter». Pas «diminuer».

En effet, les dirigeants de Bell et Telus ont uniquement parlé de nouveaux gadgets offerts et non de baisses de prix. Pourtant, les conservateurs nous avaient promis d’alléchantes réductions de tarifs avec l’arrivée des nouveaux concurrents Rogers et Vidéotron. Qu’advient-il des bienfaits de la concurrence issue des forces du marché?

Et le CRTC qui se ridiculise encore une fois en affirmant (Journal de Montréal, 27 juillet 2007) que : «Téléphonie résidentielle : la concurrence est saine». Je vous le dis, les commissaires du CRTC vont éventuellement devenir lobbyistes de l’industrie des communications comme cela s’est souvent produit dans d’autres secteurs et dans un passé récent.

Oups, dans La Presse du 26 juillet 2007 : «Déréglementation de la téléphonie locale. Pas de guerre de prix à l’horizon». En bons pacifistes qu’ils sont, ils vont plutôt collaborer à mieux vous filouter. Pourtant, dans Le Devoir du 12 septembre 2007, l’ineffable conservateur de la Beauce, Maxime Bernier, avait dit : «La concurrence permettra à la population de disposer de services moins chers et plus variés». Maxime, Julie te cherche!

Puis, dans Le Devoir du 21 octobre 2009 : «iphone : de nouveaux fournisseurs mais pas de guerre de prix». Encore une fois, la coopération entre compétiteurs a bien meilleur goût.

Signe de la vigueur concurrentielle effrénée entre Bell et Telus, elles avaient décidé ensemble et unilatéralement de facturer à leurs clients 15 cents pour chaque message reçu en plus de ceux envoyés (Journal de Montréal, 9 juillet 2008). Et le ministre conservateur Jim Prentice qui «réclame des explications de Bell et Telus» dans Le Devoir du 10 juillet 2008.

De la poudre aux yeux. L’an passé, les conservateurs ont aussi demandé des explications aux détaillants, aux banques et aux pétrolières. Elles ont répliqué en augmentant les prix, pardon… leurs structures de prix. Et, «Messages textes. Ottawa lève le ton» dans Le Journal de Montréal du 1er août 2008. Ils jappent mais ne mordent jamais. Au contraire, ils lèchent leurs commanditaires en bons commandités qu’ils sont.

Enfin, en ce qui a trait au sans-fil, Le Devoir du 31 juillet 2008 signale que : «Le revenu par abonné au Canada est parmi les plus élevés au monde». Et dans La Presse du 1er août 2008 : «Ottawa menace de réglementer l’industrie de la téléphonie cellulaire». Les arracheurs de dents sont moins menteurs.

Un an plus tard, se poursuit la farce que mentionne Le Devoir du 12 août 2009 : «Selon l’OCDE, les consommateurs d’ici dépensent 55 fois plus d’argent qu’au Japon pour avoir accès à Internet haute vitesse».

Le Vaudeville continue : «Québec veut mettre au pas les géants de la télédistribution de téléphone cellulaire et d’Internet» que signalait Le Devoir du 17 juin 2009. Encore une fois, c’est le gouvernement du Québec qui va se faire mettre au pas par les transnationales des communications comme il a été mis à sa place par les pharmaceutiques, les banques, les pétrolières et les adeptes des paradis fiscaux.

Et croyez moi, le dernier venu Globalive Wireless, filiale d’une firme égyptienne, ne changera absolument rien à l’arnaque. «Ottawa permet la venue d’un concurrent majeur» que titrait La Presse du 12 décembre 2009. Majeur, mon œil!

Et si vous avez des problèmes avec votre téléphone, je vous mets au défi de rejoindre «au téléphone» qui que ce soit chez Bell ou Rogers. Vous pourrez toujours vous adresser à leur bureau des plaintes ou vous en remettre à leur code de conduite. Ah, le marché avec ses lois naturelles, c’est nettement supérieur au public.

Si jamais je suis élu, je nationalise l’industrie des télécommunications comme dans d’autres pays.

Enfin, dans La Presse du 20 octobre 2009, Marcel Boyer de l’Institut économique de Montréal et professeur «émérite» à l’Université de Montréal, mentionne dans sa savante opinion, qu’il faut mettre en concurrence tous les services municipaux.

Qu’il commence donc par mettre en concurrence les compagnies de communications, les banques, les pétrolières, les pharmaceutiques, etc. Marcel, ça te dirait de te recycler en humoriste? Le talent est là, pas de doute. Il y a justement des ouvertures à Juste pour Rire. Gilbert Rozon attend ton appel!