Middletown, un vraquier et Rabaska

2010/02/11 | Par Normand Gagnon

L’échouement d’un vraquier à Saint-Laurent, dans la cour de résidents de l’île d’Orléans, vient encore miner le discours rassurant des promoteurs et supporteurs du projet Rabaska.

L’accident nous rappelle cette fois-ci qu’une panne mécanique ou une erreur humaine survenant à bord d’un navire circulant à la hauteur de l’île et de Lévis peut facilement le déporter hors du chenal et l’amener tout près des résidences, comme ce fut le cas ce matin à Saint-Laurent.

Angoissant de voir ce grand bateau posé au sein des glaces à quelques dizaines de mètres des habitations. Et s’il s’était agi d’un immense méthanier chargé à bloc d’une substance dangereuse et inflammable?

Deux jours seulement après l’explosion d’une centrale électrique au gaz au Connecticut, combien faudra-t-il encore de Toronto, de Middletown et de Saint-Laurent pour que nos dirigeants admettent enfin qu’un tel désastre peut survenir à tout moment ? Quand la santé et la sécurité des citoyens importeront-ils davantage que des intérêts économiques aveugles?

Middletown

Dans la foulée de l’explosion de gaz naturel à Middletown, on se doit de retenir une chose : peu importe l’avancement des technologies, des accidents demeurent toujours possibles et continuent de se produire.

L’organisme du gouvernement fédéral chargé de la sécurité pour ce genre d’installations au Canada a bien raison quand il recommande l’éloignement des populations comme toute première mesure de sécurité à appliquer.

À Middletown des répercussions de l’explosion se sont manifestées jusqu’à seize kilomètres du site. Seize kilomètres ! À Lévis, la situation nous apparaît beaucoup plus problématique que celle d’une centrale thermique, puisque, à la différence de celle-ci, le terminal méthanier Rabaska manipulerait du gaz naturel liquéfié (GNL).

La liquéfaction augmentant la concentration du gaz de 600 fois pour un même volume - et donc 600 fois plus d’énergie - imaginons seulement le potentiel de désastre d’un navire méthanier transportant plus de 200,000 mètres cubes de ce gaz liquéfié.

Certaines personnes coupables de l’autorisation de l’implantation de Rabaska au cœur de la population tenteront sans doute de se disculper en soulignant les différences entre un terminal méthanier et une centrale au gaz naturel.

Elles auront raison dans un sens, sauf qu’un terminal méthanier est beaucoup plus dangereux. Comme en font foi les nombreux incidents survenus ces dernières années, la partie portuaire du terminal, celle qui accueille les méthaniers chargés à bloc de leur cargaison « explosive », est la plus vulnérable aux accidents.

La construction de Rabaska si jamais elle se réalise, ne se fera pas avant une bonne décennie. Profitons de ce délai pour retrouver notre bon sens et entendre les avertissements répétés des experts de la Santé publique qui nous mettent si justement en garde, dans le dossier de Rabaska, contre les dangers d’un désastre qui fait aujourd’hui le malheur des gens de Middletown.