L’urgence d’un ralliement des pêcheurs de l’Atlantique

2010/05/05 | Par Raymond Gauthier

L’auteur habite aux Îles de la Madeleine

La catastrophe qui affecte notamment nos cousins acadiens de Louisiane n’est-elle pas le signal que nous attendions pour enfin nous mobiliser, avec l’ensemble des communautés riveraines du golfe et de l’estuaire du Saint-Laurent, afin de préserver l’intégrité de ces eaux vitales et nourricières ?

Les pêches étant le principal dénominateur commun qui nous concerne – que nous habitions les régions maritimes Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine-Côte-Nord du Québec ou les côtes des provinces voisines de l’Île du Prince-Édouard, de la Nouvelle-Écosse, de Terre-Neuve-Labrador ou du Nouveau-Brunswick –, n’avons-nous pas le bon déblâme (prétexte) pour réclamer solidairement un MORATOIRE PERMANENT ET INTÉGRAL sur la prospection et la mise en valeur des gisements fossiles extracôtiers, ne serait-ce que par précaution, pour protéger justement ce qui n’a pas de prix et assurer une utilisation pérenne des ressources renouvelables que nous prélevons et cultivons sur les côtes et au large de cette mer enclavée davantage que le golfe du Mexique ?

Nos communautés n’ont-elles pas déjà été suffisamment affligées par les « moratoires-après-coup » pour corriger les désastres résultant des imprévoyances et des excès ?

Ces erreurs ne devraient-elles pas nous inciter à nous mobiliser cette fois en faveur d’un MORATOIRE PRÉVENTIF ? La prévention et les pratiques exemplaires des homardiers des Îles, on le sait, ont été bénéfiques pour la durabilité des stocks.

Les sociétés de consommation effrénées auxquelles nous participons fidèlement, sous la bannière de la religion du marché libre et du profit illimité, ont développé des pratiques contraires au bon sens, substituant les mesures correctives de restauration-réparation aux vertus préventives de prudence et de modération.

Les grands-prêtres que sont les entreprises pétrolières et leurs acolytes – qui sont d’ailleurs les premiers bénéficiaires des billets verts issus de l’exploitation de l’or noir –, réussissent assez bien à nous endoctriner sur le mirage d’un paradis terrestre de la richesse.

Ils parviennent à nous rassurer (!) sur la sécurité (!) de leurs installations et des plans d’urgence pour contenir les risques de déversements accidentels.

La belle affaire ! Le niveau de responsabilité (!) des pétrolières et la collusion des gouvernements lorsqu’il s’agit de faire payer les pollueurs pour les dégâts sont bien connus.

On n’a qu’à se souvenir comment ça s’est passé suite au naufrage de l’Irving Whale, en 1970 ! Le pollueur s’en est tiré à bon compte et a même récupéré sa barge ! Les sacs de mazout lourd contaminés aux BPC gisent encore dans nos dunes.

La pétrolière BP, à qui la complaisance du gouvernement a laissé la « responsabilité » de prendre les précautions pour éviter de tels désastres, en a profité pour se laver les mains quant aux risques de sa désinvolture. Elle a même été à l’origine de l’allégement des contrôles réglementaires pour l’industrie.

Allons-nous croire qu’elle va s’acquitter, comme l’affirme Obama, des frais exorbitants inhérents à ce qui va devenir la pire catastrophe maritime ?

Les dizaines de milliards ne seront épongés que très partiellement par les assureurs. La différence viendra, comme dans le cas de l’Irving Whale et de l’Exxon Valdez, des poches des contribuables.

Pour le respect de l’estuaire et du golfe Saint-Laurent, leurs pêcheurs en tête, les populations riveraines doivent se donner la main et se tenir debout !