Noces à l’italienne

2010/05/11 | Par Michel Rioux

 
 Photo : Daniel Marchand

La chose m’avait toujours intrigué. Une soupe Campbell’s qui porte ce nom : Noces à l’italienne. Pourquoi ce nom pour une soupe ? On a fini par le savoir.

C’est en entendant Jean Charest affirmer le plus sérieusement du monde que de nombreux propriétaires de garderies privées s’intéressent à la politique que s’est faite la lumière. Citation du Devoir : « Le bon sens le dit, on ne va pas se compliquer la vie : il doit y avoir plein de gens qui sont dans des services de garde qui s’intéressent à la démocratie et à la politique. »

Ainsi donc, ce serait une espèce de délire démocratique qui se serait emparé de tout ce beau monde à qui on a, en retour de généreuses contributions à la caisse électorale du Parti libéral, remis ni plus ni moins que des planches à imprimer de l’argent sous la forme de places en garderies.

Depuis 2008, 1600 places ont été attribuées à 33 garderies privées propriétés de personnes qui ont contribué pour plus de 130 000 $ à la caisse du Parti libéral. De ce nombre, six membres de l’exécutif de comté du ministre Tomassi ont obtenu 350 places.

Et que dire de la famille Cola, qui a opéré  une réorientation de carrière plutôt spectaculaire après avoir vendu à prix fort son entreprise d’abattage de bovins, Colbex ?

Après avoir versé pas moins de 141 500 $ en dix ans au Parti libéral, dont 40 000 $ pour la seule année 2004, on les retrouve aujourd’hui propriétaires de 13 garderies privées. Y aurait-il un lien qu’on ignore entre la vache de réforme et la réforme de l’éducation ?

Dans le temps, l’Église faisait le trafic des indulgences en promettant le paradis. Aujourd’hui, c’est le trafic d’influence qui garantit les places en garderies ! Le pape Jules II, de son vrai nom Giulano della Rovere, avait même garanti en 1506 la vie éternelle aux ouvriers affectés à la construction de la basilique Saint-Pierre.

On ne sait pas si Jean Charest s’est aventuré jusque là avec les contrats en PPP pour le CHUM et l’échangeur Turcot. Mais il ne serait pas étonnant que cette tradition fort ancrée à Rome ait émigré ici.

L’ex-ministre Tomassi, se prenant pour Cicéron plaidant devant le Sénat, a beau déchirer sa robe prétexte sur la place publique en accusant le PQ de « profilage ethnique » et de « racisme », il se trouve que la communauté italienne est fort présente dans le décor ces jours-ci.

On cherche dans l’actualité des dernières semaines les Grecs, les Polonais, les Chinois d’origine. Pas l’ombre d’un cas.

C’est donc par le plus grand des hasards – et le hasard n’existe pas, c’est bien connu – que les Tony et Donato Tomassi, Pietro Perrino, Frank et Paolo Catania, Tony Accurso, Frank Zampino, Joe Borsalino, Luigi Corretti, Mario Gisondi, Jimmy Cacchione, Giovanni Difeo, Joe Magri, Ezio Carosielli, Lino Zampito, Tommy D’Errico, Giocchino Arduini, Frank Scarigi, Lino Zambito, pour ne nommer que ceux qui me viennent à l’esprit, se sont retrouvés d’une manière ou d’une autre sous les feux de la rampe.

Faut-il ajouter à cette liste pas du tout exhaustive Giacomo Dupui, ci-devant ministre de la Sécurité publique ? On finira bien par le savoir.

Dans la communauté, on doit bien se demander comment il se fait que ces fréquentations entre le parti libéral et le monde de la construction, entre le parti libéral et les garderies privées, finissent la plupart du temps comme des noces à l’italienne.

Et l’immense majorité de cette communauté, qui n’a pas accès à l’auge libérale, doit se sentir plutôt humiliée que ces scandales se jouent sur la musique du Parrain, de Pietro Mascagni.

Et que font les CF de souche pendant ce temps ? Ils s’apprêtent à Francofêter en anglais au Festival d’été de Labeaume City, avec les Rush, Arcade Fire, Billy Talent, Roger Hodgson, Jimmy Cliff, Steve Hackett, Steve Windwood, Andrew Bird, James Hunter, Rammstein et autres vedettes avantageusement connues dans leur patelin…

Et avec Gilles Vigneault, pour la couleur locale…




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