Hannah Montana contre Spiderman

2010/11/05 | Par Ginette Leroux

« Pourquoi les filles sont-elles toujours représentées de façon sexy? Pourquoi la femme est-elle toujours rabaissée? Pourquoi l’homme doit-il être toujours plus fort? », se demandent deux filles en feuilletant le magazine québécois Filles Clin d’œil. « Est-ce qu’on peut se fier à un stéréotype pour savoir si on est beau? », dit une autre devant un clip de Lady Gaga. « Les gens sont-ils aussi influencés qu’on le pense par les médias? », ajoute-t-elle, perplexe.

Réalisé en 2007, Sexy inc. traitait de l’hypersexualisation des jeunes. À l’époque, Sophie Bissonnette avait réuni plusieurs spécialistes de la question. Leur point de vue était renforcé de nombreux témoignages percutants d’intervenants du milieu.

Cette fois-ci, avec Être ou paraître? Les jeunes face aux stéréotypes sexuels, la cinéaste, qui depuis 30 ans s’intéresse aux réalités sociales et aux luttes des femmes, a choisi de donner la parole aux jeunes pour leur permettre d’objectiver ce problème.

Son film, remarquable, lucide et conforme à une réalité trop souvent éludée de la société de consommation, s’adresse aux professeurs et à leurs élèves du début du secondaire dans le cadre de la Semaine éducation médias qui se tient du 1er au 5 novembre.


Les jeunes face aux stéréotypes sexuels

Sophie Bissonnette réunit un groupe de préadolescents, garçons et filles. Ensemble, ils jettent un regard critique sur les produits de consommation qu’une mise en marché en forme de souricière cherche à convaincre qu’il n’existe qu’un seul modèle à suivre si l’on veut être populaire auprès de ses amis(es). Hors de cette norme, point de salut.

Tous, magazines, vidéoclips, vêtements, jouets, jeux vidéo véhiculent des messages uniques qui ont pour conséquences d’annihiler l’identité de chacun pour l’obliger à se plier aux diktats décidés par les médias et le marketing.


La vie en rose

Le marketing cible ces jeunes depuis l’enfance. « Il est estimé que dans le monde, les 8 à 14 ans, ceux que l’on qualifie de « tween » du mot anglais « between » c’est-à-dire entre l’enfance et l’adolescence, dépensent 300 milliards de dollars par année », dit Jonathan Deschênes, professeur de marketing. « Les identités sexuelles sont utilisées par les entreprises pour développer leurs produits », explique-t-il. Par exemple, on sait que les garçons aiment jouer à la guerre et que les filles, elles, seront attirées par le rose, le mauve, des couleurs caractéristiques de l’univers féminin. Pensez à Hannah Montana, ses robes, ses DVD et son monde rose bonbon.

Toujours selon l’industrie, les filles et les garçons évoluent dans des univers totalement différents et pratiquement irréconciliables. Pourquoi? Les gars sont présentés comme des êtres sans émotions, qui se servent de leurs muscles tantôt pour séduire, tantôt pour régler des comptes à leurs ennemis.


Deux vétérans du secondaire 

Les témoignages de deux jeunes diplômés du secondaire sont proposés en supplément au film. Vétérans de cette étape scolaire, Léa et Raphaël transmettent leur expérience aux néophytes qui s’y engagent à leur tour. Ensemble, ils résument en quelque sorte les discussions sur les sujets débattus tout au long du film, y ajoutant une touche d’authenticité.

Il faut voir les jeunes qui, avec des grands yeux ronds, écoutent leurs aînés raconter comment ils sont arrivés à se frayer un chemin aux cours des premières années du secondaire.

Par exemple, Léa se souvient qu’elle ne croyait pas son amie quand elle lui disait que les petites camisoles qu’elle aimait tant porter montraient trop ses seins et que, c’est pour cette raison qu’elle se faisait traiter de pute par ses camarades de classe. Ce n’est qu’en voyant les photos du spectacle de fin d’année qu’elle en avait pris conscience. Elle avait par la suite changé sa façon de s’habiller.


Du matériel pédagogique

Ce documentaire est un outil de qualité, nécessaire et facilement utilisable. Il est accompagné d’un guide pédagogique intelligent qui regroupe une variété de pistes de réflexion et d’activités pertinentes pour les professeurs qui cherchent à susciter la réflexion chez leurs élèves.

Les profs apprécieront ce matériel pédagogique préparé par plusieurs membres de l’équipe du Service de leadership du Y des femmes de Montréal. On peut le télécharger sur le site suivant : <onf.ca/education/guides/>.

Une bibliographie courte mais efficace, composée de titres récents – entre 2004 et 2010 – dont quelques documents se trouvent en ligne, est disponible à la fin du guide.

Des activités de lancement ouvertes au public sont prévues pour l’occasion. À Montréal, une projection suivie d’un échange avec la réalisatrice, un membre du Y des femmes et des jeunes qui ont participé au film aura lieu lundi le 8 novembre prochain au Cinéma ONF. Les parents, les jeunes et leur professeur ainsi que toutes personnes intervenant en éducation y sont attendus.


Être ou paraître? Les jeunes face aux stéréotypes sexuels sera présenté le 8 novembre prochain au Cinéma ONF, 1564, rue Saint-Denis (angle De Maisonneuve). À Québec, une même activité suivra le 10 novembre à l’école secondaire de Neufchâtel au 3600, avenue Chauveau.


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