Le discours d’Obama en Arizona

2011/01/18 | Par Fidel Castro

Je l’ai entendu hier rendre hommage, à l’Université de Tucson, aux six personnes assassinées et aux quatorze blessées en Arizona, en particulier à la représentante démocrate de cet État, grièvement blessée d’une balle dans la tête.

L’auteur est un déséquilibré, intoxiqué par la prédication de la haine au sein de la société étasunienne où le groupe fasciste du Tea Party a imposé son extrémisme au Parti républicain qui, sous la baguette de George W. Bush, a conduit le monde au bord de l’abîme.

Au désastre des guerres, s’ajoutent la plus grave crise économique dans l’histoire des USA et une dette publique qui équivaut d’ores et déjà à la totalité du Produit intérieur brut, plus un déficit mensuel qui dépasse 80 milliards de dollars et, de nouveau, une augmentation de la quantité de personnes perdant leur logement pour dettes hypothécaires. Les cours du pétrole, des métaux et des aliments s’élèvent progressivement. La méfiance dans le papier-monnaie augmente les achats d’or, et nombreux sont ceux qui augurent que les cours de ce métal précieux se chiffreront à 2 000 dollars – voire à 2 500 selon certains – l’once Troy d’ici à la fin de l’année.

Les phénomènes climatiques se sont aggravées, provoquant des pertes de récoltes considérables dans la Fédération de Russie, en Europe, en Chine, en Australie, en Amérique du Nord et du Sud, et ailleurs, ce qui met en péril les livraisons de denrées alimentaires dans plus de quatre-vingts pays du Tiers-monde et engendre une instabilité politique dans toujours plus d’entre eux.

Le monde doit se colleter avec tant de problèmes politiques, militaires, énergétiques, alimentaires et environnementaux qu’aucun pays ne souhaite que les États-Unis en reviennent à des positions extrémistes qui aggraveraient les risques d’une guerre nucléaire.

Le monde a condamné unanimement le crime de l’Arizona où il voit une expression de cet extrémisme. On n’attendait pas du président étasunien un discours enflammé ni belliqueux, ce qui n’aurait pas correspondu à son style, ni aux circonstances intérieures et au climat de haine irrationnelle qui règne aux USA.

Les victimes de l’attentat étaient des gens incontestablement courageux, ayant des mérites individuels, somme toute de modestes citoyens, sinon ils ne seraient pas venus là défendre le droit aux soins médicaux pour tous les Étasuniens et s’opposer aux lois conçus contre les immigrants.

La mère de la fillette de neuf ans assassinée – née le 11 septembre 2001 – avait déclaré courageusement que la haine déclenchée dans le monde devait cesser. Je n’ai pas le moindre doute que les victimes méritaient la reconnaissance du président des États-Unis et des citoyens de Tucson, des étudiants de l’Université et des médecins qui, comme toujours dans des cas pareils, expriment sans réserves la solidarité que les êtres humains portent en eux. La représentante grièvement blessée, Gabrielle Giffords, mérite la reconnaissance nationale et internationale qu’elle a reçue. L’équipe médicale continuait de donner aujourd’hui de bonnes nouvelles sur son évolution.

Néanmoins, Obama n’a pas condamné moralement la politique qui a inspiré une telle action.

J’essayais d’imaginer comment des hommes comme Franklin Delano Roosevelt auraient réagi devant un fait semblable, pour ne pas parler de Lincoln qui n’hésita pas à prononcer son fameux discours de Gettysburg. Quel autre moment attend donc le président étasunien pour exprimer le critère que partage, j’en suis sûr, la grande majorité des Étasuniens ?

Non qu’il manque une personnalité exceptionnelle à la tête des États-Unis. Ce qui convertit en un personnage historique un président qui a été capable d’arriver à ce poste par ses propres mérites, ce n’est pas la personne, mais sa nécessité à un moment donné de l’histoire de son pays.

Au début de son discours, on sentait qu’il était tendu et qu’il était très dépendant du texte écrit. Mais il a vite recouvré sa sérénité, sa maîtrise habituelle de la scène et les mots précis pour exprimer ses idées. Ce qu’il n’a pas dit, c’est qu’il n’a pas voulu le dire.

Comme morceau d’éloquence et juste éloge à ceux qui le méritaient, on peut lui décerner un prix.

Comme discours politique, en revanche, il a laissé beaucoup à désirer.


Fidel Castro Ruz
Le 13 janvier 2011