Peuple… tu dors d’un sommeil inquiétant…

2011/11/10 | Par Réjean Porlier

L’auteur est président du syndicat des Technologues d’Hydro-Québec

Mathieu Roy nous le dit dans son documentaire intitulé « Survivre au progrès »: les civilisations s’effondrent parce qu’elles n’apprennent pas de leurs erreurs. Et nous, alors !

Faut-il nécessairement une crise pour sortir de nos pantoufles et nous ramener à la réalité ? Il semble que oui, malheureusement. Le bateau prend l’eau de partout et plusieurs choisissent de fermer les yeux et de se laisser bercer par ce petit confort que nous voulions tous et qui, aujourd’hui, nous paralyse pour mieux nous asservir.

Aller, trinquons, à l’image des Romains, pendant que la finance attache les derniers chapitres de notre déshéritement.

Suis-je entrain de sombrer dans un pessimiste qui ne me ressemble en rien ? Pas du tout, je m’inquiète, c’est tout ! Et si j’en avais les moyens, je redonnerais vie à Michel Chartrand et à ces bâtisseur qui nous ont sortis de la grande noirceur pour qu’ils nous fassent un peu la leçon.

Jean Charest nous l’avait pourtant annoncé : la réingénierie de l’État. Il a repris par derrière ce qu’il avait manqué par devant, beaucoup plus sournoisement, mais efficacement.

Privatisation des soins de santé : le système à deux vitesses n’est plus un mythe, c’est bel et bien commencé.

Désengagement de l’État en éducation : augmentations substantielles des frais de scolarité.

Désengagement de l’État dans les infrastructures : instauration des PPP, malgré les mises en garde du vérificateur général.

Vente à rabais de nos richesses naturelles.

Etc…


On ne parle pas ici de dégraissage de l’appareil gouvernemental, ce sont les fondements même de notre système qui sont attaqués.

Le message de la population a pourtant toujours été clair : les priorités sont l’éducation et la santé.

Ah ! oui, le gouvernement doit faire des choix difficiles. Mon œil, oui !

De 55% qu’elle était à la fin des années soixante, la participation des entreprises aux recettes de l’État est passée à quelque chose comme 20% alors que celle des individus passait de 45% à 80%.

Il me semble qu’il ne faut pas être un économiste chevronné pour comprendre d’où vient le manque à gagner. Sans compter les baisses d’impôt qui représentent une ponction de quelques milliards chaque année dans les coffres du gouvernement.

«Wake up tout le monde !»

Le problème, ce n’est pas de voir deux gouvernements, un au fédéral et l’autre au provincial, qui ne carburent qu’aux mesures néolibérales et qui pan par pan démantèlent nos institutions, le problème c’est qu’on retombe toujours dans nos pantoufles de colonisé et qu’on assiste à ce désolant spectacle, presque gênés de se tenir debout.

Je vous promets une chose: si un jour ceux et celles qui ont une vision pour l’avenir du Québec, et non pour les amis du parti, arrêtent d’attendre que la solution vienne des autres et décident enfin de s’unir pour sortir de cette morosité, je serai de la partie et je vous assure qu’il y aura un projet de loi prévoyant qu’on enseigne dans les écoles la vraie histoire du Québec dans lequel un chapitre complet expliquera comment nous sommes sortis de la grande noirceur et pourquoi nous avons intérêt à ne jamais l’oublier.

Dans ce projet de loi, il sera aussi question d’apprendre à nos enfants qu’ils ont grandement intérêt à mettre les mains à la pâte et à se serrer les coudes. Peut-être deviendront-ils des adultes qui comprendront l’importance de quitter occasionnellement leur confort pour participer pleinement à la vie démocratique.

Pardonnez-moi, mais je rage intérieurement et l’écriture est une thérapie de première ligne.

Pourquoi cette rage ? Parce que le dernier acte de la prise en charge de notre économie par la finance est entrain de se déployer sous nos yeux et je vois des acteurs importants de la société civile qui feignent de ne pas en avoir connaissance. Des syndicats aussi.

Ce dernier acte se retrouve à l’intérieur de l’AÉCG, l’Accord Économique et Commercial Global entre le Canada et l’Union Européenne. L’Europe a exigé que nos services publics soient inclus dans l’entente, un incontournable pour qu’il y ait accord.

Si cet accord est ratifié, comprenons tous que nos services publics seront à la merci des multinationales européenne et que ce ne sera qu’une question de temps avant que le tout soit privatisé. Naturellement, Jean Charest, celui-là même qui a initié cette démarche consacrera enfin sa réingénierie de l’État.

Toute cette privatisation, dont rêve M. Charest et ses amis, a fait bien des dégâts dans maints pays comme l’Argentine, l’Angleterre ou même les Etats-Unis, où l’écart entre les riches et les pauvres n’a cessé de s’accentuer.

L’Argentine commence à s’en sortir, mais elle n’est pas liée par un accord de libre échange qui assure aux multinationales une protection sur leurs investissements. (À lire nécessairement dans les deux rapports de l’IRÉC, disponibles sur leur site Web.)

Autre fait important à souligner, le représentant du Québec à la table de négociation, M. Pierre-Marc Johnson est membre d’un conseil d’administration de la multinationale Véolia et est donc en conflit d’intérêt total. Qu’à cela ne tienne, tout cela se passe derrière des portes closes et, par conséquent, ne devrait pas déranger personne.

Le 26 octobre dernier, j’ai déposé une pétition qui est en ligne à l’Assemblée nationale, demandant que la population soit mise au fait de ce qui se trame et qu’elle ait à se prononcer sur l’entente.

De toute évidence, les députés, que j’ai rencontrés ce jour-là, était tenus dans l’ignorance la plus totale quant aux discussions qui ont cours. Doit-on s’en inquiéter ? Poser la question, c’est y répondre.

C’est inquiétant de voir à quel point tout cela passe inaperçu. Alors que cette négociation risque d’avoir des conséquences historiques pour l’avenir tant du Québec que du Canada et pas nécessairement pour les bonnes raisons, elle ne jouit d’à peu près aucune couverture médiatique.

Alors, sincèrement, je ne peux qu’espérer que chacun prenne un petit deux minutes pour compléter la pétition en ligne afin de susciter un peu d’intérêt et attirer l’attention médiatique.


Voici l’adresse : https://www.assnat.qc.ca/fr/exprimez-votre-opinion/petition/Petition-2129/index.html

Et celle des rapports de l’IRÉC : http://www.irec.net/upload/File/aecg120911.pdf

http://www.irec.net/upload/File/aecgjanvier2011.pdf


J’espère que vous m’aiderez à actualiser ce dossier et l’amener sur la place publique.

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