Droits de scolarité : réplique à la CREPUQ

2012/04/18 | Par Max Roy et Louis Gill

Max Roy est président de la Fédération québécoise des professeures et professeurs d’université

Louis Gill est économiste et professeur retraité de l’UQAM

Dans un article intitulé « Un milliard pour les étudiants des universités », paru dans Le Devoir des 24 et 25 mars, dont l’objectif est d’appuyer la décision gouvernementale d’augmenter les droits de scolarité de 325 dollars par année au cours des cinq prochaines années, le président-directeur général de la Conférence des recteurs et des principaux des universités, Daniel Zizian, dresse la liste des sommes disponibles en 2011-12 aux fins du soutien financier aux étudiants universitaires et en établit le total à 996 millions.

À ce montant, il ajoute les 118 millions de la bonification du Programme gouvernemental prévue pour 2016-17, soit 35 % des revenus additionnels des universités résultant de la hausse des droits de scolarité à cette date, pour en arriver à un soutien financier total de 1,114 milliard en 2016-2017.

Mais il omet de tenir compte de la baisse de 337 millions des sommes dont disposeront alors les étudiants en raison de la hausse des droits de scolarité. Le soutien financier aux étudiants aura certes augmenté de 118 millions par rapport à 2011-12, mais leurs ressources auront été amputées de 337 millions par rapport à la même année, ce qui représente une détérioration nette de 209 millions.

Dans le budget de 2012-13 présenté le 20 mars, le gouvernement a amendé les chiffres du Plan de financement des universités présenté l’an dernier et établi à 279 millions la contribution nette des étudiants prévue pour 2016-2017.

Ce montant, qui ne représente que 3 dixièmes de 1 % des revenus budgétaires de 79,4 milliards prévus pour 2016-17, pourrait être versé aux universités par le gouvernement, sans coût supplémentaire pour lui, par le seul ajout d’un palier d’imposition au taux de 28 % sur les revenus des particuliers supérieurs à 125 000 dollars.

On demanderait simplement aux citoyens mieux nantis, plutôt qu’aux étudiants démunis, de faire leur « juste part » pour accorder aux universités les moyens de maintenir et d’améliorer leur qualité.

Même si la question n’est pas immédiatement à l’ordre du jour, dans une bataille qui est dirigée pour l’instant contre la seule hausse des droits de scolarité, il n’est pas inutile de se demander quel serait le coût de la réalisation, dès maintenant, de la gratuité universitaire.

Pour les seuls droits de scolarité, de 2168 dollars pour une pleine année, le coût serait de 445 millions de dollars, en supposant 205 000 étudiants équivalents à temps plein (EETP), soit 6 dixièmes de 1 % des revenus budgétaires de 69,4 milliards en 2012-2013.

Si on ajoute les « Frais institutionnels obligatoires », qui sont de l’ordre de 650 dollars par année en moyenne par étudiant, le coût supplémentaire est de 135 millions.

Cela représente, au total, 580 millions, soit 8 dixièmes de 1 % des revenus budgétaires de 2012-2013.

Le gouvernement pourrait financer cette mesure et dégager un surplus par le biais de la seule pleine imposition des gains de capital des entreprises et des particuliers.

Le défaut de le faire a entraîné des dépenses fiscales, c’est-à-dire un cadeau aux nantis, de 830 millions en 2011 (Ministère des Finances, Dépenses fiscales, Édition 2011, p. VIII).

Il est plus que temps de cesser de mettre en péril l’éducation de notre jeunesse en lui imposant le fardeau du financement de ce bien commun, et de commencer à mesurer les revenus auxquels le gouvernement renonce avec ses généreuses mesures fiscales à l’égard des entreprises et des plus riches.

En voulant obstinément mettre la main dans la poche des étudiants pour accroître le financement des universités, le gouvernement se trompe de poche. Il devrait plutôt s’alimenter à celle, mieux garnie, des privilégiés de notre système fiscal.


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