Brèves syndicales

2013/01/11 | Par Maude Messier

Les pauvres sont plus pauvres

Montréal – Tous les ans, en début d’année, on pourrait écrire le même article, ou presque. À quelques chiffres près, le constat est le même : les pauvres sont plus pauvres.

Au 1er janvier 2013, la prestation mensuelle d’aide sociale de base pour un adulte est passée de 589 $ à 604 $, soit une hausse de 2,48 %. Cette variation est basée sur l’indice des prix à la consommation du Québec, qui exclut l’alcool et le tabac.

Pourtant, le Front commun de défense des personnes assistées sociales (FCPASQ) soutient que cette augmentation est en bien en deçà de la hausse de l’ensemble des prix des produits et services de base pour 2013.

La porte-parole de l’organisme, Amélie Châteauneuf, confiait cette semaine au journal Le Devoir être inquiète de la situation des plus démunis qui ne cesse de se détériorer.

« On reçoit des appels de gens qui n’ont plus accès aux banques alimentaires parce que celles-ci ne fournissent pas. Certains nous disent que ça fait plusieurs jours qu’ils jeûnent. »

Elle ajoute que l’ensemble des dépenses liées aux besoins de base seront à la hausse pour l’an prochain, « que ce soit les denrées alimentaires de base, le transport collectif, l’électricité et le loyer, c’est clair que, chaque année, les personnes s’appauvrissent. »

Un titre de transport mensuel de la STM coûte 77 $. Les prestataires d’aide sociale n’ont pas vraiment les moyens de se payer le luxe d’une passe de métro, pourtant bien utile quand vient le temps de se chercher un emploi.

L’Index de prix alimentaire à la consommation 2013, publié par l’Université de Guelph, prévoit que le coût des aliments pourrait augmenter de 3,5 %. C’est au rayon de la boucherie que la facture sera la plus salée, les prix pouvant varier de 6,5 % à 8,5 %. Du côté des produits céréaliers, des pains et des pâtes, une augmentation pouvant atteindre 4,5 % est à prévoir.

Une croissance du nombre de demandes de prestations d’aide sociale est à envisager en raison de l’implantation de la réforme drastique du régime d’assurance-emploi. Les chômeurs ne se qualifiant pas aux nouvelles exigences du régime n’auront d’autres choix que de se tourner vers l’aide sociale.

Compte tenu du fait que le Québec compte près de 40 % de l’ensemble des travailleurs saisonniers, particulièrement visés par la réforme conservatrice, Ottawa pellette la pauvreté dans la cour des provinces et leur refile la facture en sus.

En 2013, il y aura plus de pauvres et ils seront plus pauvres.

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Mort d’homme au port de Matane

Matane – Un débardeur a perdu la vie dans un accident de travail survenu lundi au port de Matane.

Normand Gauthier, 54 ans, s’afférait au chargement de ballots de pâte à l'aide d'une grue au moment du drame.

Il s’agit du deuxième décès en moins de trois ans à survenir dans des circonstances similaires sur ce même lieu.

Yanick Proulx, conseiller syndical du Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP-FTQ), déclarait cette semaine par voie de communiqué que des enquêtes sont actuellement en cours.

« Mais chose certaine, nous allons effectuer un suivi très serré des conditions de santé-sécurité et de la formation dispensée aux travailleurs du port de Matane. Nous allons aussi veiller à ce que les recommandations découlant des enquêtes soient appliquées à la lettre. »

Le syndicat offre ses condoléances à la famille et aux proches.

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Climat tendu chez Rio Tinto Alcan

Alma – Le retour au travail après un lock-out de six mois n’est pas évident à l’aluminerie d’Alma. C’est un secret de polichinelle que les relations de travail sont tendues et que le climat n’est pas des plus harmonieux.

C’est la publication d’un courriel en provenance d’un coordonnateur de main-d’œuvre à propos des congés familiaux à accorder avant le 7 janvier qui a mis le feu aux poudres cette semaine.

Canoë.ca et TVA Nouvelles ont publié des extraits du message destiné aux superviseurs, dans lequel il est écrit: « Pensez à la cuve d'abord » et « Aucun congé familial sans enquête. Aucune absence sans permission sans qu'il y ait un suivi pouvant aller au disciplinaire. »

Un ton méprisant selon les travailleurs, qui reflèterait bien l’ambiance générale de l’usine où flotte un air de vengeance depuis le retour au travail : les portes de certaines salles de repos ont été enlevées; auparavant accessible toute la journée, la cafétéria est maintenant cadenassée en dehors des heures de repas et des caméras de surveillance ont été ajoutées.

Selon nos informations, il y aurait aussi un durcissement des mesures disciplinaires et de la gestion de l’absentéisme. Des règles de respect auraient aussi été instaurées.

Un travailleur aurait même écopé d’une suspension de 24 heures pour avoir parlé en mal d’un superviseur dans une conversation avec des confrères de travail.

Pour le syndicat, la pression psychologique sur les travailleurs est très forte et cette situation ne saurait être viable à long terme.

La direction de Rio Tinto Alcan allègue que l'usine d'Alma est dirigée comme les autres, selon ce que prévoit la convention collective de travail.

« C’est complètement faux, de dénoncer le représentant syndical des Métallos, Dominic Lemieux. C’est l’enfer depuis le retour au travail, le climat est malsain au quotidien. »

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Assurance-emploi : les travailleurs de la construction prennent la mesure de la réforme

Montréal – La réforme de l’assurance-emploi est entrée en vigueur le 6 janvier 2013, avec son lot d’appréhensions et d’inquiétudes. Mais il est encore tôt pour prendre le pouls, selon le président de la FTQ-Construction, Arnold Guérin.

L’industrie de la construction compte en ses rangs une grande part de travailleurs aux prises avec du chômage saisonnier. C’est une réalité propre à cette industrie où les travailleurs doivent souvent conjuguer avec des battements entre différents chantiers ou encore carrément une baisse de travail pendant certains mois.

Ils sont nombreux à devoir faire parfois plusieurs demandes de prestations en cours d’année et se retrouveront donc, selon les termes du nouveau régime, dans la catégorie des prestataires fréquents.

Dès le début de leurs prestations, ils devront élargir leur recherche d’emploi pour englober des emplois semblables à leur emploi habituel et accepter une rémunération à 80 % de leur salaire précédent.

Après 7 semaines de prestations, ils devront accepter tout travail pour lequel ils sont qualifiés et accepter un salaire à partir de 70 % de leur salaire précédent.

« Le gros problème, c’est que certains vont être pris pour travailler ailleurs que dans la construction, dans une autre industrie. S’ils sont contraints d’accepter une autre job que leur métier, ils ne pourront pas la lâcher sans qu’un employeur ne leur garantisse les heures nécessaires pour qu’il puisse se requalifier à l’assurance-emploi. Ce n’est pas évident », d’expliquer Arnold Guérin.

Ce qui risque, à son avis, d’engendrer une perte d’expertise. « Dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre, c’est absurde que des travailleurs spécialisés, qualifiés doivent quitter leur région ou accepter un emploi dans une autre industrie. »

Il précise aussi que ces mesures affecteront évidemment davantage les régions, où le travail saisonnier est plus fréquent. « Le pire, c’est qu’ils prévoient des surplus de 1,3 milliards $ dans la caisse d’assurance-emploi au 31 décembre 2013! »

Le son cloche est similaire du côté patronal. L’Association de la construction du Québec (ACQ) s’inquiète aussi du fait que des travailleurs de la construction soient contraints d’accepter un emploi dans un autre secteur que celui de la construction.

Dans un article publié cet automne dans le Magazine Construire, l’économiste de l’ACQ, Jean-Philippe Cliche, souligne également l’impact négatif que cela pourrait entrainer sur l’attraction et la rétention de la main-d’œuvre, particulièrement dans un contexte de pénurie, précisant « qu’une crainte supplémentaire chez les jeunes et les nouveaux arrivants dans l’industrie pourrait être extrêmement préjudiciable pour le secteur de la construction. »

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Grève et lock-out dans un CPE pour 15 minutes de pause

Fermont – La vingtaine d’éducatrices du CPE le Mur-Mûr ont repris le piquetage devant l’établissement ce jeudi matin, en toute légalité, après avoir été contraintes de quitter les lieux par la Sûreté du Québec avant les Fêtes sous le prétexte qu’elles contrevenaient à un règlement municipal sur la paix et l’ordre.

Le conflit de travail entre la direction du CPE et le syndicat perdure depuis maintenant huit mois. L’ajout d’une pause de 15 minutes est au cœur des revendications des éducatrices et du litige avec l’employeur.

« Elles n’ont aucune pause actuellement. La demande syndicale initiale était une pause de 15 minutes en après-midi. Cette demande se chiffrait à 50 000 $ annuellement. On a fait une concession en acceptant de coller la pause à l’heure du dîner, ce qui fait baisser la facture à 25 000 $ puisse que ça ne nécessite pas l’embauche d’une personne supplémentaire », d’expliquer Hugo Dion, conseiller syndical de la Fédération de la santé et des services sociaux de la CSN (FSSS-CSN) attitré au dossier.

M. Dion soutient que le budget d’exploitation du CPE dépasse un million de dollars annuellement. « Ils coupent sur les conditions des éducatrices pour des projets d’agrandissement. Ça, ça ne passe pas. »

Si la direction du CPE a accepté en négociation d’ouvrir ses livres pour analyse financière pour les années passées, soit de 2009 à 2011, elle refuse de le faire pour la période allant de 2013 à 2015. Ce qui fait dire au syndicat qu’il doit bien y avoir quelque chose à cacher. « Ça fait longtemps que le CPE parle d’agrandissement. »

L’origine du conflit remonte à huit mois. Une grève générale illimitée avait alors été déclenchée dans le cadre d’une négociation concertée avec trois autres CPE de Sept-Îles. Ces derniers ont conclu des ententes et une trêve de plusieurs mois a permis la poursuite des négociations à Fermont.

Devant le refus de la partie patronale d’accorder une pause de 15 minutes, des grèves sporadiques en raison d’une à deux fois par semaine ont été déclenchées en novembre. La direction du CPE a répondu en décrétant un lock-out le 5 décembre dernier, suivi de près par un vote de grève générale par le syndicat.

Les négociations sont donc au point mort depuis le 16 novembre 2012. Mur-Mûr est le seul CPE de Fermont. Une quarantaine d’enfants fréquentent l’établissement.