Le syndicalisme est-il toujours pertinent ?

2013/03/21 | Par Jean-Simon Carrier

Je travaille à titre d’enseignant depuis septembre 2005. À ce moment, j’ai obtenu un contrat dans une école que je ne connaissais pas beaucoup. Au moment de former les différents comités de travail pour l’année scolaire, j’ai été surpris de constater qu’il n’y avait pas foule pour représenter l’école aux réunions syndicales. J’ai sauté sur l’opportunité.

Mes objectifs étaient simples : je voulais rencontrer d’autres enseignants tout en découvrant quels sont mes droits et mes responsabilités face à mon employeur. Une aventure très enrichissante commençait.

Évidemment, mes objectifs de départ ont évolué. Je milite, aujourd’hui, pour améliorer les conditions de travail de mes collègues. Par extension, je revendique l’amélioration des conditions d’apprentissage de mes élèves. S’il y en a moins dans une classe, la job de l’enseignant est plus facile et l’élève en sort gagnant. Dans les prochaines lignes, je vais vous démontrer pourquoi, à 32 ans, je trouve primordial que le syndicalisme existe encore aujourd’hui.

Tout d’abord, le syndicalisme sert à créer un rapport de force entre employés et employeur. Celui-ci n’est pas obligatoirement conflictuel. Dans le meilleur des mondes, les deux partis s’efforcent de trouver le meilleur compromis pour tous. Beaucoup diront qu’ils n’ont pas besoin d’un syndicat pour faire cela. J’en conviens ! Mais, est-ce que tout le monde a cette capacité ?

Je ne peux pas débarquer dans le bureau de Marie Malavoy, la ministre de l’Éducation, du Loisir et du Sport (MELS) pour lui parler de mon salaire. Et mon directeur ne peut pas prendre de décisions à ce niveau. D’où l’importance de se rassembler pour faire respecter nos droits et pour assurer une certaine uniformité. Est-ce normal que l’ami du boss ait de meilleures conditions de travail qu’un autre employé ?

Un premier mythe véhiculé, c’est que le syndicat est une grosse machine qui sert à protéger de mauvais employés. Malheureusement, où il y a de l’homme, il y a de l’hommerie. Par contre, j’aime mieux voir les choses du côté positif.

Pour le nombre de travailleurs incompétents, combien de bons travailleurs profitent du syndicat, peut-être sans même le savoir ? Ce que l’on oublie souvent, c’est qu’avant d’avoir la protection syndicale, l’employeur dispose d’une période où il doit évaluer l’employé.

Si l’employeur ne fait pas son travail adéquatement, c’est le syndicat qui passe pour fautif par la suite car il se doit, selon la loi, de défendre ses membres qu’ils soient bons ou mauvais.

En second lieu, on entend souvent que le syndicat est devenu une grosse machine sur laquelle nous n’avons aucun impact. Je suis au fait de ce qui se passe dans mon syndicat local, le Syndicat de l’enseignement Val-Maska (SEVM) affilié à la Centrale des syndicats du Québec (CSQ).

Je sais que ma voix est importante pour chacune des instances. Dans mon syndicat local, je suis invité à deux assemblées générales par année, sans compter les assemblées générales extraordinaires convoquées au gré de l’actualité. À ces moments, les micros sont ouverts et je peux faire part de mon opinion.

En plus, je me dois d’informer mon représentant d’école (élu) de ce que je pense des sujets qui seront débattus à l’instance intermédiaire. Pour faire cela, je dois être au courant de ce qui se passe. Donc, j’ai la responsabilité de m’informer et de lire ce qui m’est remis.

Comme je peux élire mes représentants à la CSQ et à la Fédération des syndicats de l’enseignement (FSE), ma voix est transmise aux instances supérieures mais je dois aussi demander à mes représentants de rendre des comptes. Dans cette optique, ma voix est importante et chacun des paliers veut la connaître par les assemblées tenues ou par les enquêtes menées.

En plus d’aider à rehausser le niveau de vie de ses membres, les non-syndiqués en profitent aussi. Pensons à l’assurance maladie, à l’équité salariale ou au Régime québécois d’assurance parentale (RQAP). Ces gains, qui s’étendent à l’ensemble de la population, sont le résultat de batailles entamées par des syndicats !

Le syndicalisme est encore très pertinent dans le Québec d’aujourd’hui. Par contre, il est atteint du même mal que la politique scolaire, municipale, québécoise ou canadienne. Il se heurte à l’individualisation de la société et au désintérêt face aux institutions démocratiques.

La population est cynique par rapport à ces dernières, mais elle ne les investit pas pour les réformer. Les syndiqués ne sont pas différents, certains chialent contre la structure mais ne font rien pour la changer. Ils attendent peut-être l’intervention divine !

En même temps, il faut constater que quelqu’un qui décide de s’investir va souvent se rendre compte de la nécessité de l’institution. Il deviendra peut-être, par la suite, un militant. À tout le moins, il comprendra l’importance de prendre l’information et de questionner.

Faut-il dépoussiérer certaines pratiques ? Probablement ! Pour ce faire, allez à vos réunions syndicales et faites profiter aux membres de vos bonnes idées. On en sera tous gagnant !