L’aut’journal au congrès du NPD

2013/04/15 | Par Louis-Philippe Sauvé

À Montréal, près de 1500 néo-démocrates de partout au Canada se sont réunis cette fin de semaine à l’occasion du congrès fédéral du NPD. L’aut’journal y a dépêché un reporter, Louis-Philippe Sauvé, afin d’en faire un compte-rendu à ses lecteurs.

Montréal – Dans les couloirs lumineux du Palais des congrès, les militants étaient nombreux à discuter vendredi midi avant les cérémonies d’ouverture du congrès, alors que les « radicaux » du parti distribuaient Virer à gauche, la revue du Caucus socialiste du NPD, un club politique qui milite pour que le parti se déplace plus vers la gauche.

Bien que Jack Layton soit décédé, son esprit était bel et bien présent au congrès où les militants nostalgiques pouvaient se procurer des affiches, des T-shirts et des figurines à tête branlante de Jack.

Plus tôt en matinée, les militants ont débattu à huis-clos de la priorisation des résolutions. Pour les délégués, ce moment était crucial puisque, avec plusieurs centaines de propositions inscrites, seules celles se trouvant en tête des listes de priorité seraient débattues.

Le congrès animé par les députés Alexandre Boulerice et Jinny Simms a débuté par un Ô Canada bien senti et une cérémonie amérindienne. Les délégués ont par la suite eu le privilège d’entendre une conférence de Joseph Stiglitz, un ex-conseiller de Bill Clinton et récipiendaire d’un prix Nobel en économie. Il y est allé d’une charge à fond de train contre les politiques d’austérité.



Discours du chef

«Le Parti devrait-il tenir un congrès pour élire un nouveau chef ?» 92.3 % des délégués présents ont répondu par la négative à cette question. Puis, Thomas Mulcair a fait une entrée triomphale sous les applaudissements nourris de ses partisans après l’annonce du résultat du vote de confiance.

Le chef du NPD était souriant et a commencé son discours avec les remerciements d’usage puis a rappelé la vague orange de 2011 ainsi que les origines et les fondements historiques du parti.

« We can do better ». Le discours de Thomas Mulcair peut se résumer essentiellement à cette citation. Tout au long de son discours, il n’a eu cesse de présenter le NPD comme étant la voie du changement, de l’optimisme et du progrès. Le chef néo-démocrate a particulièrement axé son discours sur la problématique de l’accroissement des inégalités, l’environnement et la lutte à la pauvreté.

« Nous avons la vision pour unir les progressistes, nous avons la vision pour unir les Canadiens, nous sommes le parti qui est dans la meilleure position pour défaire Stephen Harper et c’est-ce que nous ferons en 2015 », a-t-il clamé en anglais.

Thomas Mulcair ne s’est pas retenu pour attaquer les Conservateurs. « Le travail que nous faisons ensemble cette fin de semaine et celui que vous faites quotidiennement sont plus importants que jamais, parce qu’à Ottawa nous avons devant nous un gouvernement conservateur qui répand le défaitisme et qui sème la division. […] Il n’y a pas de place pour la mère de deux enfant à Lavaltrie qui a travaillé fort à chaque jour de sa vie pour ses enfant, pas de place pour le transgenre qui habite à Vancouver, ou encore pour l’adolescente des Premières Nation qui vit sur une réserve et qui se demande pourquoi son école reçoit 30% de moins en financement que l’école voisine fréquenté par d’autres jeunes canadiens, aucun d’entre eux n’a de place dans le Canada de Stephen Harper ».

Thomas Mulcair s’en est ensuite pris à ses adversaires libéraux qu’il a accusés d’être semblables aux Conservateurs, de n’avoir rien fait pour contrer les changements climatiques et pour la justice sociale.

Il a également rappelé qu’il était à la tête du premier parti fédéraliste à obtenir une majorité de députés fédéraux au Québec et a déclaré que cela était une bonne nouvelle pour tous. Il a expliqué que son parti avait connu ce succès notamment parce qu’il avait une vision rassembleuse et qu’il respectait les Québécois.



Résolutions

Lors du congrès de cette fin de semaine, les militants et militantes ont également eu l’occasion d’amender les positions du parti. Ils ont également procédé à deux modifications aux statuts du parti, dont la plus controversée était sur le préambule et la présence du terme socialisme.

Auparavant la notion de socialisme ainsi que sa définition étaient au cœur du préambule. Les militants ont voté à 83 % en faveur du nouveau préambule qui laisse une place mineure à cette notion à laquelle on a substitué celle de social-démocratie.

Les membres ont également voté des résolutions en faveur de la lutte aux paradis fiscaux, contre l’abolition de la formule Rand et en faveur de l’abrogation la loi C-377, qui force les syndicats à publier dans leurs états financiers toute dépense de plus de 5000 dollars.

Les délégués ont également ajouté une section visant à maintenir le système de gestion de l’offre en agriculture et le protéger « pour le lait, les œufs et la volaille […] et dans toute entente commerciale ».

En outre, un gouvernement néo-démocrate défendrait l’équité salariale, soutiendrait l’industrie forestière. Ils ont de plus réitéré leur opposition à la réforme de l’assurance-emploi, en appuyant une résolution présentée par le député Yvon Godin, qui l’a défendu en livrant une diatribe enflammée comme seul lui peut le faire.

Tout au long du congrès, la grande majorité des propositions priorisées ont été adoptées à de très fortes majorités. Les plus controversées comme celle visant à légaliser la prostitution ont été mise en dépôt.



Conférenciers

De nombreux conférencier prestigieux ont pris la parole lors du congrès du NPD. Outre Joseph Stiglitz, les délégués ont également entendu Laure Waridel qui a co-fondé Équiterre, Darell Dexter, premier ministre de la Nouvelle-Écosse ainsi que Sylvie Fréchette.

Le Président du Congrès du travail du Canada (CTC), Ken Georgetti, a également prononcé un discours. Le NPD et le CTC entretiennent des liens étroits depuis 1961. Bill Shorten, ministre du Travail australien, a également livré un discours.

Plus controversée était la présence de Jeremy Bird, un des principaux organisateurs de Barack Obama lors des élections présidentielles de 2012. Lors du vote sur l’ordre du jour, des délégués ont demandé le retrait de sa conférence arguant que l’administration Obama était guerrière et favorisait les banquiers de Wall Street. La proposition a été battue à forte majorité.

Rapports de la trésorière et du directeur à l’organisation

Pour la trésorière du parti, Tania Jaezebiak, les finances du NPD sont relativement en bonne santé. Les néo-démocrates auraient remboursé une part substantielle de leur dette électorale et la collecte de fonds serait en croissance. Elle a cependant émis un bémol en rappelant aux membres que le financement public du parti allait décliner en raison des modifications que le gouvernement Harper a apporté à la loi électorale.

Il y aurait fort à faire en matière de financement pour les néo-démocrates puisque sur près de 11 500 000 $ de dollars que le parti a amassé en 2011, un peu plus de 7 000 000 $ provenait du financement public. Mme Jaezebiak a donc enjoint les associations à en faire plus en matière de financement.

Le directeur à l’organisation, Nathan Rodman, a quant à lui livré un bilan positif de la situation organisationnelle. Son plus grand défi sera de conserver les acquis de la vague orange tout en allant à la conquête de nouveaux sièges en vue de prendre le pouvoir.

Le stratège néo-démocrate compte notamment sur les nouvelles technologies pour réaliser ces gains. C’est dans cette optique que se sont tenues de nombreuses formations sur le recrutement, la mobilisation, la collecte de fonds et l’organisation électorale tout au long de la fin de semaine. Pour les stratèges du NPD les élections commencent dès la clôture de ce congrès et la campagne sera longue et numérique