Déficit zéro : la stratégie du gouvernement pourrait lui faire rater sa cible

2013/06/12 | Par IRIS

Montréal, 11 juin 2013 – Faisant le bilan de la stratégie de relance de Québec et Ottawa, l’Institut de recherche et d’informations socio-économiques (IRIS) émet de sérieux doutes sur la capacité du gouvernement provincial d’atteindre l’équilibre budgétaire en 2013-2014.

L’étude montre que la stratégie de relance – budgétairement restrictive, mais monétairement accommodante – a causé une relance beaucoup plus lente après la dernière crise que lors des crises précédentes.

« Le Canada est pris dans une trappe d’austérité-stagnation, c’est-à-dire que ses compressions budgétaires dans le but d’atteindre l’équilibre budgétaire amènent un ralentissement de l’économie qui font diminuer les recettes fiscales, ce qui oblige le gouvernement à sabrer encore plus s’il veut atteindre son objectif. C’est ce cercle vicieux qui cause une relance anémique au Canada. Or, le Québec est précisément en train de suivre cet exemple. Alors qu’il s’était relativement bien tiré d’affaire jusqu’ici, cette stratégie de relance pourrait bien mettre en péril le déficit zéro auquel le gouvernement voue une obsession aussi démesurée qu’improductive », lance Éric Pineault, chercheur-associé à l’IRIS et auteur de l’étude.

L’étude utilise une méthodologie développée par trois économistes du Fonds monétaire international (FMI) qui permet de comparer la dernière crise avec les récessions précédentes (soit de 1975, 1982 et 1991). Par cette étude, les économistes du FMI ont constaté qu’il existe une « grande divergence » entre la façon de répondre à la crise en 2009 par rapport aux relances précédentes.

« Notre étude permet de faire le même constat pour le Canada. Habituellement on réagissait aux crises en augmentant l’intervention de l’État suite à un choc des taux d’intérêt qui limitaient le crédit, cette fois-ci on a fait le contraire. L’État a fait un peu d’investissements en infrastructure – ce qui a un effet modeste – et très peu de nouvelles dépenses d’opération. Par contre, la Banque du Canada maintient des taux d’intérêt presque planchers depuis maintenant plusieurs années. Cette stratégie aurait pour but de stimuler l’investissement privé, pourtant celui-ci demeure stable », constate Éric Pineault.

Cette stratégie de « relance financiarisée » a eu d’importantes conséquences pour les ménages et pour les institutions financières.

« Ce qui empêche le Québec et le Canada de retomber en récession pour l’instant, c’est la consommation des ménages. Or, cette consommation ne s’est pas financée à même une hausse des salaires, mais bien par l’augmentation de l’endettement favorisé par la politique monétaire permissive du gouvernement fédéral. Nous constatons cependant que la croissance du crédit à la consommation est plus rapide que celle des dépenses ce qui pointerait vers des sommes importantes d’intérêts que les ménages verseraient aux  institutions financières. Rappelons que ces dernières se sont particulièrement bien tirées d’affaire suite à la crise, bénéficiant de généreux programmes mis en place par la Banque de Canada et la Société canadienne d’hypothèque et de logement », souligne Éric Pineault.

L’étude Cette fois, est-ce différent? est disponible gratuitement sur : www.iris-recherche.qc.ca.