La guerre à l’éolien : pourquoi ?

2013/08/19 | Par Réal Reid

L’éolien est la source d’énergie la plus importante au Québec. Bien planifié, l’éolien est compétitif et son impact environnemental est le plus bas de toutes les sources d’énergies. Il peut rendre de grands services au Québec.

Pourtant, depuis quelques mois nous assistons à des attaques sans précédent dans les journaux : l’éolien serait responsable de tous les problèmes d’Hydro-Québec, des surplus d’énergie aux augmentations de tarifs d’électricité,


SURPLUS :


En 2008, on s’était déjà engagé à acheter environ 10 TWh d’électricité éolienne, Pourquoi en 2009 avoir lancé le projet hydroélectrique La Romaine, pour une production additionnelle de 8 TWh par année, alors que la crise économique était déjà bien installée et que le gaz naturel se vendait déjà sous les 4 $/MMBTU sur le marché américain.

Le projet hydroélectrique de la rivière Romaine doit être mis en dormance. Ce projet de 8 TWh au coût d’environ 10 ¢/kWh avec des espoirs de vente à l’exportation de 3 ¢/kWh résultera en des pertes de 560 M$/année au Québec. De même, les projets d’harnachement de petites centrales hydrauliques sur des chutes faisant partie du Patrimoine Québécois devraient être abandonnés.

Convertir à l’électricité ce qui reste de chauffage au mazout et au gaz dans les secteurs résidentiels et commerciaux, absorberait les surplus. Le potentiel d’un tel programme serait la réduction de 2 G$/année de sorties de capitaux du Québec; la réduction de 9,1 MT par année de gaz à effet de serre et Hydro-Québec pourrait vendre ses surplus aux consommateurs québécois à 7,78 ¢/kWh (8,56 ¢ avec la TVQ) plutôt que de les brader à 3- 3,5 ¢ à l’exportation. Un tel programme serait sans coûts additionnels aux consommateurs1.


COÛTS :


En 2013, Hydro-Québec prévoit payer de 8 à 13,3 ¢/kWh pour l’énergie éolienne provenant de l’appel d’offres éolien de 2000 MW lancé en 2005, pour un coût moyen de 8,7 ¢/kWh. Pourquoi des prix si élevés alors que des projets similaires aux USA donnent des coûts de 5 à 6 ¢/kWh avant subventions, aussi bas que 2 ¢/kWh après subvention2.

Au Québec, on a déterminé les emplacements des projets éoliens d’après ce que le réseau de transport pouvait accepter sans problèmes, ensuite on a choisi les projets à partir du moins cher en montant pour combler les 2000 MW. En agissant ainsi, on a négligé la variable la plus importante : la qualité de la ressource, ce qui a résulté en des projets beaucoup trop chers.

Au Texas et en Californie, l’État a mandaté la construction/modification du réseau de transport pour aller chercher la ressource éolienne là ou elle est excellente. Au Texas, un projet de 6,9 G$ pour la construction de près de 5800 km de lignes à 345 kV incluant des améliorations/mises à jour d’une douzaine de postes, permettra de récolter la production de 18 500 MW de capacité éolienne. Le coût de capital de ce projet est de l’ordre de 0,6 ¢/kWh.

Si on appliquait le même genre de planification au Québec : construire/modifier le réseau de transport pour aller chercher l’énergie éolienne (à la Baie James) là où la ressource est excellente, le coût serait de l’ordre de 5,6 à 6,6 ¢/kWh, rendu à Montréal plutôt que le 8 à 13 ¢/kWh des projets actuels!


1.
Saulnier et Reid : “L’éolien au cœur de l’incontournable révolution énergétique”, éditions MultiMondes 2009, pages 341 à 350,

2. U.S. Department of Energy, Energy Efficiency & Renewable Energy ; 2012 Wind Technologies Market Report, August 2013, voir ce lien (pdf)