Fin du conflit chez Kronos Canada

2013/11/22 | Par Maude Messier

« Le blitz de négociations entamé le 13 novembre dernier à Montréal avec les dirigeants de Dallas a assurément permis de faire déboucher les choses », d’expliquer le porte-parole du Syndicat national des employé(e)s de Kronos Canada (CSN), François Morin.

Les quelque 320 syndiqués ont entériné, mercredi soir, à 70,8% l’entente de principe intervenue entre les parties en début de semaine, mettant ainsi fin à un conflit de travail qui durait depuis plus de cinq mois.

Joint ce jeudi par l’aut’journal, François Morin était visiblement soulagé. Un blitz qui n’aurait pas débouché sur une entente aurait pu avoir un effet démobilisateur sur le moral des syndiqués à la rue, spécialement à l’approche de la période des Fêtes.

« Oui, ça aurait été difficile, mais on n’avait pas peur de ça. La solidarité et la mobilisation de nos membres étaient vraiment solides. »

Il fait valoir que c’est la volonté de régler de l’employeur a permis de dénouer l’impasse par la négociation. De l’avis du syndicat et de la Fédération de l’industrie manufacturière-CSN à laquelle il est affilié, les appuis d’organisations syndicales d’ici et à l’international de même que les soutiens financiers reçus ont pesé dans le rapport de force. « Ils ont marqué le coup, tant dans le rapport de force du syndicat que pour le moral des troupes. »

La FIM a mis beaucoup d'énergie pour développer des alliances avec des syndicats représentant des employés de Kronos Worldwide ailleurs dans le monde, comme en Belgique, en Allemagne, en Norvège et en Louisiane. Les lock-outés ont aussi bénéficié de l’appui de IndustriALL global Union, qui regroupe 50 millions de travailleurs dans les secteurs minier, de l'énergie et de la manufacture dans 140 pays.

Rappelons que ce lock-out relève d’un litige autour de demandes patronales pour un recours accru à la sous-traitance, qui aurait pu mener à des pertes d’emplois allant jusqu’au tiers des emplois actuels, pour limiter la portée de l’accréditation syndicale et pour couper dans les libérations syndicales, minant ainsi directement la liberté d’action syndicale, selon M. Morin.

Les demandes patronales, visant spécifiquement le syndicat, constituaient un changement drastique compte tenu du fait que les deux dernières négociations s’étaient menées sans heurt majeur ni conflit.

L’entente qui sera en vigueur jusqu’au 15 juin 2018 prévoit que le recours à la sous-traitance ne pourra entraîner de mises à pied. « La sous-traitance de certains postes sera possible lorsque l’expertise interne n’est pas là. Pour nous, c’est clair que c’est une victoire majeure. C’était un point vraiment important pour maintenir et protéger les emplois à l’usine de Varennes. »

Il y aura aussi mise en place d'un programme de formation pour permettre aux salariés qui le désirent d'occuper d'autres postes ou fonctions dans l'usine.

Alors que l’employeur réclamait que cinq postes soient exclus de l’accréditation syndicale pour être reclassés en postes cadres, cette demande est finalement tombée et l’accréditation sera maintenue intégralement.

La question de la liberté d’action syndicale préoccupait grandement François Morin, qui en faisait état dans une entrevue accordé antérieurement, en plein conflit. Il expliquait alors que l’employeur voulait restreindre les libérations syndicales accordées pour le représentant syndical et le représentant en santé et sécurité.

Les libérations seront finalement maintenues, sous la forme d’une banque d’heures équivalant deux postes à temps complet.


Au chapitre des salaires, pour la première année, les syndiqués bénéficieront d’une hausse rétroactive équivalente à l'indice des prix à la consommation (IPC), assortie d'un montant forfaitaire de 1000 $. Pour les quatre années suivantes, les hausses atteindront l'IPC plus un ajout de 0,5 %.

Si le régime d’assurance collective et d’assurance-vie est maintenu dans sa totalité, pour les employés actifs comme pour les retraités, l’entente constitue toutefois un point tournant pour le régime de retraite.

Le régime actuel à prestations déterminées sera arrêté dès le 31 décembre prochain et remplacé par un régime à cotisations déterminées en 2014 et ce, pour l’ensemble des employés.

Cette modification affectera l’ensemble des employés et non pas seulement une partie des travailleurs, souligne François Morin. « La part de l’employeur s’établira à 7,5% au terme de la convention, mais nous avons obtenu déjà une garantie qu’elle passera à 8% et à 11% pour la prochaine négociation. »

Enfin, le protocole de retour au travail convenu entre le comité de négociation et la partie patronale prévoit la mise en place d'un programme de retraites anticipées sans pénalités et de départs volontaires, assorti de primes de séparation. Des quelques 320 postes syndiqués, 39 seront affectés par une restructuration, « dont la majorité par des départs à la retraite, anticipés ou facilités. »

La reprise des activités de l'usine s'étalera sur plusieurs semaines à compter du 13 décembre jusqu'au début de février 2014.

Rappelons que les syndiqués ont été mis à la rue le 13 juin dernier, soit deux jours avant l’échéance de leur convention collective, ce qui en faisait un lock-out illégal selon la partie syndicale. L’entente entérinée cette semaine dispose d’ailleurs des griefs déposés par le syndicat et la CSN dans ce dossier.