Jour 1 du 64e Congrès de la CSN 

2014/05/27 | Par Maude Messier

« Le syndicalisme traverse une crise. (…) L’appel au renouveau syndical et les propositions qui seront mises en débat au cours de ce congrès expriment une volonté d’inventer un autre modèle. Ils réaffirment aussi la pertinence du syndicalisme », a déclaré le président de la CSN, Jacques Létourneau, en ouverture du 64e Congrès de la Confédération des syndicats nationaux ce lundi.

Jacques Létourneau a souligné que cette crise est avant tout celle d’un certain type de syndicalisme, construit au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Un syndicalisme basé sur les emplois permanents, stables et à prédominance masculine, principalement au sein d’entreprises manufacturières.

« Ce monde n’existe plus depuis longtemps, mais plusieurs de nos pratiques et surtout de nos lois du travail s’en inspirent encore. »

Plus de 2 400 délégués syndicaux de la CSN sont rassemblés jusqu’à vendredi au Centre des congrès de Québec.

Devant la montée de la droite, du populisme, des attaques contre le syndicalisme, des mesures d’austérité budgétaire et de la croissance des inégalités économiques et sociales, le leader syndical a ouvert le congrès de cette semaine dans une perspective d’offensive.

Avec le retour du Parti libéral au pouvoir à Québec, l’agenda anti-travailleurs des conservateurs à Ottawa et la radicalisation d’une frange du patronat, nul doute que le mouvement syndical québécois se trouve à un moment charnière de son histoire.

À la CSN, comme pour nombre d’organisations syndicales, le constat est clair quant à la nécessité de renouveler le contact avec les membres, de revoir les modes de communication et de reprendre le terrain du discours politique.

C’était d’ailleurs l’objectif de la campagne « Et si on avançait » l’automne dernier, qui a connu des résultats mitigés, a indiqué Jacques Létourneau, mais qui a tout de même permis de cerner l’intérêt des travailleurs pour les questions politiques et sociales. Une initiative de laquelle la CSN doit s’inspirer, dit-il, pour poursuivre le dialogue sur la nécessité de défendre une vision progressiste de la société.

Au cours de la semaine, les délégués débattront d’une quinzaine de propositions, essentiellement regroupées en deux thèmes : travail et emploi (sécurité du revenu tout au long de la vie, la qualité des emplois, la sous-traitance, les enjeux environnementaux en milieux de travail) ainsi que syndicalisme et rapport de force (modernisation des dispositions anti-briseurs de grève, prendre l’offensive en syndicalisation, défendre les travailleurs atypiques et précaire, élargir l’adhésion à la CSN et redynamiser la démocratie syndicale).

En somme, ce qui se dégage de cette première journée, c’est que le statu quo n’est pas possible pour la CSN, comme pour le mouvement syndical dans son ensemble. Au contraire, la CSN s’engage dans la voie du renouveau et de la construction d’un nouveau rapport de force syndical, revampé et adapté aux couleurs du monde du travail actuel et en fonction des besoins de ses travailleurs. Une orientation nette qui a été accueillie chaudement par le plancher du congrès lundi, à en juger par l’enthousiasme des réactions dans la salle.

Des élections aux six postes de l’exécutif de la centrale doivent aussi avoir lieu cette semaine. Le premier tour est prévu jeudi. Les mises en candidature se termineront mercredi à midi, mais au moment d’écrire ces lignes, une seule lutte est à prévoir pour le poste de la troisième vice-présidence. L’actuelle secrétaire générale du Conseil central du Montréal métropolitain, Véronique De Sève, affrontera aux suffrages la présidente du Conseil central de Québec–Chaudière-Appalaches, Ann Gingras.

En ouverture du congrès, l’historien et dramaturge Jean-Claude Germain a campé les luttes et les gains du mouvement syndical comme moteurs de l’évolution du Québec et de la Révolution tranquille, rappelant que les seuls à « s’être tenus debouts » pendant la période de la grande noirceur au Québec, ce sont les travailleurs.

« Pour confondre la langue du profit, les travailleurs et les travailleuses ont dû parler une autre langue qui traverse le temps, la langue de la solidarité. Une langue qui a souvent eut besoin de faire appel à une autre grammaire pour bien se faire comprendre. La grève a souvent été plus utile pour clarifier le sens des mots. »

« Les syndicats existent grâce aux gains qu’ils sont capables d’obtenir. Le maintien des acquis n’est pas un objectif qui peut propulser le mouvement vers l’avant. Vous ne pouvez pas seulement bloquer les attaques; vous ne mobiliserez pas une nouvelle génération autour de ça, a souligné Miriam Fahmy, directrice de la recherche et des publications à l’Institut du Nouveau Monde.

« Il vous faut décrire la société dans laquelle vous voulez vivre, présenter une autre vérité et démontrer qu’elle est possible. (…) Vous avez le pouvoir de donner une voix à ceux qu’on veut faire taire, le pouvoir d’améliorer la vie de ceux que l’on veut diminuer, le pouvoir de donner à tous le pouvoir de maitriser leurs destins. Vous avez tout ce qu’il faut pour réussir. Soyez exigeants. »

Événement central dans la vie démocratique d’une organisation syndicale, le congrès permettra aux délégués de débattre d’enjeux d’importance et d’influer sur les orientations de leur centrale. « Nous prendrons des décisions qui guideront nos actions au cours des prochaines années. Je souhaite que nos discussions soient fructueuses et, surtout, que chacun y trouve sa place », de lancer Jacques Létourneau.


La CSN représente 325 000 membres.

Pour suivre les activités du 64e Congrès :ici.