Au lendemain de la manifestation du 29 novembre, il ne faut pas laisser la braise s’éteindre

2014/12/01 | Par Paul de Bellefeuille

La manifestation du 29 novembre, Refusons l’austérité, fut un franc succès. Celui-ci s’est concrétisé par une participation de plus de 125,000 personnes dans les villes de Québec et de Montréal. Mais derrière cette participation de masse se profilent plusieurs organisations qui ont mis l’épaule à la roue.

La déclaration «  Pour préserver la société québécoise de la destruction, nous refusons l’austérité » identifie les trente-cinq groupes qui l’ont signée. Ce sont donc ces différentes organisations des milieux syndical, communautaire, étudiant, féministe et écologiste qui ont réussi, ensemble et dans chacun de leur milieu, à se mobiliser pour faire de la manifestation une grande réussite.

Évidemment on pourrait s’asseoir sur nos lauriers et croire que le gouvernement Couillard aura compris que sa politique d’austérité ne passe pas au sein de la population et qu’en conséquence le premier ministre va opérer les changements qui s’imposent dans sa gouvernance idéologique fondée sur le principe d’austérité.

Il ne faut pas se bercer d’illusions. Le gouvernement est déjà trop avancé sur le chemin de la privatisation et de la tarification des services publics pour reculer aussi facilement. Il en faudra beaucoup plus pour prendre collectivement notre place dans cette rénovation d’un État du XXIe siècle.

Le ministre Coiteux n’a pas reçu le mandat de le faire seul et il faudra bien le lui faire comprendre. Ce gouvernement n’a pas le mandat de faire une telle révolution conservatrice même sous le faux prétexte d’assainir les finances publiques.

Gouverner, une fois élu, cela ne se fait pas seul. Les forces sociales continuent d’exister démocratiquement et leur consultation en ce début de XXIe siècle, n’en déplaise au ministre Coiteux, s’avère être un passage obligé.

Les signataires de la déclaration constituent l’embryon d’une puissance sociale apte à faire comprendre au gouvernement qu’il ne peut dorénavant se croire tout permis dans sa gestion de l’État. La société aura l’État qui lui permettra de s’épanouir tant individuellement que collectivement.

Mais, pour cela, cette société doit être consultée et écoutée afin que l’État réponde à ses besoins légitimes. L’État n’est pas la propriété d’une caste qui saurait mieux que quiconque ce qui est bien et bon pour la collectivité. Il est l’instrument nécessaire au mieux- vivre ensemble.

L’État est au centre d’un rapport de force entre différents acteurs qui tentent de lui donner une direction plus ou moins conforme à ses intérêts. La manifestation du 29 novembre est l’expression et l’émergence d’un nouvel acteur social venu de différents horizons.

Cet acteur a trouvé son unité autour d’un refus, celui de l’austérité. Son principal défi est maintenant de renforcer cette unité et de ne pas perdre l’élan donné par la manifestation du 29 novembre.

Ne pas laisser la braise s’éteindre

Les décisions impopulaires du gouvernement Couillard , relayées par les différents médias, ont certes contribué à la mobilisation. Il faut maintenant garder chaudes les braises de la contestation et de la résistance jusqu’à la prochaine action contre les politiques d’austérité de ce gouvernement.

Les grands médias, on le sait, ont l’habitude de chasser rapidement une nouvelle par une autre. Il est donc nécessaire de poursuivre le travail d’éducation et de mobilisation, en préparation d’une prochaine action d’éclat, dans chacun des milieux des signataires de cette déclaration.

Oui, mais comment me direz-vous? Comment maintenir bien au chaud l’étincelle de la résistance et de la révolte?

Il faut établir une structure souple d’institutionnalisation du nouvel acteur identifié. J’utilise sciemment le mot souple, car cette structure ne doit pas être dominée par un ou des acteurs, par définition, mieux équipés comme le sont les grands syndicats en comparaison de groupes identifiés au milieu communautaire.

Le SISP (Secrétariat intersyndical des services publics) pourrait certainement servir d’exemple à suivre. Les syndicats membres défendent prioritairement les services publics, mais s’unissent aussi lors de la négociation pour le renouvellement des conventions collectives et font partie du Front commun.

Cette nouvelle organisation syndicale a su établir des consensus autour de la défense des services publics. Elle s’est dotée de statuts et d’un bureau permanent dont les coûts sont partagés par chacune des organisations.

Il serait certainement intéressant de réfléchir à structurer le mouvement contre l’austérité autour de l’éducation politique et de la mobilisation sur une base plus stable et ce en fonction d’une stratégie à plus long terme.

Les différents groupes signataires de la déclaration pourraient développer une structure d’éducation politique afin de communiquer un autre discours auprès de leurs membres et de la population en général.

De même, la mobilisation pourrait se construire par l’établissement d’un état major à la mobilisation composé de différents représentants des organisations signataires de la Déclaration. Nous sommes en guerre contre l’austérité. Il faut donc se gouverner en conséquence.

Il ne faut pas verser dans l’angélisme. Ce n’est que par une lutte constante et organisée que nous parviendrons à faire valoir nos droits à une société plus juste et plus égalitaire.


Références :

SISP (Secrétariat intersyndical des services publics) http://sisp.qc.net/

Déclaration : Pour préserver la société québécoise de la destruction, nous refusons l’austérité

http://refusonslausterite.org/site/?p=332


Photo : CSQ