Déportation possible de milliers de personnes vers Haïti et le Zimbabwe

2014/12/05 | Par Solidarité Sans Frontières

Lundi dernier, le gouvernement canadien a annoncé la fin du moratoire sur les déportations vers Haïti et le Zimbabwe, ce qui expose au moins 3500 personnes à la cruauté d’un renvoi potentiel dans les prochaines années, ou même plus tôt. La plupart de ces individus et familles vivent dans la région de Montréal.

(La déclaration conjointe de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) et de Citoyenneté et Immigration Canada (CIC) peut être consultée ici :http://nouvelles.gc.ca/web/article-fr.do?nid=910599)

Solidarité Sans Frontières, un réseau de justice migrante actif à Montréal dans les 10 dernières années, dénonce les actions du gouvernement envers les migrants haïtiens et zimbabwéens vivant au Canada. Nous réitérons notre revendication centrale : que tous les migrants et migrantes au Canada soient régularisés. Par régularisation, nous entendons un programme inclusif et continu permettant à toutes les personnes migrantes d’obtenir un statut de résidence complet, ainsi que l’accès à l’ensemble des services et au respect de tous leurs droits.

(Notre revendication pour la régularisation est enracinée dans les principes concernant la régularisation suivants, définis il y a plus de dix and lors de la Status Conference à Toronto :www.solidarityacrossborders.org/fr/principles-for-a-regularization-program-in-canada)

Afin de construire une Cité Sans Frontière où l’on se supporte mutuellement en tant que membres d’une communauté partagée, et où l’on refuse d’être complice de la division et de la marginalisation, nous appelons à l’inclusion et à l’accueil de toutes les personnes migrantes à Montréal,  particulièrement celles d’origine haïtienne ou zimbabwéenne qui font maintenant face au renvoi. Nous nous déclarons solidaires et offrons notre support aux efforts communautaires visant à résister aux déportations.

(Vous pouvez en apprendre plus sur le concept de Cité Sans Frontière ici :www.solidarityacrossborders.org/fr/solidarity-city)

Solidarité Sans Frontières est critique des mesures spécifiques qui ont été introduites par le gouvernement canadien pour les demandeurs et demandeuses d’asile qui étaient auparavant protégés de la déportation par le moratoire. Plutôt que de procéder au cas par cas via des demandes de résidence permanente pour motif humanitaire – un processus long et coûteux -, il devrait y avoir une solution collective permettant aux Haïtiens et aux Zimbabwéens qui vivent à Montréal d’obtenir un statut et la régularisation. Par exemple, avec le plan gouvernemental, il en coûtera 550$ à chaque adulte pour présenter une demande humanitaire, ce qui exclura d’emblée de nombreux individus aux revenus modestes. Le plan du gouvernement équivaut à soutirer de l’argent de personnes migrantes précaires, sans garanti qu’elles obtiendront un statut à la fin du processus.

Nous sommes également critiques de l’insistance de la part de certaines ONG comme quoi seuls les demandeurs et demandeuses d’asile qui vivent ici depuis au moins trois ans devraient être autorisés à rester. Nous supportons l’octroi d’un statut complet à toutes les personnes migrantes, incluant celles qui vivent au Canada depuis moins de 3 ans. Nous ne devrions pas être complices de la création des fausses catégories des migrants « méritants » ou  « non méritants ».

Nous voulons souligner notre opposition à la double peine pour les individus ayant un dossier criminel, ce qui représentera un frein à l’obtention d’un statut pour certaines personnes qui étaient protégées par le moratoire. Les personnes ayant un dossier criminel ne devraient pas être discriminées dans leurs tentatives d’obtenir un statut permanent au Canada, et la réalité de la double peine devrait être reconnue et prise en compte afin de construire un mouvement réellement populaire de résistance aux déportations.

Essentiellement, le plan gouvernemental encourage les divisions dans la communauté et perpétue la marginalisation et l’isolement; Solidarité Sans Frontières se lève plutôt pour la solidarité et le support entre les individus et les communautés.

Montréal a une histoire forte de personnes migrantes sans statut qui résistent aux déportations, que ce soit comme individu ou comme famille, ou via des efforts collectifs. Nous souhaitons rappeler l’inspirante organisation du Comité des sans-statuts algériens après que le moratoire sur les renvois vers l’Algérie ait été levé en 2002, ainsi qui les plus récents efforts de résistance aux déportations par des personnes migrantes mexicaines, roms, et bien d’autres.

Face à la peur, l’isolement, la précarité et la division, Solidarité Sans Frontières riposte avec la solidarité, l’entraide mutuelle et l’action directe.