Anti-syndicalisme : de Harper au trio Couillard-Coderre-Labeaume

2016/03/24 | Par Pierre Dubuc

C’est avec un énorme soupir de soulagement que les syndicalistes ont accueilli la défaite du gouvernement Harper. Ses lois sur la « transparence syndicale », le vote obligatoire et la remise en question de la formule Rand attaquaient les bases mêmes du mouvement syndical.

Mais, en cette ère néolibérale, une menace est à peine écartée que, déjà, une autre surgit. Et cette nouvelle menace est aussi dévastatrice, sinon plus que les lois Harper.

 

Rappelons brièvement les faits.

Le 29 septembre 2015, le gouvernement Couillard a signé un Accord de partenariat avec l’Union des municipalités. Les municipalités acceptaient une réduction temporaire de 320 millions $ de leurs revenus dans ce pacte fiscal avec le gouvernement du Québec.

En échange, le ministre des Affaires municipales de l’époque, Pierre Moreau, et le premier ministre Couillard ont promis aux municipalités de déposer un projet de loi, qui leur permettra de pouvoir décréter les conditions de travail des policiers, pompiers, cols blancs et cols bleus, dont les 31 500 employés municipaux du Conseil provincial du secteur municipal, répartis dans 286 sections locales à travers le Québec.

Le premier ministre Couillard a déclaré qu'il était « justifié d'intervenir pour modifier le rapport de force dans les relations de travail au sein des municipalités ».

Et il est vrai que ce « rapport de force » sera drôlement modifié! Les parties syndicale et patronale vont pouvoir continuer à « négocier », mais au terme d’une période de négociation, les maires pourront décréter unilatéralement leurs conditions de travail. Les modalités de cette « négociation » seront précisées dans un projet de loi qui doit être déposé au mois de mai.

Le maire Labeaume a qualifié cette promesse de « révolutionnaire ». Son comparse de Montréal, le maire Coderre, a salué la proposition par ces mots : « Ça donne des marges de manœuvre ». En fait, plus que des « marges de manœuvre »! Les élus municipaux seront juges et parties!

Rappelons que cette future loi sur le pacte fiscal fait suite à la loi forçant le partage à parts égales des coûts des régimes de retraite des employés municipaux.

 

De la Reine aux roitelets

En 1962, le premier ministre Jean Lesage avait repoussé du revers de la main le droit à la syndicalisation des fonctionnaires par ces mots devenus célèbres : « La Reine ne négocie pas avec ses sujets ».

Ce n’est qu’après de nombreuses manifestations, de multiples grèves illégales et la menace d’une grève générale que le gouvernement Lesage adoptera le 22 juillet 1964 un nouveau Code du travail qui reconnaissait, entre autres, le droit de grève aux employés des hôpitaux, des commissions scolaires et des municipalités.

Hier, c’était la Reine qui ne voulait pas négocier avec ses sujets. Aujourd’hui, ce sont les roitelets Labeaume et Coderre.

Comme dans le cas des lois antisyndicales du gouvernement Harper, la riposte syndicale s’organise. Elle déborde largement le cadre des employés municipaux, car il est clair qu’on peut prévoir, si elle est adoptée, son application éventuelle aux autres employés du secteur public.

Une pétition a été déposée sur le site de l’Assemblée nationale. Elle demande au gouvernement du Québec :

  • De refuser de donner aux élus municipaux le pouvoir de décréter les conditions de travail de leurs propres employés, puisque même par l’intermédiaire d’un médiateur, la Ville serait juge et partie;

  • De s’assurer que ce pouvoir exceptionnel demeure la prérogative exclusive du gouvernement du Québec.

Nous vous invitons fortement à la signer à l’adresse suivante :

https://www.assnat.qc.ca/fr/exprimez-votre-opinion/petition/Petition-5901/index.html

 

Photo : PC