Cloutier : clairement le pire des candidats à la chefferie du PQ

2016/09/27 | Par André Parizeau

À l'occasion du 2e débat public organisé dans le cadre de la course à la chefferie, au sein du PQ, et qui se tenait hier, le candidat Alexandre Cloutier a démontré non pas juste une fois, mais au moins 2 fois à quel point son éventuelle accession à la position de chef du principal parti souverainiste, non seulement serait une erreur, mais pourrait même être catastrophique, autant pour le parti que pour l'ensemble du mouvement souverainiste.

Alexandre Cloutier a beau dire pouvoir compter sur l'appui du plus grand nombre de députés ainsi que sur un grand nombre de militants et de militantes. Il a beau vouloir jouer sur sa jeunesse, mais les politiques qu'il prône serait un désastre dans le cas où il deviendrait chef, et plus cette course avance et plus cela devient de plus en plus évident. 

Avant d'aller plus loin, il serait sans doute bon de clarifier d'entrée de jeu un certain de choses.

Madame Martine Ouellet est clairement celle qui, au niveau des idées et des politiques mises de l'avant, dans le cadre de cette course à la chefferie, est la meilleure.  Cela est hors de tout doute.

Ces propos sont en même temps clairs et sans détour.  Il n'y a pas d'ambiguités et on sait avec elle ce à quoi s'attendre.  Elle a également su démontrer, au fil des derniers mois, non seulement une patience, mais aussi un courage et une capacité de résillence qui pousse au respect.  Cela ajoute au sérieux de sa campagne. Reste à voir combien de votes elle pourra finalement avoir.  Les médias la donne perdante, mais -- il faut le rappeler --, rien n'est toujours réglé et tout pourrait encore arriver.

Du point de vue du premier choix, elle mériterait un maximum de voix et il faut espérer que cela se produira effectivement.  Reste une autre question plus délicate, soit celle de savoir ce que pourait être un 2e choix, à supposé d'envisager évidemment la possiblité d'en faire un.  

En tant que membre du PQ, ce que je suis moi-même depuis déjà un certain temps, c'est une question que je ne peux en même temps escamoter et j'imagine que cela doit aussi être le cas pour bien d'autres personnes penchant également pour Martine Ouellet.  Je ne vous dirai pas quoi faire, mais voici néanmoins quelques unes de mes propres réflexions.

Commençons avec Jean-François Lisée.  La plupart des critiques, qui ont pu s'accumuler au fil des semaines contre Jean-François Lisée, sont très largement justifiées car au delà des beaux discours -- il peut effectivement exceller quand il s'agit de débattre -- ses positions sont plutôt pleines de contradictions, et manquent souvent de cohérence, en plus d'être par bout beaucoup trop timides.  

C'est en plus sans parler de cette position consistant à reporter la démarche vers l'indépendance dans un 2e mandat, laquelle proposition comporte également de nombreux problèmes.  Cela s'ajoute finalement avec un personnage assez " spécial " et qui peut aussi devenir rebutant tellement il a tendance à se prendre pour un autre.

Les critiques de la SSJB vis à vis des positions de monsieur Lisée en matière de la langue et de la nécessité de mieux protéger le français, sont bien méritées.  Même chose pour les nombreuses autres critiques faites par quelqu'un comme Pierre Dubuc, de l'aut'journal, touchant à nouveau le dossier de langue, mais aussi une foule d'autres questions.

Mais justement, et parlant du dossier plus spécifiquement de la langue, les propos d'Alexandre Cloutier, tenus hier, sur ce même sujet, étaient une véritable honte et la salle a parfaitement eu raison de le huer ensuite.

À ce point-ci, il pourrait être utile d'aller un peu plus loin dans l'analyse de ce qui est en train de se passer au niveau des autres concurrents, que ce soit au niveau de Lisée ou de Cloutier.

Oser dire, comme Cloutier l'a fait hier, qu'un gouvernement du Parti québécois n'aurait pas le choix, dans le cadre du nécessaire combat pour mieux protéger le français, et en attendant l'avénement de l'indépendance, que de respecter le cadre légal imposé par les autorités fédérales et la Cour suprême, et ne pourrait donc pas revenir à une application plus stricte de la loi 101, telle que le propose Martine Ouellet, était carrément scandaleux.

Tout aussi scandaleux était le fait pour Alexandre Cloutier d'oser dire que, lui, s'objecterait également au recours à la clause nonobstant.  Voulait-il dire que cela ne serait pas assez " fair play " pour lui ?  Il n'a pas explicité.  

Tout cela symbolise probablement mieux que n'importe quoi d'autre les dérapages à répétition qui sont en train de se produire du côté de la campagne de Cloutier.

De voir ainsi un aspirant à la chefferie du PQ même pas être capable de même imaginer s'opposer ainsi au pouvoir fédéral ne peut que nous laisser songeur quant à sa capacité future à diriger la lutte pour l'indépendance du Québec, un combat qui risque d'être autrement plus difficile et complexe que de simplement utiliser à un moment donné la clause nonobstant.

Est-ce que ce même combat pour l'indépendance n'exigera pas justement, y compris dans ses premières phases, de justement multipier les gestes de rupture, dans le cadre d'une feuille de route bien établie ?  Tout cela fait vraiment dur.  On comprend plus pourquoi Alexandre Cloutier, du reste, hésite toujours à expliciter sa propre vision de ce que devrait être cette fameuse feuille de route.

Il aura beau se réfugier derrière cet argument voulant qu'il voudrait d'abord et avant tout laisser la base s'exprimer sur le sujet avant que lui-même se positionner, mais cela ne convaincra pas grand monde.  Surtout pas maintenant.

Je me demande en même temps ce que Cloutier pense de cette autre proposition en provenance de Martine Ouellet, toujours, et qui consisterait pour tous les futurs députés du PQ à refuser de prêter désormais allégeance à la reine d'Angleterre.  Sûrement qu'il doit aussi trouver cela un peu trop " radical ".

Le pire, en même temps, réside dans le fait que là ne s'arrête pas les surprises avec Alexandre Cloutier.  Hier, les autres grands volets des questions plus identitaires étaient aussi à l'ordre du jour, y compris toute la question du port des signes religieux et la nécessité ou non d'exiger que tous les services publics puissent être donnés et demandés à visage découvert.  On fait ici référence au fait de permettre ou non le port de la burqua ou du niqab.

Au Québec, cette question de la burqua et du niqab, fait déjà l'objet d'un assez large consensus.  Et pourtant ... hier, en entendant Alexandre Cloutier parler sur le sujet, on croyait presque se retrouver devant Thomas Mulcair ou Justin Trudeau, tellement cela paraissait une fois encore déconnecté.  Alexandre Cloutier disait vouloir éviter d'ajouter plus d'huile sur le feu d'un sujet autour duquel il y aurait encore beaucoup trop de " fractures ".

Cette référence au sujet de ces " fractures " se voulait une pointe contre Jean-François et ce qu'il propose lui-même à ce sujet, notament en ce qui a trait au fait de restreindre le port de signes religieux dans la fonction publique; remarquez que ce que ce dernier propose à ce sujet demeure justement plutôt " modéré ".  

Qu'à cela ne tienne, pour Cloutier, ce serait encore trop. Après que Jean-François Lisée ait suggéré qu'il serait bien qu'une position minimale, sur la burqua et le niqab, puisse au moins, et de manière unanime, être adoptée par l'Assemblée nationale, question de voir en même temps ce que le Fédéral ferait après, il en rajouta encore en disant vouloir malgré tout rester loin de tous ces histoires.

Mais de quel clivage ou fracture parlait-t-il donc, surtout quand on discute du dossier de la burqua et du niqab, et quand on sait que presque tout le monde, au Québec, abonde dans le sens d'un plus grand contrôle à cet égard ?  Et comment conçoit-il alors son röle de chef éventuel du PQ, y compris sur ces sujets ?  Se voit-il déjà à la remorque des Libéraux provinciaux et fédéraux?

L'attitude d'Alexandre Cloutier, plutôt dans la semaine, alors qu'il n'avait pas non plus hésité à mettre, devant les médias, encore plus d'huile sur le feu face aux tensions pouvant toujours exister au sein du caucus de députés-es du PQ, autour de la course, tout en faisant état de ce qui aurait pu se passer dans un réunion de caucus (à laquelle il n'était de toutes les manières même pas présent), toujours dans le but d'essayer de pousser les autres personnes candidates dans un coin, tout cela rajoute au fait que cet homme n'a décidément pas la trempe d'un éventuel chef de parti. Quel chef agirait d'ailleurs ainsi ?

Son attitude dans cette autre affaire était pas mal plus problématique, soit dit en passant que ce que Jean-François Lisée aurait pu ou non dire pour sa part, toujours lors de cette fameuse réunion de caucus.

En bout de ligne, la candidature d'Alexandre Cloutier est clairement encore pire que celle de Lisée.  Faudrait-il conséquemment prévoir, pour les supporteurs de Martine Ouellet, la possibilité d'un 2e choix, au cas où cette dernière ne serait pas capable d'aller chercher suffisamment de voix pour se positionner parmi les deux premiers ?  C'est un pensez-y-bien.  

Chose certaine, il faudrait au moins espérer que ceux et celles qui penchent encore pour Jean-François Lisée auront la clairvoyance minimum de mettre le nom de madame Ouellet comme 2e choix.  Idéalement, il devrait prendre le temps de regarder avec plus d'attention encore le programme proposé par Martine Ouellet et son équipe.

Quant à ceux et celles qui, au sein du PQ, pensaient encore jusqu'à récemment peut-être voter pour Alexandre Cloutier, ils et elles devraient très certainement plus réfléchir à leur choix, car plus cela va et plus un tel appui devrait être vu comme étant plus que problématique.  Eux aussi pourraient en même temps plus regarder du côté de Martine Ouellet.

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Le fait de ne pas parler du 4e candidat en lice dans cette course à la chefferie, soit Paul Saint-Pierre Plamondon est intentionnel.  Sa candidature n'est pas vraiment sérieuse.