Rencontre instructive lors d’une promenade au Parc du Bois-de-Coulonge

2016/10/18 | Par Paul de Bellefeuille

Le Parc du Bois-de-Coulonge, sur Grande Allée à Québec, est un lieu magnifique pour une balade d’automne et en toutes saisons. C’est aussi un lieu pour des rencontres inattendues avec l’Histoire. Cet espace fut autrefois le lieu où le Lieutenant-gouverneur habitait en compagnie de ses employés. Une immense maison y logeait plus de trente employés qui s’occupaient, entre autres de l’entretien des jardins, mais aussi de préparer les repas pour la tête couronnée du lieu, de sa suite et de ses illustres invités. Cette demeure fut détruite par le feu le 20 février 1966.

Il y a l’Histoire qui s’écrit, mais il y a aussi celle qui se vit. Je fus à même d’en faire l’expérience par ma rencontre avec un couple qui avait travaillé en ces lieux. L’homme, d’un âge plus que respectable, m’expliquait qu’à l’époque il s’occupait de la gestion des cuisines. Il m’identifia, sur la maquette reproduisant la maison du maître des lieux, la chambre qu’il occupait. Il me dit aussi que les cèdres qui longeaient un des murs de l’édifice avaient été épargnés par le feu et qu’ils étaient toujours debout.

Je lui demandai pourquoi cette maison n’avait pas été reconstruite après l’incendie. Il eut cette réponse absolument suave : Aujourd’hui, tout comme hier, « un chum c’est un chum ». La maison du Lieutenant-gouverneur fut reconstruite, mais sur le chemin St-Louis, me dit-il. J’en conclus qu’à l’époque un ami avait certainement un terrain qui ne demandait qu’à être vendu au gouvernement.

Ce fonctionnaire de SA majesté poursuivit sa carrière pour le gouvernement en s’occupant, entre autres, de la gestion des cuisines de l’Assemblée nationale.

Mais l’histoire ne se termine pas là. Sa femme, qui l’accompagnait lors de sa promenade au Bois-de- Coulonge, avait également travaillé en ces lieux. C’est d’ailleurs là qu’ils se rencontrèrent. Toutefois, son destin prit un tournant inattendu lorsqu’elle tomba enceinte de son premier enfant. Elle tint à me préciser qu’ils étaient mariés lorsque l’événement se produisit. Elle fut congédiée, me dit-elle, lorsque manifestement elle ne put cacher bien longtemps l’heureux événement. Eh oui! À l’époque, dans les années 50 et au début des années 60, une fonctionnaire, même à l’emploi du Lieutenant-Gouverneur, ne pouvait garder son emploi lorsqu’elle tombait enceinte.

Elle était fière d’avoir travaillé à cet endroit, mais je sentis par le ton de sa voix qu’elle gardait un souvenir amer d’avoir été congédiée parce qu’elle était enceinte. Cet événement nous montre tout le chemin parcouru par les femmes vers leur libération du carcan domestique. Et qu’il reste encore du chemin à parcourir quand on voit comment le gouvernement Couillard menace l’accès des femmes au marché du travail par ses coupures dans le réseau des CPE (Centre de la petite enfance).*

Le Parc du Bois-de-Coulonge est aujourd’hui démocratisé. On peut s’y balader gratuitement, y admirer le fleuve et, qui sait, y faire des rencontres historiques.

Référence : Parc du Bois-de-Coulonge, 1215, Grande Allée, Ouest, Québec