9 décembre 2015 : la plus grande grève de l’histoire du Québec ?

2016/12/05 | Par Louis Gill

L’auteur est économiste, professeur retraité de l’UQAM

Dans le Discours du président présenté au 31e Congrès de la FTQ (tenu à Montréal du 28 novembre au 2 décembre 2016), on lit :

Au terme d’une grève tournante touchant toutes les régions du Québec, plus de 400 000 personnes ont débrayé le 9 décembre 2015 pour prendre part à la plus grande grève de l’histoire du Québec.

Sans vouloir minimiser l’ampleur de cette grève qui a été menée par un nombre imposant de syndiqués même si elle a été sans éclats et n’a duré que quelques heures, il est pour le moins excessif de la présenter comme la plus grande grève de l’histoire du Québec.

À des fins de comparaison et aussi pour l’information à offrir à la relève militante, rappelons la grève générale de 1972 des employés des secteurs public et parapublic après la condamnation des présidents des trois centrales syndicales, Louis Laberge, Marcel Pepin et Yvon Charbonneau, à des peines de prison pour avoir défié une injonction.

Non seulement cette grève avait-elle duré plusieurs jours, mais elle avait largement débordé le noyau des 210 000 syndiqués à l’origine du conflit en se transformant en une véritable grève politique avec la prise temporaire effective du pouvoir par les travailleurs dans des villes comme Saint-Jérôme, Baie-Comeau, Haute-Rive et Sept-Îles.

Plus près de nous, à l’automne 2003, devant l’imminence de l’adoption par le gouvernement de Jean Charest d’un ensemble de lois antisyndicales et antisociales, un puissant mouvement de protestation s’est manifesté à travers tout le Québec, mobilisant des centaines de milliers de personnes, syndiquées et non syndiqués, travailleurs, parents opposés à la hausse des frais de garde, etc., qui a donné lieu à des perturbations dans le milieu hospitalier et dans le transport en commun à Montréal et à Québec, ainsi qu’à des fermetures de ports, à Montréal, Québec et Trois-Rivières, et de routes d’importance stratégique comme la 175 qui traverse le parc des Laurentides, coupant littéralement des régions entières des grands centres, etc.

S’il faut se réjouir de développements positifs sur le plan de la mobilisation syndicale, la prudence et la mesure sont toujours de mise dans le choix des qualificatifs destinés à les décrire.