Que du pain et des roses

2016/12/05 | Par Kaven Cameron

Si les hommes et les femmes des mouvements contestataires des années 50 à 70 avaient su de quoi allait être fait la société des loisirs d'aujourd'hui qu'on leur avait promis, peut-être auraient-ils demandé un peu plus dans leur belle et grande chanson que du pain et des roses.

Mais ils sortirent dans la rue  et  du pain on leur mit pour qu'un peu plus ils se nourrissent, qu'un peu moins ils soient malades et qu'un peu plus vieux ils vivent.

Un peu à l'eau de rose, on agrémenta leur vie de quelques loisirs. La vie sembla donc belle pendant un instant, respectant le concept venu d'on ne sait où et voulant qu'une vie parfaite doive comporter huit heures de travail, huit heures de loisirs et huit heures de sommeil.

La suite de l'histoire est un peu plus floue, à savoir si ce fut la recette du  pain qui comporta un peu trop d'eau et qui se transforma en colle, ou si ce fut les trop nombreuses pétales de rose qui nous aveuglèrent. Quoi qu'il en soit, le système capitaliste, malgré la présence d'une certaine social-démocratie qui s'était installée, était bien toujours présent. Il en ressortit même de nouveaux riches.

Mais il en ressortit surtout de nouveaux pauvres où, dans ce double système, la distribution d'une très grande partie de la richesse fut oubliée. Les riches continuèrent donc d'acquérir un grand nombre de biens et de spéculations qui leur furent profitables et générèrent beaucoup d'argent aucunement distribué.

Pendant ce temps, l'argent des plus pauvres fut utilisé pour payer la social-démocratie que ces derniers avaient demandée, avec tous les services essentiels et les avantages sociaux que cela impliquait. Mais rien n'empêcha les riches d'utiliser ces services et de bénéficier de ces avantages même s'ils ne payaient pas leur juste part du gâteau.

Pas étonnant alors que, il n'y a même pas un an, Oxfam révéla que 1% de la planète détenait maintenant plus que 99% des autres habitants de cette Terre, tous réunis.

Ce fait se réalisa même un an plus tôt que leur prédiction, soit au début de 2015; 62 ultra-riches possédant plus que 3,6 milliards d'individus.

L'omniprésence du capitalisme sauvage qui se développa dans le monde nous amena à ces chiffres dérisoires en moins de 30 ans. L'avidité, elle, telle que nous la connaissons dans notre monde de consommation moderne, avait commencé bien avant; soit au début du XX siècle avec les débuts de la production de la Ford T. La folie perdura jusqu'à l'arrivée de la crise de 1929.

L'Homme, dans une amnésie totale, répéta la même histoire presque 80 ans plus tard dans un scénario presque identique et  sine die  auquel nous faisons toujours face aujourd'hui, incapable d'en sortir.

Mais le fardeau par rapport à cette crise, toujours présente, se fera peut-être encore plus imposant que celle qui eut lieu jadis, car le monde est maintenant bien plus complexe.

La mondialisation, monstre hybride avec de multiples connexions sur tous les continents, est à nos portes et s'apprête à toutes les sauces. Pendant ce temps, les médias nous vomissent les enjeux interplanétaires. Le tout vous est servi dans un bulletin des nouvelles d'une demi-heure, mais englouti par trois périodes de cinq minutes de publicités délirantes vous incitant à consommer avant même d'avoir fini de lire cette ligne.

C'est ainsi qu'entre le visionnement de la progression de l'envahissement de Mossoul pour l'oncle Sam et l'appât du gain de Moscou pour la Syrie, on vous glissera la publicité d'une compagnie aux  pratiques commerciales interfrontalières presque aussi questionnables que les belligérants entre lesquels cette annonce fut placée.

Heureusement, des groupes de défense des travailleurs firent leur apparition au travers ce passé pas si lointain et où, outre du pain et des roses, certains avaient pensé au beurre. Quelques bribes de lois en notre faveur, le tout étendu aux quatre coins de ce monde. Le rejet du traité commercial CETA par les Wallons et ses regroupements de travailleurs, même s'il ne fut que temporaire, en est un bon exemple.

La Terre entière entendit les injustices qui nous sont affligées un peu plus chaque jour. Les mondialistes n'avaient sans doute pas vu la soupe venir, servie avec la même recette qu'ils avaient concoctée.