Saluons la position de GND sur les écoles privées

2017/03/28 | Par Pierre Dubuc

Le Journal de Montréal du 27 mars rapporte que Gabriel Nadeau-Dubois a lancé sa  compagne pour l’élection partielle dans Gouin en identifiant l’éducation publique comme thème principal de sa campagne.

Lors de son assemblée d’investiture, il a scandé devant les 500 militants réunis à l’école Père-Marquette : « Il faut arrêter de financer les écoles privées avec l’argent public ».

Cette prise de position est confirmée par les tweets envoyés par le candidat de Québec Solidaire.

Nous saluons cette prise de position dont nous déplorions l’absence dans le rapport de la tournée « Faut qu’on se parle », colligé dans le livre « Ne renonçons à rien » (Lux éditeur) dans un récent article.

 

Et le PQ?

Cette position tranche avec celle mise de l’avant dans la Proposition principale du Parti Québécois pour son congrès de l’automne prochain et qui se lit comme suit :

« Obliger les écoles privées et les écoles publiques dotées de projets particuliers à accepter des élèves en difficulté ou handicapés et à les accompagner jusqu’à la diplomation ».

Cette proposition est un leurre, car on sait que la principale caractéristique des écoles privées est de pratiquer la sélection des élèves, précisément pour éviter la présence d’élèves en difficulté.

À son congrès de 2005, le Parti Québécois avait voté une proposition, parrainée par le SPQ Libre, qui prévoyait la diminution progressive des subventions publiques aux écoles privées.

Aux différentes instances et congrès suivants, les partisans de l’école privée ont manœuvré pour remplacer cette proposition par celle qui se trouve dans la Proposition principale, citée précédemment.

 

La sonnette d’alarme

Rappelons que le Conseil supérieur de l’éducation, dans son Rapport sur l’état et les besoins de l’éducation 2014-2016, publié l’automne dernier, avait tiré la sonnette d’alarme.

Avec la croissance du réseau des écoles privées, l’augmentation des projets particuliers et le nombre accru d’élèves en difficulté dans les classes ordinaires, « notre système scolaire, de plus en plus ségrégé, court le risque d’atteindre un point de bascule et de reculer sur l’équité », peut-on lire dans le Rapport.

Les données qui ont amené le CSE à prendre cette position sont à jeter par terre. Le nombre d’élèves qui fréquentent une école privée  a quadruplé depuis 1970 (21,5 % par rapport à 5,2 %). Cette proportion atteint 35 % en Estrie, 39 % à Montréal et 42 % à Québec!!!

De plus, le nombre d’élèves des écoles publiques inscrits dans des programmes particuliers au secondaire atteint 17,2 %. En dix, ans, la proportion d’élèves du réseau public déclarés en difficulté est passée de 13 % à 20,8 % et 70 % de ces élèves sont intégrés en classe ordinaire.

 

Les inégalités scolaires structurelles

Mais la nouveauté dans l’analyse produite par le CSE est l’effet de cette ségrégation sur la performance des écoles. Le CSE compare la relation entre le statut socioéconomique et culturel des écoles et leur performance avec celle des autres provinces, où le réseau privé est marginal à cause de l’absence de financement public.

Ainsi, sur la base des résultats des élèves aux tests PISA, la différence entre écoles de statut socioéconomique et culturel différents est de 105 points en mathématiques au Québec alors qu’elle est de 48 points en Colombie-Britannique. En lecture, la différence est de 112 points contre 39 et de 94 points en sciences contre 40.

Autrement dit, dans toutes les provinces du Canada, les élèves des écoles défavorisées ont obtenu une performance inférieure à ceux des écoles favorisées, mais cette différence est nettement plus élevée au Québec.

Selon le Conseil, ces données sont une conséquence de la multiplication des programmes sélectifs ou enrichis (qu’ils soient offerts dans une école publique ou privée).

Comme le souligne le CSE, « les inégalités de résultat ne sont pas seulement le fruit des inégalités dans la société (notamment sur le plan économique) ou entre les élèves (de plus ou moins grandes aptitudes), mais elles sont aussi partiellement le produit des inégalités de traitement que le système scolaire lui-même cautionne.

 

Question de classe sociale

Le Rapport établit un lien direct entre la classe sociale de provenance des élèves et l’accès aux projets particuliers et à l’école privée.

Seulement 16 % des écoles secondaires publiques dont l’indice de milieu socioéconomique est faible proposent à leurs élèves des programmes particuliers, alors que pour les établissements dont l’indice de revenu est moyen ou élevé, ce pourcentage atteint respectivement 46,2 % et 42,4 %.

Concernant l’école privée, 7% de l’effectif provient de milieux à faibles revenus (revenu familial moyen de moins de 50 000 $), 21% de la classe moyenne (revenu familial entre 50 000 $ et 100 000 $) et 72% de milieux favorisés (revenu familial supérieur à 100 000 $).

Alors, encore une fois saluons la prise de position de GND contre le financement public des écoles privées et souhaitons qu’elle soit reprise par les militants du Parti Québécois lors du congrès de l’automne prochain.

 

Photo : Radio-canada.ca