Le nouvel ALÉNA : des demi-victoires et d’importantes défaites

2018/10/04 | Par Attac-Québec

ATTAC-Québec reconnaît certaines améliorations à l’Accord États-Unis, Mexique et Canada (AEUMC) qui remplace l’Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA), mais considère nettement insuffisants les changements introduits et juge que de nombreux aspects ne sont pas acceptables.

Parmi les points positifs du « nouvel ALÉNA », la plus grande avancée est l’élimination du chapitre 11. Celui-ci établissait le mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États qui permettait aux entreprises de poursuivre les États par le biais de tribunaux privés.

Il s’agit là d’une importante victoire pour tous celles et ceux qui ont combattu ce mécanisme, parce qu’il remettait en cause la souveraineté des États et nuisait à leur capacité de règlementer dans l’intérêt public. Mais il faut déplorer vivement que le Mexique et les États-Unis l’aient conservé dans le secteur des hydrocarbures et cautionnent ainsi un modèle où les entreprises font leurs affaires polluantes là où les États et les règlementations sont attaquables et plus faibles.

De même, s’il faut se réjouir que le principe de la proportionnalité ait été éliminé – celui-ci obligeait le Canada à exporter ses hydrocarbures aux États-Unis de façon proportionnelle aux quantités vendues au cours des trois années précédentes –, les oléoducs pétroliers et gaziers semblent gagner au change du côté du Mexique par contre.

Par ailleurs, le Canada aurait protégé l’exception culturelle, en la modifiant pour qu’elle couvre les contenus circulant sur les plateformes numériques (Netflix, YouTube, etc.) qui contrôlent désormais une grande partie de l’offre culturelle. Reste à savoir si le tout est bien ficelé.

« Ces changements ne permettent pas de considérer que l’AEUMC est une entente “progressiste” pour autant, comme Justin Trudeau prétendait la vouloir. Loin de là. », affirme Claude Vaillancourt, président d’ATTAC-Québec.

La nouvelle atteinte à la gestion de l’offre, après d’importantes brèches faites dans l’accord entre le Canada et l’Union européenne (AÉCG) et dans le nouveau Partenariat transpacifique (PTPGP), affaiblira encore davantage notre souveraineté alimentaire ainsi qu’un modèle à échelle humaine intéressant et non basé sur la sur-production. De plus, l’ouverture de nos frontières au lait diafiltré ne laisse rien présager de bon pour la qualité de notre alimentation.

La prolongation des droits de propriété intellectuelle sur les médicaments et sur les droits d’auteurs haussera quant à elle les coûts en santé et sera un obstacle à l’accès à la connaissance, c’est inacceptable.

« Si le nouvel accord a éliminé quelques irritants, souligne Claude Vaillancourt, il constitue un pas supplémentaire dans la dérèglementation qui a toujours caractérisé les accords de libre-échange. Il ne propose rien qui vaille pour combattre les changements climatiques, les inégalités sociales, rien non plus qui favorise la justice fiscale et la défense des droits humains. Il demeure toujours au service d’une économie productiviste encourageant le gaspillage, les hydrocarbures, un modèle dommageable pour l’environnement. Il fallait innover beaucoup plus. »

Fondée en 1998 en France, ATTAC, l’Association pour la Taxation des Transactions financières et pour l’Action Citoyenne, est une association citoyenne non partisane présente dans 40 pays. Depuis 2000, ATTAC-Québec s’applique à faire connaître les enjeux qui accompagnent la mondialisation financière. Elle milite en faveur de la justice fiscale et contre les accords de libre-échange pour revendiquer le droit démocratique des peuples à défendre le bien commun. L’association fait partie, entre autres, du Réseau québécois sur l’intégration continentale (RQIC), de la Coalition opposée à la tarification et à la privatisation des services publics, du collectif Échec aux paradis fiscaux et de la Coalition Eau Secours.