Le budget vert de la CAQ, la crise climatique, l’indépendance énergétique et le coronavirus, une coïncidence à saisir…

2020/03/18 | Par André Bélisle

L’auteur est président de l’AQLPA

Le suspense est fini, la poussière de lune… de miel… est retombée. La CAQ a déposé son budget vert. Malheureusement, il n’est vraiment pas à la hauteur des besoins face à l’urgence climatique.

On se souviendra que monsieur Legault nous avait promis que 2020 serait l’année de l’environnement et de la lutte aux gaz à effet de serre (GES). Il reconnaissait que le monde et le Québec vivent une indéniable crise climatique.

Malgré une somme de 6,7 milliards $, sur six ans, allouée au ministère de l’Environnement, le rendez-vous est raté.

Le budget encourage toujours l’augmentation du nombre de voitures en proposant plus d’infrastructures routières.

Bien qu’il maintienne le programme Roulez vert avec ses incitatifs à l’achat de véhicules électriques, le gouvernement laisse au bon vouloir des manufacturiers d’offrir suffisamment de véhicules électriques pour rencontrer la demande, alors que nous savons depuis longtemps que l’offre est trop faible. Pour réussir la transition énergétique, il faut absolument augmenter la cadence, imposer des objectifs plus ambitieux et obliger les manufacturiers automobiles à doubler, voire tripler, l’offre de véhicules électriques.

Heureusement, la lecture du budget nous apprend que Québec, via le ministère des Transports, entend aussi investir 15,8 milliards $ dans l’électrification des transports collectifs à Montréal, Québec, Laval, Longueuil, Chambly et Gatineau. Assurément, c’est bien. Mais pourquoi ne pas ajouter des liens électriques entre les grands centres : Montréal, Québec, Sherbrooke, Gatineau, Saguenay, Rimouski ?

Dans le budget, on découvre également un montant de 500 millions $ versé au ministère de l’Agriculture pour un plan de développement durable sans vraiment savoir comment il sera dépensé.

Un autre 70 millions $ va au ministère de l’Énergie pour développer le gaz naturel renouvelable (GNR), soit le biométhane, le biogaz. Une très bonne nouvelle. Cependant, on devrait faire beaucoup plus, notamment en agriculture. Nous savons qu’on pourrait remplacer par du GNR au moins 60 % du gaz fossile que nous consommons au Québec.

Curieuse coïncidence et opportunité à ne pas manquer, la crise du coronavirus, l’effondrement des cours des combustibles fossiles et l’urgence climatique se télescopent. Le coronavirus provoque une crise économique, qui oblige à soutenir l’économie par l’injection des fonds importants afin d’en freiner les impacts négatifs. À date, le premier ministre Legault s’est révélé à la hauteur face à la crise du coronavirus. Il peut marquer l’histoire du Québec par des mesures en environnement.

 La crise du coronavirus impose un ralentissement des transports, ce qui réduit drastiquement, partout dans le monde, les émissions de gaz à effet de serre (GES) et la pollution de l’air. On en ressent les effets bénéfiques même en Chine…

Par contre les bas prix du pétrole représentent, à court terme, une sérieuse menace. S'ils se maintiennent aussi bas, ce serait catastrophique pour le climat. Mais, avec de l’audace et une vision portant plus loin que le mois prochain, le gouvernement pourrait changer la donne. L’occasion s’y prête. Il suffirait d’apporter des modifications au budget pour y inclure plus rapidement des mesures structurantes. Monsieur Legault peut et doit le faire.

Invertir davantage dans l’électrification des transports favorise notre indépendance énergétique, réduit nos GES et la pollution de l’air, freine l’exportation de capitaux, crée de l’emploi chez nous et soutient notre économie.

La production de GNR contribuerait à l’élimination des combustibles fossiles, tels que le gaz de schiste. On encouragerait ainsi une économie circulaire, ramenant les matières organiques dans les sols pour l’agriculture. Une belle manière de boucler la boucle.

Profitons de cette conjoncture pour investir dans le capital humain, renforcer notre système de santé, améliorer la défense de notre environnement, créer de l’emploi, encourager le progrès et soutenir notre économie. Jamais l’occasion de concrétiser l’expression développement durable n’aura été plus à propos.