Au-delà de la crise du coronavirus, la nécessité d’un plan de transition sociétale

2020/04/15 | Par André Bélisle

L’auteur est président de l’AQLPA

Voilà maintenant plus d’un mois que le coronavirus monopolise l’attention de tous et chacun, un peu comme si la réalité planétaire se résumait à combattre cette crise sanitaire pour éviter la fin du monde… économique.

Cette crise est bien réelle, malgré qu’on ait beaucoup de difficulté à en établir la sévérité relative, les impacts globaux et ses origines précises. On ne peut douter des menaces que représente la propagation des virus dans un monde de plus en plus petit, écologiquement très affaibli et soumis de plus en plus à des extrêmes climatiques dévastateurs.

Depuis longtemps, on nous met en garde face aux maladies et contaminations, qui nous guettent dans un monde toujours plus pollué où la seule valeur qui ait de l’importance est le profit monétaire. L’obsession capitaliste néolibérale et la mondialisation ont créé une situation de cataclysme social qui va bien au-delà de la crise du coronavirus, mais il semble que notre vision sociétale et planétaire soit atteinte de myopie grave.

D’abord, rappelons-nous qu’au nom de l’économie néolibérale, de grands dommages ont été faits au filet social, qui garantit notre droit à la santé et à la sécurité, en plus d’éliminer des lois et des règles protégeant notre environnement.

Nous avons toujours un système public de santé, mais on y a fait tellement de coupures que s’il tient encore, c’est par miracle. On peut bien qualifier les gens du secteur de la santé d’« Anges gardiens » car, malgré un état d’épuisement criant, sans leur dévouement remarquable et leur sens des responsabilités extraordinaire, ce serait l`hécatombe.

Souvenons-nous de la canicule de l’été 2018, lorsqu’une centaine de personnes sont décédées en quelques jours dans la région de Montréal des suites de coups de chaleur et que des milliers de gens se rendaient dans les hôpitaux pour obtenir des soins pour les malaises qu’ils ressentaient dans ces chaleurs extrêmes.

Le personnel soignant souffrait aussi de ces chaleurs suffocantes et devait travailler des heures interminables dans des conditions du tiers-monde, faute de ressources nécessaires pour affronter cette situation d’urgence. Les hôpitaux, les résidences pour personnes âgées et les CHSLD manquaient même de matériel de base comme des climatiseurs. Nos infrastructures municipales et communautaires démontraient aussi à quel point nous n’étions toujours pas prêts à faire face à la réalité climatique, et nous ne l’étions pas plus en 2020 face à la crise du coronavirus.

Pourtant, on sait depuis des années qu’avec le réchauffement planétaire viennent des extrêmes climatiques hors de l’ordinaire, des canicules, des sécheresses, des inondations, des tornades qui déclenchent des urgences sanitaires graves et causent des dommages aux coûts exorbitants.

Nous savons aussi qu’avec le réchauffement du climat et la pollution atmosphérique les risques de maladies infectieuses augmentent drastiquement, la propagation des virus aussi, étions-nous prêts ? Non, non, et non !

Néanmoins, nous pouvons être relativement satisfaits de la réponse du Québec devant la crise actuelle. Cependant, nous avons dû faire beaucoup de rattrapage et, encore une fois, il aura fallu des efforts extraordinaires de la part de nos « Anges gardiens » pour éviter le pire. Nous avons consenti un effort de guerre, qui a donné des résultats rapides et concluants.

Allons-nous, une fois pour toutes, réaliser qu’il n’y a pas d’économies à faire en coupant dans les services à la population pour baisser les taxes et les impôts, ce qui ne profitent momentanément qu’aux plus riches et aux grandes corporations ?

Nous sommes toujours en urgence climatique.

Le retour du printemps et de l’été ramènera les risques d’évènements climatiques extrêmes. Si de tels événements survenaient dans les prochaines semaines, aurons-nous la capacité de réagir efficacement ? Il n’y a pas de doute que la tendance au réchauffement climatique s’accentue.

Nous devons donc profiter du contexte actuel, tant au Québec qu’au Canada, pour joindre l’utile au nécessaire. Au sortir de cette crise, nous devons assurer une reprise économique viable et profitable. Cela s’appelle un plan de transition sociétale, visant à passer d’un système économique déficient à un système socio-économique priorisant la vie avant le profit, ramener la social-démocratie.

Il faut un plan de lutte aux bouleversements climatiques visant à réduire drastiquement la consommation d’énergie fossile, un secteur grandement responsable des émissions de gaz à effet de serre et autres polluants de l’air, de l’eau et des sols.

Nous avons appris que la pollution de l’air est un vecteur important dans la propagation des virus en plus de fragiliser les personnes les plus sensibles, les ainés. Nous avons toutes et tous pu nous rendre compte qu’on peut bien vivre autrement, que la réduction de la pollution en général apportent des bénéfices bien plus grands et plus rapidement, quoi qu’en disent les promoteurs du néolibéralisme et que, si on donne une chance à la nature, elle ne manque jamais son coup.

On reconnait qu’en définitive investir dans la protection de l’environnement et du climat crée de l’emploi, sauve des vies, assure une prospérité durable, améliore la qualité de vie et cela rapporte bien plus pour la société.

C’est ce genre de plan que nous devons mettre en œuvre maintenant.