Au Québec, les partis de l’opposition sont-ils confinés au silence?

2020/04/22 | Par André Jacob

L’auteur est professeur retraité de l’UQAM

Pendant qu’à Ottawa, on rétablit une certaine forme de vie parlementaire démocratique, l’Assemblée nationale du Québec semble morte. Les partis de l’opposition sont laissés dans l’ombre, sans voix. Le premier ministre et quelques ministres occupent toute la scène. Les journalistes jouent la carte de la collaboration, des passeurs de message et de la complaisance malgré quelques questions critiques et dérangeantes à l’occasion. Heureusement, quelques chroniqueurs apportent des points de vue et des analyses en cherchant un sens à différentes situations, par exemple, l’envoi des médecins spécialistes dans les CSHLD et bien d’autres enjeux cruciaux.

Pendant ce temps, la population reste béate, engourdie par l’ampleur du drame qui se joue sous son regard incrédule. Notre sentiment d’impuissance s’approfondit de jour en jour même si les questionnements semblent presque interdits… Malgré tout, tout semble bien aller puisque les cris du cœur du premier ministre lui valent des scores de popularité absolument incroyables. 

Pendant ce temps, la saga des manques, des risques, des improvisations et des volte-face nous étourdit. Certes, le gouvernement en place a la responsabilité de gérer la crise au meilleur de sa connaissance, mais la CAQ, détentrice de la majorité à l’Assemblée nationale, représente une ligne de pensée, pas nécessairement tous les courants d’idées et de débats au sein de la société.

Les citoyens et les citoyennes ont le droit d’entendre ce que les partis de l’opposition ont à dire par rapport à tel ou tel enjeu, à tel ou tel objectif ou encore à telle ou telle stratégie d’intervention de l’État dans les circonstances. Ils représentent nos voix. Nous attendons d’autres sons de cloche dans cette conjoncture tragique décourageante. 

Les questions qui nous habitent sont lourdes de sens. Nous réalisons que les avancées impressionnantes de la science et de la technologie en matière de santé ne suffisent pas à régler tous les problèmes. En outre, les systèmes et les structures pharaonesques mises ne place n’arrivent pas à garantir le bien-être et la vie saine de la population. Les objectifs et les stratégies de prévention semblent inefficaces ou dépassées. Les systèmes hospitalo-centrés se concentrent toujours plus les structures, les affaires pharmaceutiques et la marchandisation de la médecine.

Certes, les temps actuels ne sont pas propices à de tels débats de société, mais rien n’empêche qu’au-delà de la critique, entendre toutes les voix dans la recherche de solutions aux problèmes de l’heure apporteraient peut-être de l’eau au moulin et des perspectives nouvelles. Il est temps de rappeler que les élus.e.s représentent la population. Leur parole est importante dans une démocratie active et vivante. Le virus ne devrait donc pas tuer les débats démocratiques.