Le 23 septembre… et après ?

2022/09/23 | Par Jacques Benoit

L’auteur est co-rédacteur du Plan de la DUC et Membre de GMob (GroupMobilisation)

Le 23 septembre, nous serons des centaines de milliers à marcher pour répondre à l'appel mondial lancé par le mouvement Fridays for future.

Nous marcherons à Montréal, à Québec, à l'Assomption, Gatineau, Rouyn-Noranda, Rimouski, Trois-Rivières, Granby, Sherbrooke, mais aussi ailleurs au Canada et dans le monde.

Nous marcherons pour dire à nos gouvernements qu’on doit cesser d’utiliser les énergies fossiles d’ici 2030, parce que la science nous dit que les tragédies climatiques que nous avons vécues à répétition ces dernières années, les inondations, canicules, tornades, sécheresses, manque d’eau potable, feux de forêt, etc., ont cessé d’être des événements exceptionnels pour devenir la règle, une règle de plus en plus écrasante, intransigeante, implacable, inévitable, et que nos énergies carbonées en sont la principale cause..

Nous marcherons aussi pour dénoncer notre modèle de société qui encourage à consommer et à accumuler le plus possible, ce modèle de société qui enseigne que réussir sa vie, c’est en avoir toujours plus que les autres, quitte à gaspiller. C’est continuellement détruire sous le prétexte de construire, c’est se faire assommer de publicité invitant à acheter toujours et encore plus, mais sans réfléchir sur où nous mène cette façon de vivre, à ne penser qu’à soi maintenant, pas aux autres, ni à celles et ceux qui nous suivront… Cette façon de vivre en société nous a apporté nombre de malaises et de maladies en tous genres découlant de la pollution et de la destruction continue de notre environnement et de la nature, et dont la pandémie n’est que le dernier exemple en liste, une pandémie comme un wake-up call qu’on ne semble toujours pas avoir saisi. Ce modèle de société doit changer radicalement, ici et ailleurs, et surtout maintenant!

Le 23 septembre, nous marcherons comme citoyennes et citoyens du Québec et du Canada, mais aussi comme citoyens et citoyennes du monde, avec d’autres comme nous dans plein d’autres pays. Parce que tous ces défis, ces enjeux, ces dangers qui nous guettent ici sont les mêmes qui guettent toute l’humanité, toutes les populations de tous les pays. Parce que le réchauffement climatique n’est pas limité à une région, à une latitude ou à un continent : il est planétaire. Il est le plus grand et le plus imminent danger qui menace notre vie et notre survie comme espèce, et celle de la majorité des espèces sur Terre. Parce que nous avons trop longtemps ignoré le problème et que nous continuons de le faire, changer notre façon de vivre en société n’est plus une question de passage graduel vers une autre façon d’être. Ce changement, sans les moyens nécessaires, se fera sans transition : brusquement, brutalement, suivant les événements extrêmes qui s’installent de plus en plus violemment partout, avec effet domino entre eux.

Ouvrons les yeux : la souffrance ne fait que commencer, et ne disparaîtra pas à coup de slogans vides, de réductions d’impôts, de plus de « libaaarté » ou de nouveaux barrages hydroélectriques. L’enjeu actuel porte sur comment réduire les durs impacts inévitables qui viennent.

Cet enjeu concerne toute l’humanité, mais il n’est pas le même pour tous puisque tous et toutes ne consomment pas également : les riches plus que les pauvres, beaucoup plus, et les pays riches plus que les pays pauvres, encore beaucoup plus. Le premier ministre Legault répète qu’on devrait être fier au Québec avec nos 9,9 tonnes de gaz à effet de serre (GES) émis par habitant, choisissant de nous comparer à pires que nous plutôt qu’à meilleurs, ce qui lui permet de passer sous silence qu’il faudrait 4,7 planètes Terre si toute l’humanité consommait comme les Québécoises et Québécois. Y’a pas de quoi être fier !

Il urge de réduire notre consommation, de revenir à ce qui est essentiel, de respecter les capacités de la planète qui nous entoure, et la nécessaire solidarité entre nous pour y arriver.

En 2018, António Guterres, secrétaire général de l’ONU, déclarait qu’il ne restait que deux ans pour éviter les conséquences désastreuses des changements climatiques, et il lançait un appel à la société civile pour qu’elle demande des comptes à ses dirigeants politiques.

L’année suivante, nous étions plus de 500 000 dans les rues du Québec, et des millions dans les rues du monde à exiger de nos gouvernements qu’ils agissent de façon conséquente.

La pandémie qui a suivi a ralenti la mobilisation, mais elle nous a aussi montré que les gouvernements peuvent mettre en place des mesures extraordinaires et agir ensemble quand ils le veulent. On a même vu une baisse mondiale des émissions de GES. Mais les émissions ont repris de plus belle et la catastrophe climatique s’est poursuivie.

Alors que les intempéries s’abattent de plus en plus durement et frappent sans pitié les populations, alors que cela oblige une plus grande collaboration encore entre tous les pays pour faire face à cet enjeu climatique existentiel, que font les Legault, Trudeau, Biden, Macron, Poutine, Xi Jinping, Kim Jung-un, Bolsonaro et autres dirigeants de notre monde ? Ils parlent d’occasions d’affaires et de libre marché, de concurrence, de croissance et d’hydrogène de toutes les couleurs, ils se défient, ils roulent des épaules, ils jouent au plus fort, à celui qui va contrôler le monde. Ils dépensent des milliers de milliards de dollars pour s’armer, pour bombarder, pour tuer. Ils proposent de produire plus pour détruire plus. Ils invoquent l’aide et la défense de la démocratie pour vendre encore plus d’utilisation du pétrole, du gaz, du charbon, de tous les fossiles, sans mentionner que tout cela va aggraver encore plus rapidement la catastrophe climatique, environnementale et de la biodiversité.

« C’est un suicide collectif », a déclaré le 10 septembre dernier António Gutterez, lors d’une visite au Pakistan, dévasté par des inondations monstres. «Je n’ai jamais vu de carnage climatique de cette ampleur. Je lance un appel mondial : arrêtez cette folie. Mettez fin à la guerre contre la nature.»

On ne le répètera jamais assez : l’urgence climatique est une urgence d’agir !

Cessons de dire qu’il faut sauver la planète! La Terre n’a pas besoin de nous pour vivre. C’est nous qui avons besoin d’elle. Il n’y a pas de planète B !

Et pour nous sauver, nous avons besoin les uns et les unes des autres.

Le comprendrons-nous à temps ?...

Le 23 septembre, nous marcherons. Mais après…