À la recherche d’un consensus en faveur du féminisme universaliste

2023/03/08 | Par Claire Simard

Claire Simard, Ph. D est professeure-chercheuse retraitée de l’INRS
 

Deux visions du féminisme — universaliste versus intersectionnel — se sont récemment entrechoqué à l’Assemblée nationale, à la suite du dépôt d’une motion en faveur de l’intersectionnalité, déposée par Québec solidaire et appuyée par d’autres partis d’opposition, mais rejetée avec raison par la ministre de la Condition féminine, Martine Biron.

En effet, contrairement à ce que veulent prétendre ces partis d’opposition, le féminisme origine de la constatation évidente des innombrables discriminations dans leurs droits humains dont souffraient les femmes, par comparaison avec les droits des hommes. Le féminisme est né avant tout pour revendiquer l’universalité des droits des femmes avec ceux des hommes et non pas pour faire reconnaître toutes les formes de discrimination qui existent dans la société, telles que celles dues entre autres à l’origine ethnique, à l’orientation sexuelle, aux handicaps physiques ou mentaux, à l’identité de genre, etc.

Les discriminations vécues par ces autres groupes ne sont pas d’ordre du «féminisme» en tant que tel mais bien d’ordre de « l’humanisme » puisque tous les êtres humains sans exception — hommes, femmes et enfants de toute origine et de toute identité sexuelle — ont droit à l’égalité, au respect, à la dignité et à l’honneur.

Il faut évidemment appuyer ces groupes discriminés qui combattent pour leur accès à l’égalité mais ces batailles ne doivent pas se faire aux dépens des 50 à 52% des humains qui sont nés avec des organes sexuels féminins.

En effet, les tenants du féminisme intersectionnel considèrent que les hommes s’identifiant comme femmes seraient effectivement des femmes et que la société se doit absolument de les considérer comme telles.

Or, un être humain qui naît sans aucun des organes anatomiques destinés à la reproduction humaine — utérus, trompes de Fallope, ovaires — ne pourra jamais être une femme à part entière, car cette personne ne pourra jamais mettre un enfant au monde après une gestation de plusieurs mois dans son ventre.

Cette personne née sans organes sexuels féminins ne sera jamais confrontée au choix de poursuivre une grossesse dans son corps ou d’en avorter. Cette personne ne pourra jamais nourrir un nouveau-né à ses seins.

Ces faits biologiques ne sont que vérités, et ce n’est assurément pas transphobe que de le constater et de le dire; au contraire, ce serait même plutôt femmophobe que de le prétendre.

La vie sur terre a évolué pour favoriser la diversité génétique en recourant à la reproduction sexuée de deux êtres de la même espèce, mais de sexes différents, l’un de génotype XY produisant des gamètes mâles — les spermatozoïdes — , l’autre de génotype XX produisant des gamètes femelles — les ovules — . Cette distinction sexuée immuable est inscrite dans chacune des cellules diploïdes de tout être humain et rien, ni chirurgies ni traitements hormonaux, ne pourra jamais rien y changer.

Les personnes qui ressentent que leur sexe de naissance ne correspond pas à leur genre social se doivent de revendiquer leur accès à l’égalité comme tout autre groupe humain subissant des discriminations, mais cela ne doit pas se faire au détriment des droits durement acquis des femmes, comme les endroits qui leur sont strictement réservés tels que les prisons, refuges, toilettes ou vestiaires.

Déjà, de dangereux criminels condamnés à la réclusion — prédateurs sexuels, meurtriers, pédophiles — demandent et obtiennent sans difficulté leur transfert dans un pénitencier pour femmes après s’être simplement auto-identifiés femme, avec pour conséquence que des prisonnières sont désormais victimes de viols par des trans femmes dans les prisons pour femmes.

Les prisonnières se retrouvent ainsi forcées de cohabiter avec des personnes dangereuses n’ayant fait aucune transition anatomique sexuelle, alors même que nombre d’entre elles ont déjà subi des violences sexuelles perpétrées par des hommes avant leur emprisonnement!

Enfin, souscrire à l’analyse différenciée selon les sexes (ADS) dans une perspective intersectionnelle (ADS+) ne pourrait que conduire à des incongruités tellement indicibles que cela ne pourrait manquer de heurter le bon sens commun.

Parmi tant d’autres inconvenances, on se retrouverait ainsi à voir inscrits sous la rubrique « criminalité associée aux femmes », les viols de femmes perpétrés par des femmes (à pénis). Ce serait faire une très grave offense aux femmes que de laisser croire que leur criminalité se rapproche de celle des hommes, alors qu’il est depuis longtemps avéré que la grande majorité des crimes sont le fait de ces derniers. Permettre une telle confusion dans les données ferait en sorte que les analyses statistiques ne voudraient tout simplement plus rien dire.