Il faut fermer dès maintenant la Fonderie Horne

2023/04/19 | Par Richard Desjardins et Henri Jacob

Monsieur le Premier Ministre,

Nous militons au sein de l’Action boréale, surtout préoccupée par la question forestière. Mais quand le ministère de la Faune suggère à la population de ne pas consommer le foie et les reins des orignaux et des ours abattus à l’intérieur d’un rayon d’au moins 40 kilomètres autour de la Fonderie Horne – fortement contaminés qu’ils sont au cadmium de la Fonderie Horne –, on peut aussi s’inquiéter de la santé générale de la forêt environnante et de ses êtres, n’est-ce pas ? Quand même chanceux que le cannibalisme ne figure pas dans notre culture…

Et encore, cette forêt demeure constamment arrosée de plusieurs autres contaminants non encore analysés et qui proviennent de cette même source.

Depuis quelques années, les habitants du quartier Notre-Dame-de-Protection de Rouyn-Noranda s’insurgent du fait que les normes environnementales imposées à la Fonderie Horne peuvent dépasser des centaines de fois celles en vigueur ailleurs au Québec. Notamment en ce qui a trait aux rejets d’arsenic, ce poison vif qui abîme le corps sitôt qu’il y pénètre. Les bébés naissent plus petits ici, les cancers du poumon y sont plus fréquents, l’espérance de vie plus courte de cinq ans.

PROPOSITION REJETÉE PAR LE PEUPLE

Vous avez donc prié Glencore, propriétaire de la fonderie, de bien vouloir respecter la norme établie par le gouvernement du Québec, à savoir : pas plus de trois nanogrammes d’arsenic par mètre cube d’air. Glencore vous a répondu qu’elle pourrait fermer sa shop si cette norme lui était imposée. Incapable de vous opposer à ce chantage primaire, vos raisonnements subséquents sont devenus aussi faciles à suivre qu’un lièvre sur l’acide !
Heureusement pour vous, la santé publique est venue à votre rescousse, suggérant qu’un simple rehaussement de la norme à hauteur de 15 nanogrammes, étalés sur cinq ans – mais juste pour Rouyn-Noranda –, serait concevable. (L’appliquer à l’ensemble du Québec risquerait probablement d’alerter la communauté scientifique internationale).
Encore incapable de trancher, vous avez déclaré l’automne dernier : « C’est la population de la ville qui va décider ». Comme si nous étions tous familiers avec le monde submicros-copique de la contamination. Grotesque !

Une consultation publique a suivi et la population a majoritairement décidé de rejeter votre proposition, préférant être soumise aux mêmes normes qu’ailleurs au Québec. La fameuse « acceptabilité sociale » dont vous vous targuez n’y était pas. Vous avez méprisé l’avis des gens, cédant devant la Horne-Glencore, et annoncé brusquement la déportation de 500 à 600 personnes, désemparées, du quartier Notre-Dame-de-Protection, traitées comme d’encombrants caribous humains toujours mal placés quand une industrie extracti-viste impose sa loi. Comme dans un jeu vidéo. Inqualifiable ! Vous détruirez donc 200 maisons et leurs rêves, proches de la fonderie, jusqu’à la rue Carter. L’arsenic a-til reçu l’instruction de ne pas la traverser ?

DE L’À-PLAT-VENTRISME !

Ne vous demandez pas pourquoi la classe politique inspire aujourd’hui autant confiance que les revendeurs de chars usagés.
Question, Monsieur le Premier Ministre : s’il paraît concevable, selon vous, d’atteindre un niveau sécuritaire d’ici cinq ans, pourquoi alors déportez-vous les gens du quartier tout de suite ? Sinon que vous n’y croyez tout simplement pas, à cet objectif ?
À votre décharge, ce n’est pas vous qui avez instauré l’à-plat-ventrisme face à la direction de cette compagnie. Il y a presque cent ans de ça, le gouvernement a demandé aux dirigeants de la fonderie de construire leur smelter à une quarantaine de kilomètres de la ville. La compagnie a répondu que dans ce cas-là, elle abandonnerait le projet.

Chantage primaire.
Allez ! À plat ventre le gouvernement du Québec !
Dans la foulée, la compagnie demanda au gouvernement d’écrire une loi interdisant toute réclamation pour dommages causés par la boucane.
Allez ! À plat ventre le gouvernement du Québec !
Voilà d’où nous venons, voilà où nous en sommes. À la même place !

NOUS SOUTIENDRONS LA DÉSOBÉISSANCE CIVILE

L’Action boréale souhaite vivement aujourd’hui la fermeture immédiate de cette usine de la mort et de l’humiliation. Jusqu’à ce que les plans de sa réhabilitation incluent les preuves de conformité aux normes environnementales en vigueur ailleurs au Québec. Pendant le shut down, Glencore continuera de verser les salaires aux travailleurs de la fonderie, les personnes certainement les plus contaminées de notre ville. La compagnie en a largement les moyens, sa valeur étant estimée à 101 milliards de dollars, presque autant que le budget de votre gouvernement…
Et, à ce qu’on comprend, vous leur accorderiez des subventions ?
Comme on dit : Tu peux ben me rentrer ton parapluie dans le c..., mais ostie, ne l’ouvre pas !

Monsieur le Premier ministre, nous laisserez vous comme seule option le blocage ferroviaire des convois de minerais pourris d’arséniate – que même la Chine ne veut pas traiter ? Votre comportement irresponsable, illégitime, appelle à une désobéissance civile conséquente. L’Action boréale la soutiendra. Pour qu’aucun enfant ne continue d’être empoisonné jour après nuit après jour après nuit après… à coups de nanogrammes.

Post-Scriptum du vice-président : Monsieur Legault, vous avez déjà dit en Chambre que vous aimiez bien mes chansons.
Sans doute faisiez-vous allusion à ce petit couplet :
« Entendez-vous la rumeur
La loi de la compagnie
Il faudra que tu meures
Si tu veux vivre, mon ami. »