Santé sécurité au travail : la « balance des inconvénients »

2021/01/29

La santé, une priorité, disait Legault. Souvenons-nous de son grand acte de contrition au début de la pandémie, quand il a dû admettre que les compressions des gouvernements précédents et du sien étaient en grande partie responsables de l’hécatombe !

Ça c’était pour la galerie (de la presse). La santé, une priorité ? Sûrement pas à en croire la teneur du projet de loi 59 réformant la Loi sur la santé et sécurité du travail.

Francis Vailles, dans La Presse+ du 19 janvier 2021, a révélé le contenu d’une étude – on ne peut plus sérieuse puisqu’elle origine de Morneau Shepell, la firme de l’ancien ministre des Finances, Bill Morneau – qui démontrerait que le taux de cotisation des employeurs du Québec excède de 35 % celui des entreprises de l’Ontario et de 60 % celui en Alberta. Selon Vailles, cet écart impose une facture pour les entreprises du Québec de 3 milliards, qui dépasse de 640 millions celle de l’Ontario, toute proportion gardée. Et d’un milliard de dollars celle de l’Alberta. 

Roch Lafrance, le secrétaire général de l’Union des travailleuses et travailleurs accidentés ou malades, s’est intéressé, lui aussi, à l’étude de Morneau Shepell. Deux jours après l’article de Vailles, il a démontré dans La Presse+ qu’une fois la vitesse de croisière atteinte, après 10 ans, la réforme devrait permettre d’économiser 634,1 millions annuellement et de façon récurrente. « C’est curieux comme les chiffres coïncident avec ceux de Morneau Shepell », feint-il de s’étonner. Au cours des 10 premières années, la réforme pourrait générer des « économies » pouvant atteindre 4,3 milliards ! 
Francis Vailles tirait la conclusion suivante de l’étude Morneau Shepell : « À ce compte, ce ne sont plus les employés qui deviendront malades, ce sont les entreprises qui seront handicapées face à la concurrence, puisqu’elles financent l’entièreté du régime, qui coûte 3 milliards par année ».  

Roch Lafrance conclut au contraire et avec raison que, « derrière cette ponction de 20 % dans le régime, ce sont des travailleurs malades et accidentés qui écoperont, tout particulièrement parmi les 60 % de non-syndiqués qui n’ont pas les moyens de se défendre ». 

Santé des entreprises d’un côté, santé des travailleurs de l’autre. C’est la fameuse « balance des inconvénients », si chère au comptable qui nous tient lieu de premier ministre. De quel côté pensez-vous qu’elle va pencher ?