Un cessez-le-feu pour arrêter le carnage

2023/11/10 | Par Fernand Doutre

L’auteur est citoyen d’Ahuntsic

Lettre à Mélanie Joly

En refusant d’exiger un cessez-le-feu immédiat dans la guerre qui a cours actuellement dans la bande de Gaza, c’est tout comme si vous sembliez cautionner le règne de la terreur imposée aux Palestiniens par l’armée israélienne et le gouvernement de la droite dure israélienne de Nétanyahou.

Il ne s’agit plus de « permettre à Israël de se défendre, selon les règles de droit international », mais bien davantage de donner carte blanche à cet esprit de vengeance, dans une guerre totalement asymétrique, selon les principes de la loi du talion : « Œil pour œil, dent pour dent. »  On pourrait souhaiter un autre discours de votre part et de la part du gouvernement canadien qui se targue d’être un parangon de démocratie.

Le 1er novembre 2023, à l’Assemblée nationale, Québec solidaire a déposé une motion pour exiger un cessez-le-feu entre les belligérants depuis le début de l’offensive israélienne sur la bande de Gaza. Cette motion a été appuyée par deux autres partis d’opposition, le PQ et les Libéraux. La CAQ a décidé de voter contre cette motion.

Le lendemain, Haroun Bouazzi, le député de Maurice-Richard (cette circonscription provinciale qui recoupe une bonne partie de votre comté au fédéral) fondait en larmes lorsqu’il a tenté de faire un point de presse à propos du refus, presque incompréhensible, du parti au pouvoir d’avaliser cette motion.

Au niveau fédéral, la situation pourrait être différente si le gouvernement canadien adoptait des positions autonomes sur les questions internationales, autres que celles copiées-collées sur celles de la politique américaine. Dans votre propre parti, il y a des exemples passés qui témoignent de cette possibilité.

Le gouvernement de Pierre-Elliott Trudeau, au début des années soixante-dix avait provoqué l’ire du gouvernement Nixon pour ses prises de positions différentes sur un certain nombre de questions internationales, comme de celle de maintenir un dialogue avec Cuba en refusant de suivre la position de l’Empire.

Jean Chrétien, en 2003, avec une opinion publique largement défavorable à la participation à une guerre en Irak, avait décidé de ne pas participer à la « coalition » sous la gouverne de l’armée américaine pour détruire Bagdad. Ce ne fut malheureusement pas le cas en Afghanistan, avec une participation de l’armée canadienne entre 2001 et 2014, qui, lors du retrait total en 2021, se concluait par un désastre pour les populations, après des décennies de guerre.

Chez les Progessistes-Conservateurs, on retient l’exemple de Brian Mulroney qui, vers la fin des années 80, a tenté de jouer un rôle pour mettre fin à l’apartheid en Afrique du Sud.

Aujourd’hui, autant au fédéral, avec la demande de cessez-le-feu du NPD (qui a eu l’appui de quelques députés libéraux), qu’au provincial, avec la motion de QS, on serait en droit de penser que les choses seraient en train de changer, tant pour les positions canadiennes que québécoises.

En tant que ministre des Affaires étrangères, vous qui avez suffisamment d’influence au gouvernement, serait-il envisageable que vous puissiez revoir votre position actuelle qui consiste à ne demander qu’une trêve humanitaire et non un arrêt total des combats?

La situation des Palestiniens dans la bande de Gaza, depuis presque un mois maintenant, est devenue totalement intolérable à nos yeux.   Le Canada pourrait-il jouer un plus grand rôle pour exiger, dès maintenant, un cessez-le-feu et être un partenaire pour un véritable plan de paix?

L’absence d’électricité, d’eau, de gaz, de nourriture pour les gazaouis s’apparente déjà à une tentative de génocide. La destruction d’innombrables habitations, la mort de près d’une dizaine de milliers de personnes en moins d’un mois dans ce territoire enclavé, ne peuvent qu’émouvoir toute personne sensée. Cela peut même rappeler la destruction avec fracas du ghetto de Varsovie en 1943.

À l’approche du 11 novembre, jour de commémoration de l’Armistice de 1918, ne devrait-il pas être plus que temps de faire tout en son pouvoir pour agir comme facteur de paix et tenter de calmer le jeu dans cette terrible guerre?

Le peuple palestinien de la bande de Gaza a réussi à survivre, depuis des décennies, dans des conditions qui ne faisaient que s’aggraver et qui semblaient laisser une bonne partie de la « communauté internationale » plutôt indifférente.

On ne peut que déplorer les victimes civiles israéliennes des attaques du 7 octobre, mais rien ne peut justifier l’ampleur de la riposte revancharde qui a cours en ce moment.

Est-il possible d’espérer que le gouvernement du Canada, en dépit de ses liens économiques forts avec les États-Unis, adopte une position humanitaire qui puisse jouer un rôle pour détendre les relations dans toute cette région du Proche-Orient ? Avons-nous intérêt à ce qu’il y ait un embrasement ? Jusqu’où ira ce conflit ?  Qu’en est-il du sort des otages si tout est détruit à Gaza?  Nous attendons des réponses.