Non aux dérapages haineux dans les médias anglophones

2012/08/31 | Par Mario Beaulieu

L’auteur est président du Mouvement Québec français

Depuis le début de la campagne électorale, il ne se passe pratiquement pas une journée sans que les Québécoises et les Québécois qui proposent un renforcement de la 101 soient taxés de xénophobie et de toutes sortes d’insinuations calomnieuses.

Ces accusations sont profondément injustes. L’aménagement linguistique québécois est beaucoup plus généreux envers la minorité historique anglophone que celui qui prévaut dans le reste du Canada pour les francophones.

La Loi fédérale sur les langues officielles prescrit des services en français seulement là où le nombre le justifie à partir de critères fondés sur les données du recensement.

Étant donné que les francophones hors Québec ne constituent plus que 4,1 % de la population selon la langue maternelle (et que 2,5 % selon la langue parlée à la maison) et qu’ils sont éparpillés sur un énorme territoire, une grande partie d’entre eux ne reçoivent pratiquement aucun service en français.

De plus, là où la Loi sur les langues officielles ne s’applique pas, comme dans les gouvernements provinciaux et municipaux, les services sont généralement en anglais seulement.

Le projet d’appliquer la loi 101 au cégep est particulièrement dénigré. Pourtant, encore une fois, la situation reflète une iniquité flagrante entre ce qui se passe au Québec et ailleurs au Canada. Le réseau collégial anglophone reçoit deux fois plus de financement que la part du poids démographique des anglophones au Québec. En ce qui a trait au réseau universitaire anglophone, cette proportion est triplée, sinon quadruplée.

Au Canada anglais, c’est la situation inverse qui prévaut généralement. Dans la plupart des provinces, il n’y pas d’université francophone ou il n’y a qu’une université bilingue.

Les allusions constantes visant à stigmatiser notre histoire sont d’autant plus méprisantes qu’elles proviennent d’une nation dont le passé est jonché de gestes d’intolérance linguistique.

À l’exception du Québec, pendant près d’un siècle et jusque dans les années soixante, toutes les provinces canadiennes à majorité anglophone ont adopté ou maintenu des lois interdisant l'enseignement en français dans les écoles publiques.

Les communautés francophones et acadiennes ont subi une assimilation programmée de plus de 70% de leur population.

Les Québécois ne doivent plus accepter d’être constamment l’objet d’aussi graves accusations dans les médias anglophones du Québec et du Canada. Il s’agit d’un discours injuste et haineux qui doit être dénoncé parce qu’il stigmatise et prête des intentions odieuses à une grande partie de la population du Québec.

Il banalise le racisme et est utilisé comme une arme politique. Il crée un climat de peur et d’hostilité qui favorise la polarisation du vote.

Certains chercheurs y ont reconnu une forme de néo-racisme. La suprématie raciale anglo-saxonne y serait remplacée par la supériorité de la culture dominante «universaliste» canadienne.

Ainsi, le multiculturalisme canadien serait supérieur à l’interculturalisme québécois. Il serait xénophobe de vouloir imposer la connaissance du français comme une condition de la citoyenneté québécoise alors que la citoyenneté canadienne a pour critère la connaissance de l’anglais ou du français. Seul le «nous» canadien serait inclusif !

L’objectif de la Charte de la langue française est de faire du français la véritable langue commune et officielle. Il s’agit d’un facteur essentiel de l’inclusion des nouveaux arrivants à la société québécoise.

C’est la condition première pour assurer l’avenir du français au Québec, seul État majoritairement francophone de l’Amérique du Nord.

Le bilinguisme institutionnel a entraîné la disparition des langues minoritaires partout où il a été utilisé à travers le monde. Au Canada, chaque recensement démontre en effet un taux effarant et croissant d’assimilation des francophones hors Québec.

Notre objectif n’est pas de diaboliser à notre tour les Canadiens anglais, mais de désamorcer ce qui constitue un obstacle à toute forme de débat constructif. Nous sommes convaincus que ce courant de pensée anti-québécois n’est pas celui d’une majorité d’anglophones.

Pouvoir débattre rationnellement et sereinement dans l’espace public est la meilleure démonstration de l’ouverture et de sens de la démocratie des citoyennes et des citoyens des nations québécoise et canadienne, peu importe leurs allégeances politiques, leurs origines ou leur langue.

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