Les fusions d’établissements en santé ont augmenté l’offre de services en anglais

2018/04/10 | Par Frédéric Lacroix

Un communiqué émis par le ministère de la Santé et des Services sociaux nous informe d’améliorations apportées au « Comité provincial (sic) pour la prestation des services de santé et des services sociaux en langue anglaise ». Le communiqué mentionne des « améliorations » aux critères d’accessibilité pour les membres du comité, de la constitution d’un comité de sélection de futurs membres du comité par le Quebec Community Groups Network QCGN (un organisme financé à coups de millions par Ottawa) et de modifications à la régie interne du comité.

Bref, on ne comprend pas pourquoi le MSSS s’est donné la peine de rédiger et de payer un communiqué jusqu’à ce que l’on lise le message inclus à la fin : « Rappelons que dans le cadre des réformes menées ces dernières années pour améliorer la gouvernance du réseau de la santé et des services sociaux, plusieurs mesures ont été prises afin de favoriser l'accès aux services pour les communautés d'expression anglaise. Mentionnons notamment que tous les anciens établissements et les installations qui détenaient une désignation d'établissement reconnu pour ses services en langue anglaise ont pu la conserver dans le cadre des fusions régionales. Il en va de même pour les services et programmes offerts en langue anglaise, dont la mission s'est poursuivie».

Voilà un paragraphe intéressant.

Notons que le ministre de la Santé et des Services sociaux se vante d’avoir favorisé l’accès aux services en anglais dans le réseau de la santé. Il affirme même que « tous les anciens établissements et les installations qui détenaient une désignation d'établissement reconnu pour ses services en langue anglaise ont pu la conserver dans le cadre des fusions régionales ».

Comme les « désignations d’établissement reconnu » ont été reversées dans la nouvelle entité fusionnée, on peut donc conclure que les fusions d’établissements auxquelles s’est livré avec frénésie le ministre Barrette depuis son arrivée à la tête du ministère de la Santé en 2014 ont servies – outre les autres buts poursuivis – à assurer l’extension des services en anglais à travers le réseau de la santé.

Rappelons que la loi reconnait aux dites « personnes d’expression anglaise » le droit de recevoir des services en anglais au Québec. Qui sont ces « personnes d’expression anglaise »? Voici la définition : « La personne d’expression anglaise est celle qui, dans ses relations avec un établissement qui dispense des services de santé ou des services sociaux, se sent plus à l’aise d’exprimer ses besoins en langue anglaise et de recevoir des services dans cette langue. »

Bref, n’importe quel quidam qui le souhaite est en droit de recevoir l’ensemble des services sociaux et de santé en anglais au Québec. Incluant l’immigrant récent qui ne veut pas apprendre le français (plus de 200 000 personnes aux dernières nouvelles). Dans les faits, et n’en déplaise à la loi 101, le Québec est un État entièrement bilingue. La stratégie du QCGN et d’Ottawa est la suivante : ne pas trop toucher au symbole que représente la loi 101, mais la vider progressivement  de sa substance par en arrière et en faire une coquille vide.

Comme le hasard fait bien les choses, Ottawa vient justement d’annoncer un nouveau « plan d’action sur les langues officielles », avec à la clé beaucoup d’argent pour financer l’expansion des services en anglais au Québec. Le « plan d’action » mentionne qu’« une augmentation du financement à hauteur de 3,5 millions de dollars sur cinq ans sera fournie au Réseau communautaire de santé et de services sociaux pour l'ajout de 3 nouveaux réseaux de santé anglophones aux 20 réseaux existants et de 10 réseaux satellites dans les régions rurales et éloignées du Québec qui ont peu d'accès ou n'en ont aucun. L'élargissement des réseaux permettra de couvrir des régions telles que le Saguenay-Lac-Saint-Jean, la Mauricie-Centre-du-Québec, et Montérégie-Centre». Ben oui, Ottawa dépense des millions pour offrir des services en anglais dans des régions où ne réside presque aucun anglophone!

Il suffit de comparer la différence de traitement entre les francophones en Ontario (qui se battent pour que le peu de services qu’ils ont ne soient pas enlevés) et les « personnes d’expression anglaise » au Québec (qui sont en voie de bilinguiser intégralement le réseau de la santé) pour comprendre à quel point les francophones sont victimes d’injustice systémique en ce pays.