L’opposition à la mondialisation passe par l’opposition à la guerre

 

Je téléphonais à Michel Chossudovsky pour le féliciter pour son livre Guerre et mondialisation – La vérité derrière le 11 septembre – plus de 250 personnes ont participé au lancement – qui s’est vite retrouvé dans la liste du palmarès des best-sellers, malgré l’absence d’intérêt des grands médias. J’ai eu droit à un exposé sur les manipulations en cours pour justifier la guerre contre l’Irak et à une critique acerbe, courageuse et ma foi fort juste du mouvement antimondialisation québécois.

Je sais que tu m’appelles pour mon article pour l’édition du mois d’octobre, me dit-il, mais je n’ai pas eu le temps de l’écrire. J’ai dû m’occuper de la publication de mon livre qui paraît simultanément en six langues 0 français, anglais, italien, espagnol, allemand et coréen. » On l’aurait excusé pour moins ! Évidemment, Michel ne pouvait s’empêcher de commenter l’actualité, et moi de prendre des notes.

C’est une guerre de conquête

Ce matin-là, les médias commentaient les déclarations de Jean Chrétien reliant le terrorisme à la pauvreté, propos qui lui ont valu d’être violemment attaqués pour complaisance à l’égard du terrorisme par le National Post et d’autres publications de droite au Canada anglais.

« C’est un faux débat qui est lancé pour camoufler la vérité », tranche Chossudovsky en rappelant qu’« Oussama ben Laden est une création de la politique étrangère étatsunienne et les attentats du 11 septembre, un prétexte pour le déploiement d’une guerre de conquête étatsunienne qui menace l’avenir de l’humanité ».

Les lecteurs de l’aut’journal sont évidemment familiers avec cette analyse que Michel a développé depuis un an dans nos pages. Mais un article de journal ne permet pas le même développement qu’un livre.

Et je sais que certains ne voient dans la thèse de Michel sur la complicité des autorités étatsuniennes dans les événements du 11 septembre qu’une hypothèse, certes intéressante, mais non prouvée. Ceux-là doivent au plus tôt lire Guerre et mondialisation. La démonstration est époustouflante.

L’histoire secrète des relations entre Washington et le terrorisme international – que ce soit en Bosnie, au Kosovo, en Macédoine, en Tchétchénie, au Pakistan ou en Afghanistan – est mise à nu.

Puis, au-delà de la mouvance terroriste, Michel décortique avec la précision d’un chirurgien les intérêts économiques, pétroliers, militaires, mafieux en jeu.

Le tout jette un éclairage nouveau sur les contradictions entre l’axe anglo-étatsunien (auquel participe le Canada) et l’Europe, le jeu ambigu de la Russie et la volonté étatsunienne de contrer l’émergence de la Chine.

Mais surtout apparaît au grand jour la volonté guerrière étatsunienne de conquérir et de dominer le monde en tirant profit d’une énorme supériorité militaire, et en recourant au besoin aux armes nucléaires.

En refermant le livre, on a envie de dire que « rien ne sera plus pareil après le 11 septembre », mais en termes politiques plutôt qu’émotionnels.

Michel Chossudovsky nous fait réaliser que certains groupes politico-militaro-financiers ont profité de l’attentat contre les tours jumelles pour procéder à ce qu’on pourrait qualifier de coup d’État.

Mais est-ce que nous l’avons bien compris, et en avons tiré les conclusions qui s’imposaient ? Michel ne le croit pas.

La complaisance de la gauche

« Où est le mouvement contre la guerre ? Où sont les pacifistes ? » demande-t-il. « En Angleterre et dans plusieurs autres pays, les gens manifestent contre la guerre. Il y a peut-être beaucoup d’illusions sur les interventions possibles de l’organisation des Nations unies, qui est manipulée par Washington, mais au moins on agit ! » tonne-t-il.

Il s’étonne que les mouvements sociaux continuent de s’opposer au libre-échange, à la Zlea, en dissociant ces revendications de la lutte contre la guerre.

« La donne est changée depuis le 11 septembre, mais pour les mouvement sociaux, ça semble être business as usual. Pourtant, on ne peut se cantonner dans une approche locale, alors que la guerre va s’approprier les budgets des gouvernements.

« Il n’y a pas non plus de projet souverainiste possible sans compréhension des enjeux que pose la guerre de conquête de l’empire étatsunien présentement en cours. Qu’on pense seulement que les États-Unis viennent d’établir une structure de commandement militaire unique pour l’ensemble de l’Amérique du Nord. C’est le volet militaire de l’Alena. »

Il interpelle le mouvement antimondialisation et la gauche, qu’il qualifie de complaisante. « Ces mouvements s’en prennent au FMI et à la Banque mondiale, mais non aux États-Unis dont on sait pourtant qu’ils tirent les ficelles de ces deux organisations. »

Il critique également le rituel des contre-sommets et de la soi-disant « participation de la société civile ». « On ne remet pas en cause le pouvoir. On crée l’illusion d’une démocratie constitutionnelle. Ce n’est pas surprenant dans la mesure où ces conférences et teach-ins internationaux sont souvent financés par les gouvernements ou des fondations privés comme la Rockefeller ou la MacArthur Foundation. » Clairement, ces sommets parallèles internationaux ne peuvent pas constituer la base de la lutte contre la guerre.

« Pour désarmer l’empire américain, écrit-il dans son livre, nous devons passer à un niveau supérieur et lancer des mouvements de masse dans nos pays respectifs. Ce sont les forces populaires qu’il faut mobiliser en vue de contester ceux qui menacent notre avenir collectif ».

Pour mobiliser le peuple, il faut l’informer, démasquer le mensonge officiel, enlever toute légitimité aux gouvernants qui appuient la guerre, en révélant au grand jour les mécanismes du système totalitaire qu’on est en train de mettre en place.

C’est ce que fait admirablement bien son livre Guerre et mondialisation. À lire absolument !