L’auteur et économiste à la CSQ.
Ce texte est paru dans Nouvelles CSQ, automne 2009
L’évolution du régime fiscal fédéral touchant les entreprises est proprement consternante. En cinq ans, le taux d’impôt sur les profits aura été réduit du tiers, soit 7,12 points de pourcentage, tandis que la taxe sur le capital aura été abolie.
Dans son Énoncé économique d’octobre 2007, le gouvernement évaluait à 50,5 milliards la somme des allègements fiscaux consentis aux entreprises de 2007 à 2012[1]. Sans doute ces estimations, qui datent d’avant la récession, sont-elles quelque peu excessives. Mais cela demeure énorme.
La liquidation du régime fiscal corporatif ne date pas d’hier et n’est pas l’apanage des conservateurs. C’est Paul Martin qui a ouvert le bal dans son budget de 2000 quand il a entrepris de réduire le taux général d’imposition des profits, de 29 % à l’époque, au niveau du taux applicable au secteur manufacturier, soit 21 %.
Par la suite, les concessions se sont empilées : abolition de la taxe sur le capital, abolition de la surtaxe sur les profits, réduction du taux d’imposition des entreprises. Les conservateurs en ont rajouté, si bien que le taux d’imposition des profits passera graduellement de 22,12 % en 2007 à 15 % en 2012.
Le gouvernement tente de justifier ces baisses d’impôt en disant qu’il vise à instaurer le taux d’imposition le plus bas parmi les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) pour les nouveaux investissements.
Mais avec les récentes annonces par l’Ontario de baisses d’impôt pour les entreprises, avec les annonces par l’Ontario et la Colombie-Britannique de l’harmonisation de leurs taxes de vente avec la TPS fédérale, l’objectif est largement dépassé. Le taux d’imposition sur les nouveaux investissements (TEMI) tomberait à 16,4 %, comparativement à 21,8 % en moyenne pour l’OCDE et 34,4 % pour les États-Unis[2].
Au cours des dernières années, l’érosion de la fiscalité touchant les entreprises n’a guère suscité d’émoi. Les profits en expansion constante engendraient des rentrées fiscales croissantes et le gouvernement enregistrait toujours des surplus. Mais avec la récession, la donne a changé.
Confronté à des déficits conjoncturels importants, le gouvernement fédéral va se montrer plus réticent à déployer les efforts financiers nécessaires pour améliorer le régime d’assurance emploi, accroître le soutien financier pour l’enseignement supérieur, compenser adéquatement le Québec pour l’harmonisation des taxes de vente, etc.
En fait, dans le contexte actuel, ces réductions d’impôt sont encore plus insensées. Si le gouvernement suspendait les réductions du taux d’imposition des profits prévues pour les prochaines années, en laissant le taux au niveau actuel de 19 %, il obtiendrait environ 21 milliards de plus[3] au cours des quatre prochaines années. Ce n’est pas à dédaigner…
Taux d'imposition des profits au fédéral |
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|
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Taux d'imposition du revenu général des sociétés |
Taux de la surtaxe |
Total |
2000 |
28 |
1,12 |
29,12 |
2001 |
27 |
1,12 |
28,12 |
2002 |
25 |
1,12 |
26,12 |
2003 |
23 |
1,12 |
24,12 |
2004 |
21 |
1,12 |
22,12 |
2005 |
21 |
1,12 |
22,12 |
2006 |
21 |
1,12 |
22,12 |
2007 |
21 |
1,12 |
22,12 |
2008 |
19,5 |
|
19,5 |
2009 |
19 |
|
19 |
2010 |
18 |
|
18 |
2011 |
16,5 |
|
16,5 |
2012 |
15 |
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15 |
[1] Énoncé économique, octobre 2007, T. 3.1, p. 79.
[2] Énoncé économique, octobre 2007, Graphique 3,3.
[3] Calculs sur la base des estimations de revenus des sociétés du Directeur parlementaire du budget, Énoncé économique et budgétaire, juillet 2009.
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