Du déjà vu chez Québec Solidaire

2024/05/15 | Par Pierre Beaudet et Ronald Cameron

Le développement de la plateforme électorale de 2022 s’est étendu sur près d’un an pendant la pandémie. D’entrée de jeu, il a été établi que sa composition ne devait comprendre que des propositions pouvant être mises en œuvre dès le premier mandat, au détriment des propositions à plus long terme définies dans le programme général.

Par exemple, concernant les enjeux climatiques, si l’aile parlementaire du parti consent à reprendre une revendication ambitieuse de réduction des cibles de gaz à effet de serre (GES) pour donner suite à une proposition des mouvements environnementaux, elle convainc les délégations en congrès d’écarter plusieurs propositions de nationalisation qui permettraient de rendre possible l’atteinte d’une telle cible, mais dont l’application irait bien au-delà du premier mandat.

Le souci est d’éviter de marquer le programme en environnement par une dominante de nationalisation au détriment de l’élargissement des appuis de l’électorat.

L’enjeu des élections qui viennent, pour la direction de QS et l’aile parlementaire, est d’avancer des propositions qui expriment le sentiment d’urgence reconnu par la population, tout en laissant dans l’ombre des éléments de transitions à long terme.

Pour plusieurs, ce « réalisme » risque d’éloigner les jeunes et, de manière générale, les partisans d’une « grande transition » : « On ne peut, au nom de la crédibilité électorale, masquer les tâches politiques que cette transition implique. Une plateforme qui rejette globalement les perspectives de nationalisation empêche toute chance de réaliser l’objectif de réduction des GS » (Frappier, Lévy et Rioux, 2021).

L’approche définie dans l’élaboration du programme a tendance à développer une dichotomie entre la plateforme électorale et le programme a plus long terme inspiré par les mouvements et les principes fondateurs du parti.

Les conclusions de ce congrès de novembre 2021 ont fait dire à des analystes que QS se recentrait et suivait les traces du PQ. D’autres ont souligné le danger d’un ravalement par le bas, qui pourrait faire baisser le vote jeune et radical sans nécessairement augmenter l’électorat de centre gauche.

Mi-figue, mi-raisin, le résultat de l’élection de 2022 déçoit. Il ne poursuit pas la lancée de 2018. Si l’essentiel des forces de QS est intact, le surplace remet l’avenir en question! Pourquoi le « mouvement » des solidaires n’a-t-il pas progressé? Faut-il atténuer le programme pour élargir l’électorat et se limiter aux propositions trompeuses et simplifiées de la CAQ?

Pierre Beaudet et Ronald Cameron, Québec Solidaire et les mouvements sociaux, in Le Québec en mouvements (PUM, 2023).